Je me suis souvent demandé pourquoi, j’avais frappé à la porte du temple, poussé par un désir d’appartenance. Une inconsciente curiosité, un ennui existentiel, une solitude morale, une envie de participation à la vie sociale, être utile, ou plus simplement connaître l’être au-delà de l’avoir.
Une envie de vouloir connaître autrui, pour me reconnaître, comme une soif de juvénilité, écouter mon ange.
Quand j’étais jeune, je n’ai pas eu la chance du partage, j’étais unique, fils unique, j’ai beaucoup reçu et peu donné. Le besoin du groupe s’est vite fait sentir, l’engagement dans le scoutisme, la participation dans des associations, l’expression théâtrale, l’écriture. Une envie du bien commun, d’humanitude, de tout.
De la religion j’ai reçu le bien et le mal, j’ai reçu, la douceur, l’amour, la joie religieuse de ma grand-mère, la messe où l’on chante, mais j’ai reçu aussi cette résurgence d’une scolastique médiévale, dogmatique de mes professeurs, les bons frères. J’ai dû m’affranchir de cette empreinte, franchir ces grilles pour connaître les autres et m’enrichir de leurs différences.
Boris Cyrulnik dans son livre : La psychothérapie de Dieu, décrit l’attachement à Dieu. Cet attachement m’a donc été transmis par mon milieu familial et mon éducation, il est devenu pour moi au-delà d’une incarnation religieuse, le concept du Grand Architecte de l’Univers. Dans cet attachement religieux j’ai trouvé inconsciemment la force d’affronter les épreuves de la vie, fussent-telles ordinaires. Cette force a évolué vers la sagesse et la beauté par mon initiation maçonnique, j’ai eu alors la joie, le bonheur de l’amour fraternel.
Ma spiritualité religieuse a été sans doute ma porte d’entrée, mon passage vers une spiritualité plus universelle, plus ouverte, plus tolérante. J’ai eu cette chance de la foi, Boris Cyrulnik écrit :….Quand le milieu familial et culturel lui propose une spiritualité, cette personne dispose d’une arme mentale qui l’aide a trouver le soutien affectif, la solidarité et la transcendance suffisante…. » Mais comme il le précise plus loin, cette religion qui m’a été donnée est : « Un phénomène relationnel et social, alors que la spiritualité est un prodige intime. »
L’appartenance religieuse est la face exotérique de la spiritualité, elle se complète pour moi par mon appartenance maçonnique, mon initiation véritable ésotérisme, l’intime se déploie alors, concrétisant une forme d’harmonie de réalisation totale de l’être.
Je n’avais donc pas besoin d’un ersatz de religion quand j’ai frappé à la porte du temple maçonnique, la religion m’avait été donnée, transmise. Je recherchais autre chose, sans pour autant renier mes acquis, il me fallait, mettre mes pas dans un autre chemin, conquérir une nouvelle contrée par moi-même, je cherchais la Connaissance de : « Ce sentiment qui émerveille, ceux qui l’éprouvent, comme un souffle, une vapeur extatique qu’ils désignent par le mot esprit, qui a donné spiritualité. Celui qui ressent un tel événement invisible et bouleversant, possède la preuve vécue de la nature de l’âme. » C’est connaître l’intelligence du cœur qui surpasse tout et unit les hommes entre eux, cœur et âme.
Appartenir, être dans ce mouvement initiatique qu’est la Franc-Maçonnerie c’est ressentir son âme et partager cette spiritualité, sans pouvoir l’exprimer avec des mots qui ne parlent qu’aisément du corps, mais sont inaptes à parler de l’exception, de l’abstraction de l’âme. (seuls quelques grands initiés arrivent à mettre des mots sur le concept d’âme, ou bien quelques grands poètes, les larmes de joie de leurs vers, nous donnent une vision de cette âme cachée, François Cheng est de ceux-ci lire son livre « De l’âme » est une révélation de celle-ci.)
C’est dans le silence de l’écoute sur sa colonne au nord, sous la pâleur de la Lune, que l’apprenti Franc-Maçon, réalise que cette appartenance est sa volonté d’être et d’écouter son âme, son cœur, et de partager avec ses Frères, la joie au point du jour. Il sera alors reconnu comme tel par ses Frères.
JF.
Le Désert intérieur de Marie-Madeleine Davy