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la Franc Maçonnerie au Coeur

la Franc Maçonnerie au Coeur

Un blog d'information, de conversations sur le thème de la Franc Maçonnerie, des textes en rapport avec la Franc Maçonnerie, comptes rendus et conseils de lectures.

Publié le par Thierry Didier
G.W Leibniz

G.W Leibniz

Aporie au sujet de l'espace, transcendance la réflexion se poursuit. La raison suffisante de Leibniz...
L'ESPACE EST L'ORDRE DES CHOSES QUI COEXISTENT Part V.
Photo de aldebarans sur Unsplash

« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent » : ce qu’il y a de très parlant dans cette phrase, est ce principe d’égalité entre d’une part l’espace, qu’on définit intuitivement comme un volume, et d’autre part 3 concepts autonomes, ordre, choses et coexistence, qui pour autant sont liés par un point de jonction, qui va leur permettre de se combiner. En effet, dit comme ça, qui peut penser qu’« ordonner un absolu multiple » puisse nous amener intellectuellement à y voir un volume ? C’est a priori proprement impossible, parce que les dimensions que nous sommes supposées imaginer sont indépendantes : seul notre entendement d’humain permet d’y voir des liens, Cette transcendance semble empêcher toute digression à une dimension supplémentaire, puisque l’ordre tel qu’il est formulé provient déjà de ce que Leibniz appelait le Divin, mettant un terme à une spiritualité encore plus élevée. Ce qu’il y a de singulier avec l’espace est qu’il se définit, pour être entendable, avec des limites, qu’il est borné, entre 2 ères, 2 battements,2 lettres, sauf dans son acception d’espace universel, qui apparaît alors un peu comme une aporie : cette aporie fragilise la compréhension de cette notion, mais en même temps oblige à s’y référer, et donc à relativiser. Nous retrouvons là l’aporie de la quadrature du cercle ( 5ème degré) et celle d’un heptagone qu’on voudrait régulier ( 17ème degré) Si l’on y regarde de plus près l’espace, comme l’ordre ou la chose ne sont pas palpables : c’est leur incidence dans le tangible qui est perçue : le concept de substance, cher aussi à Leibniz, recouvre bien ces 3 termes. Pour Spinoza, n'existe qu'une seule substance (définie comme « ce qui est en soi et est conçu par soi ») : Dieu, la pensée et l'étendue n'étant pour lui que des attributs, parmi d'autres possibles, de cette substance. La vision de Leibniz est complémentaire, dans cette volonté d’articuler des occurrences, pour en réaliser seulement ensuite un tout. Ces 2 visions s’entendent et me semblent complémentaires. La conception leibnizienne de « raison suffisante » trouve, elle, son expression scientifique dans ce que les astronomes appellent, nous y reviendrons plus tard, « le réglage fin de l’univers », c’est-à-dire l’équilibre et la finalité la plus adaptée que semble posséder l’Univers dans lequel on baigne. Cependant, sur le plan théologique, Leibniz y ajouta le concept de théodicée ontologique, qui veut que ce que nous percevons de l’univers n’est pas exempt de défauts, car sinon l’univers serait Dieu lui-même, invisible car transcendant dans son essence. Je trouve cette théorie extrêmement séduisante, quand bien même les gnostiques verraient dans ces défauts une expression possible du mal, du malheur et de la misère inséparables de la condition humaine. Cette notion de « défauts » est à prendre au sens large, à la façon de ce qui résulte de la chute adamique, c’est-à-dire une somme infinie de « détails » qui rend immanente notre existence : les défauts pourraient être ce qu’on appelle en franc-maçonnerie les « métaux », c’est-à-dire des propriétés consubstantielles, des supports irremplaçables permettant la continuation de la vie dans ses joies mais aussi ses désagréments. Ces métaux sont cités dans la cérémonie d’initiation au 1er degré, mais uniquement sur un plan moral, limités alors aux passions tristes qui habitent l’humain. En fait, si l’Univers est appréhendable pour nous humains c’est qu’il comporte des défauts, qui accrochent l’entendement et permettent justement à l’œil et à l’intellect humain de voir ses dissonances, l’humain étant par principe dissonant lui-même, comme le prouve sa vision toujours binaire de l’existence.

C’est aussi un peu le mantra du jeune normalien Nathan Devers, qui nous explique fort habilement que « philosopher, c’est penser contre soi-même ». Ces métaux sont au contraire les jalons qui permettent à la pensée de ne pas se perdre dans les méandres d’une bienséance lénifiante, portée comme les canons d’une quelconque orthodoxie. Les « défauts » leibniziens, et donc les métaux maçonniques sont les viatiques et les témoins vivants de l’existence profane : c’est pourquoi on les laisse à la porte du temple lorsqu’on y entre, puis on les reprend en quittant ledit temple. Cet acte est vécu exotériquement comme une façon de se dépouiller, dans l’espace sacré de la loge, de vices et de comportements vécus moralement comme un joug ou un fardeau : hubris, concupiscence excessive, avarice et autres travers qui alourdiraient et freineraient alors notre capacité à nous améliorer, bref, tout ce que la morale judéo-chrétienne condamne. Cette approche est néanmoins incomplète, car ésotériquement, il s’agira aussi pour l’initié de se départir temporairement desdits métaux, à la façon dont on construit pas à pas une expérience, en faisant varier des paramètres qui représentent également ce qui a servi à construire l’homme profane avant son entrée dans le temple. L’espace sacré auquel nous faisons référence pourra alors être entendu comme un modèle expérimental, retranché un temps de la vie commune et de ce qui la caractérise. Toute expérience est par essence renouvelable, mais aussi susceptible d’être modifiée, par la variabilité de ses acteurs : or l’homme représente par lui-même un ensemble cohérent de caractéristiques mobiles, qui instilleront dans ce milieu sacré des mouvements contribuant à son évolution. L’homme, dans son immense imperfection, constituera là l’électron libre ou le « facteur X » du sacré. Pour en revenir au principe leibnizien de « raison suffisante », certains astrophysiciens en transposent le sens dans ce qu’ils nomment le « réglage fin de l’univers », c’est à dire la conséquence de la succession d’un nombre presqu’infini de paramètres qui ont contribué à l’émergence de l’univers tel que nous l’observons aujourd’hui, qui est donc viable car existant. Le qualifier de « réglage fin » n’est pas en soi une erreur, mais il peut sous-entendre que nous sommes partis d’une masse informe, et qu’un « régleur » existe : ce sera le point de vue du théiste ou du déiste. Mais si on prend l’univers aujourd’hui, on peut aussi y voir l’avènement d’un monde qui serait le seul héritier d’un nombre incommensurable de tentatives, nombre qui, confronté à cette sélection infinie, n’aurait abouti qu’à un seul univers, celui que l’on connait, et qui pourrait aussi être le produit du hasard, sans conscience supérieure... On peut aussi considérer que le réglage en lui-même est déjà une architecture suprême, guidant un principe déiste tel que le Grand Architecte De L’Univers. Certains pensent même que nous serions les seuls êtres de cet Univers connu ; cela va à l’encontre des théories probabilistes, mais jusqu’à preuve du contraire, on ne peut pas complètement écarter cette possibilité. Nous rejoignons alors le principe de raison suffisante de Leibniz, qu’on peut voir comme la somme infinie des raisons particulières parmi lesquelles ne subsiste qu’une possibilité, celle ayant abouti à notre monde d’aujourd’hui.

Les croyants vont partir de maintenant, et y voir l’incroyable addition de facteurs ne pouvant provenir que d’une entité divine. Les non croyants partiront au contraire d’un potentiel de facettes possibles infinies, qui, soumis au tamis du hasard des circonstances, aboutiraient à cette forme contemporaine. Quelque part, l’espace sacré de la loge est aussi, en ce qu’il représente l’Univers, le produit de cette raison suffisante, car aucun des éléments qui le composent n’est au final inutile ou superflu, formant un tout à la fois stable et cohérent, dans la stricte observance de la durée et du contenu des travaux. De plus, la Tradition qui porte notre ordre est un véritable « niveau d’Achab », c’est-à-dire qu’elle crée et détruit en permanence. Il s’agira donc ici aussi d’un « réglage fin », opéré pas à pas, produisant un milieu équilibré, c’est-à-dire durable mais qui reste néanmoins soumis à une progressivité permanente qui provient bien sûr de la personnalité des maçons qui s’y intègrent. Leibniz définit la raison suffisante par cet axiome : « Il faut changer le moins possible, il faut choisir le milieu entre les contraires, il faut compenser toute soustraction par une addition. » Cette sentence un peu sommaire explicite néanmoins très bien que toute chose soumise à la flèche du temps et de l’espace se doit pour rester dans la course de la réalité, d’épouser des remaniements et donc une forme de continuité dans le changement. Si la franc maçonnerie est efficiente, c’est justement qu’elle optimise en permanence les situations possibles ; le principe de parcimonie devient alors l’à-côté indispensable à une optimisation. Le sacré correspond à cette optimisation du milieu : on a coutume de se concentrer sur le caractère clivé et en retrait de cet espace sacré par rapport au monde profane, mais il s’agit là d’une conséquence, et non d’une cause. Cela dit la liturgie maçonnique se doit de borner cet espace sacré, pour 2 raisons : 1°) parce que Rite et rituel sont des modes opératoires, et se doivent donc de préexister à ce qu’ils induisent, en l’occurrence une forme de sacralisation, et 2°) parce que ce modus operandi s’adresse à tout un chacun, sans distinction de niveaux, cela impliquant un processus simple et efficace : ce seront l’ouverture et la fermeture des travaux. Ce sacré diffère surtout du profane par une organisation perfectionnée qui en est la signature : tout ce qui s’y trouve est optimisé par le rite et le rituel, qui ne sont pas seulement des biais, mais aussi des leviers les plus adaptés possibles aux circonstances qui s’y déroulent. Ce terme de travail doit être entendu dans ses acceptions diverses, à savoir, faire avec une discipline, un code, mais aussi sous son aspect obstétrical, qui amènera à accoucher d’une idée, en partant d’un domaine, pour aboutir à une autre domaine, un peu comme le nouveau-né passe du milieu utérin au milieu extérieur. Le travail est une action qui réclame donc un continuum : « La Nature ne fait pas de sauts » nous dit Leibniz. Nous allons en reparler.

Thierry Didier.

LE LIVRE DE THIERRY DIDIER
L'ESPACE EST L'ORDRE DES CHOSES QUI COEXISTENT Part V.
L'ESPACE EST L'ORDRE DES CHOSES QUI COEXISTENT Part V.

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C
Ouah, quel morceau d'architecture! <br /> Je me suis pris la tête à plusieurs reprises pour essayer de comprendre quelque chose à ce texte très certainement intéressant mais qui exige de son lecteur d'avoir au moins l'agrégation de philo pour en tirer la substantifique moelle, ce qui n'est pas mon cas ! Certes , beaucoup sans doute s'extasieront devant la haute signification de cet écrit sans doute remarquable et déclareront en partager l'esprit, mais tout à fait entre nous, nom de D... , je crains que le maçon moyen "n'y entrave que dalle"! <br /> Que Leibnitz et TD me pardonnent!
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