CHEMIN INITIATIQUE
Celui qui marche, celui qui ne recherche aucune performance, même à hauteur d’homme, cherche bien plus peut-être.
Sur la route de Compostelle, Jean-Christophe Rufin est entré en contact avec la beauté resplendissante du chemin, il a écrit avec la poussière d’étoile reçue dans tout son être, la terre du Camino a fait vers lui une ascension.
« Compostelle n’est pas un pèlerinage chrétien mais bien plus, ou bien moins selon la manière dont on accueille cette révélation. Il n’appartient en propre à aucun culte et, a vrai dire, on peut y mettre tout ce que l’on souhaite. S’il devait être proche d’une religion ce serait la moins religieuse d’entre elles, celle qui ne dit rien de Dieu mais permet à l’être humain d’en approcher l’existence. »
Sur le chemin on se déleste de l’inutile, des médiocres encombrants qui alourdissent le cœur et l’âme. On ne pense plus à ce que l’on est, on naît, on est tout simplement. Jean-Christophe Rufin écrit encore :
« Il délivre des tourments de la pensée et du désir, il ôte toute vanité de l’esprit et toute souffrance du corps, il efface la rigide enveloppe qui entoure les choses et les sépare de notre conscience (…) comme toute initiation elle pénètre l’esprit par le corps et il est difficile de la faire partager à ceux qui n’ont pas fait l’expérience. »
Le chemin est un secret à partager avec ceux qui l’on fait, comme toute initiation, mais surtout avec soi-même.
« En partant pour Saint-Jacques je ne cherchais rien et je l’ai trouvé. »
Pour quoi les humains se jettent-ils corps et âme sur le chemin initiatique, sans trop savoir pourquoi ? Sans doute à la recherche de l’essence, de la substantifique moelle Rabelaisienne, enfermée au sein de leur carapace.
« C’est ainsi que les humains d’aujourd’hui après un long détour des monothéismes, en reviennent parfois à des éblouissements spirituels qui leur font incarner le divin dans les objets de la nature : les nuages, la montagne, les chevaux. »
Dans un monde égoïste, égotiste, qui malmène la nature, il y a de l’écologie dans retour à ce chemin. L’on parlait autrefois avec ironie du retour à la nature, en moquant ces gardiens de chèvres improvisés venus en Ardèche oublier les banlieues bétonnées dans l’urgence. L’urgence aujourd’hui n’est plus dans le béton, mais de sauver la planète.
« Le chemin réenchante le monde. Libre à chacun dans cette réalité saturée de sacré d’enfermer sa spiritualité retrouvée dans telle religion, dans telle autre ou dans aucune.(…) L’esprit perd sa sécheresse et oublie le désespoir où l’avait plongé l’absolu domination du matériel sur le spirituel,(…) sur l’éternité de l’au –delà. »
Et puis s’il n’y a rien au bout du chemin, après tout ce n’est pas l’essentiel, il y aura toujours eu le chemin, qui est tout à lui seul. La vie initiatique est tellement riche en elle-même, immensément riche de l’or spirituel retrouvé en soi.
Jean-François.
Les citations sont de Jean-Christophe Rufin extraites de son : Immortelle randonnée Compostelle malgré moi. Parue aux Éditions Guérin à Chamonix ISBN 978-2-35221-061-0