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la Franc Maçonnerie au Coeur

la Franc Maçonnerie au Coeur

Un blog d'information, de conversations sur le thème de la Franc Maçonnerie, des textes en rapport avec la Franc Maçonnerie, comptes rendus et conseils de lectures.

Publié le par Jean-François Guerry
Cicéron

Cicéron

LE BIEN MORAL, LE BIEN SOCIAL

 

Le stoïcisme ne visait qu’une seule chose le Bien moral. Le stoïcien était persuadé que la pratique du bien moral rendait l’homme meilleur, plus exemplaire, plus humain et que cela avait des conséquences sur lui et sur la société. L’édification par le stoïcien de sa « Citadelle intérieure » selon l’expression de Pierre Hadot, de son temple intérieur disent les Francs-maçons a des conséquences sur la vie en société.

 

Il ne s’agit de nourrir la société à la « Moraline » à un ersatz de morale instrument d’une mêtis, ruse de sophiste pratiquée par ceux qui adaptent leurs discours en fonction de chaque auditoire, prenant en compte chaque cas particulier au détriment du bien collectif.

 

Cela nous amène à une réflexion sur l’interaction ou la séparation entre le domaine privé et le domaine public, ce que l’on nomme aujourd’hui la vie privée et la vie publique. La barrière infranchissable entre la sphère privée et la sphère publique, qui génère une confusion avec la nécessaire discrétion de ce qui est intime. Trop souvent les hommes publics se réfugient derrière cette barrière, ils sont des hommes comme les autres, mais aussi des hommes différends par le choix de leur engagement au service des autres.

Cela me rappelle une intervention du philosophe Andrè Comte Sponville lors de la dernière campagne présidentielle à propos d’un candidat ancien premier ministre et dont certaines pratiques contestables furent découvertes mal ou bien à propos selon ses opinions. André Comte Sponville déclara qu’il ne fallait pas confondre la morale et la politique. En quelque sorte que l’on pouvait avoir un comportement amoral et être un bon homme politique, avec de bonnes idées. Il faut reconnaître que les leçons de morale de ce candidat rencontraient pas mal de succès auprès des cœurs purs ! Il faut toujours se défier des excès de pureté. Il est des bons pasteurs aux prêches affutés, qui n’hésitent pas à dire et font peu, par manque d’humilité.

 

L’homme est un animal social ou politique disait Platon, parce que l’action est une prérogative exclusive de l’homme, il n’est ni bête, ni dieu qui ne sont pas capable d’action. Aristote renforça cette assertion, il est un animal social et son action dépend de la constante présence d’autrui, je dirais personnellement que cela lui confère une responsabilité par rapport à autrui.

 

L’homme s’est longtemps consacré à sa famille à agit dans la sphère privée, avec l’aide des dieux du foyer « les pénates ». Vivons chez nous, vivons cachés nous vivront heureux. L’homme était le potestas patris familias c’est-à-dire une sorte de tyran incontesté et incontestable. La famille étant donc parfaitement inégalitaire. La massification de la société a conduit les patriarches d’abord à fédérer les familles, puis à sortir dans la Polis, la cité, à s’intéresser à son organisation.

En franchissant la porte de ses pénates, l’homme est passé de l’inégalité familiale à l’égalité citoyenne, mais il resté imprégné des valeurs du privé en passant dans le public.

 

La preuve la société a longtemps été imprégnée de ses valeurs, même hors de la sphère d’influence des traditions religieuses. Les guildes, les corporations, les confréries, jusqu’aux compagnies, qui en témoignent par leur modèle d’organisation, leurs statuts juridiques. On trouve en leur sein des Apprentis, des Compagnons, des Maîtres, des Présidents. La Franc-maçonnerie n’y échappe pas le terme de Loge mère est un bon exemple, ce qui suppose qu’il y a un père un vénérable, un ainé le premier surveillant, un cadet le second surveillant et de nombreux enfants et descendants les frères suivant leurs grades et qualités. Il y a association relation entre le grade et la qualité, une hiérarchie parfaitement inégalitaire. Que penser dès lors de l’obligation de transmettre les valeurs reçues en loge dans la société des profanes. Il y a donc bien une inter action privé public.

 

Les hommes qui partagent des valeurs matérielles, des savoirs, des valeurs spirituelles, dans une famille ou une loge mère sont les mêmes qui sont citoyens dans le monde profane. Les biens moraux privés deviennent de surcroit des biens moraux collectifs, il n’y a dès lors plus de distinctions, seul reste le bien moral en général, ce bien des stoïciens.

Je rajouterais qu’il faut du courage à ceux qui vivent tranquillement dans leurs pénates pour se lancer dans la vie publique quand ils sont sincères, je ne vois pas pourquoi ces hommes seraient moins intègres que les autres citoyens, ce sont les mêmes que nous voyons dans les Associations, les Confréries, qui tentent l’aventure dans la société. Ils donnent une partie de leur amour pour la vie privée à la société. Ils insufflent la vertu et la morale dans la vie publique, leur courage devient le courage politique. L’homme qui vit en retrait dans sa seule sphère privée, se prive du contact des autres, de l’amour des autres, il est en manque de la réalisation des plus hautes valeurs humaines.

Cicéron fut l’un de ces hommes, il n’est pas à l’origine de grandes thèses philosophiques, nous n’avons retenu de lui que ses dons d’orateur et ses célèbres discours. Il fut bien plus que cela dans la Rome Antique : questeur (magistrat), édile (élu par le peuple), prêteur (adjoint du proconsul chargé de la justice), proconsul (gouverneur de plusieurs provinces). Je le compare à l’orateur de la loge maçonnique, gardien de la loi, conciliateur, organisateur de l’harmonie de la loge, conseiller de son vénérable maître, ses qualités de rhéteur en font un frère écouté.

Cicéron s’efforçait d’être vertueux, pour lui-même mais bien plus pour sa ville de Rome.

« La justice et l’harmonie parfaite que font entendre toutes les voix de la cité quand elles cherchent à imiter l’âme des meilleurs citoyens ».

 

Je constate que nous manquons cruellement d’hommes comme Cicéron qui soient vertueux dans la vie et dans la vie publique, faisant passer l’intérêt collectif avant leur intérêt particulier. Cicéron comme l’a dit Clara Auvray-Assayas dans le livre quelle lui a consacré : « (…) à fait du métier d’homme un travail incessant avec les autres et soi-même ». Il était loin de notre individualisme qui ronge notre société. Stefan Zweig dans sa biographie dit de lui : « Marcus Tullius Cicéron, qui jusqu’à lors n’était qu’un humaniste devient le premier avocat de l’humanité ».

 

      Jean-François Guerry.

 

 

Bibliographie ayant inspiré ce court article :

 

  • Hannah Arendt : Condition de l’homme moderne- Biblio Essais.
  • Jean-François Guerry : Exercices spirituels antiques et Franc-maçonnerie. Préface de Charles-Bernard Jameux Éditions Académie Maçonnique Provence et Éditions Ubik 2021.
  • Rituel Maçonnique SCDF.
  • Clara Auvray-Assayas : Cicéron Éditions Belles Lettres 2006.
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F
Bonjour,<br /> Concernant Cicéron, et pour le peu que je connaisse des écoles philosophiques il faut quand même souligner que sa rigidité n'a pas laissé beaucoup de place aux stöiciens... L'individualité n'y a plus de place tout comme la rhétorique. Et cela n'est pas sans me rappeler un certain président à l'approche des élections... Mais peut-être est-ce un mal nécessaire, me direz-vous, dans cette société décadente: la seule question à se poser dans ce cas est de savoir qui est à l'origine de cette décadence, ce qui n'est pas sans me rappeler la Grèce antique. La boucle est bouclée....<br /> Bien fraternellement, de Frère Tuck.
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