DIFFERENT, DIFFEREND
Par facilité, l’on cède à l’incontournable de Saint-Exupéry :
« Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis. »
Il semble aujourd’hui que les différences exacerbent les rapports humains, et qu’elles n’enrichissent pas tout le monde au sens propre comme au sens figuré ! Il y a dans l’air comme un parfum de révolution, à l’orée du joli mois de mai on regarde l’année 1968, ou encore juillet 1989.
Dans une société de comptables et de financier (je n’ai rien contre ces professions), on regarde des lignes de chiffres, en baissant la tête sans jamais voir, ni les hommes, ni le ciel. On range, on compte, on catégorise au mieux, et les fêlures deviennent des fractures ouvertes. On oppose les riches et les pauvres, les vieux et les jeunes, ces vieux qui mangent trois fois par jour et parfois prennent un goûter, n’à pas hésiter à déclarer dans un élan d’humanité une élite du nouveau monde. Nous demandant ensuite de participer au Vivre ensemble.
Je fais partie de cette cohorte coupable des nantis, de tous ceux qui sont nés juste après la dernière guerre, quand tout était merveilleux ! Quand nos parents bouchaient les trous béants des bombes, creusés par l’ignorance et le fanatisme. Il leur en a fallut du courage et de l’espérance pour oser me faire venir au monde !
Alors, oui, j’ai vécu comme tout le monde les trente glorieuses, celles que l’on nous reproche sans cesse. Qu’avons-nous fait de nos 40, 50 heures et plus de travail, nous avons construit notre vie, participer à la reconstruction de notre pays, nous avons élevé nos enfants, nous les avons aidés, nous aidons maintenant nos petits enfants quand nous le pouvons. Nous avons accepté le travail, sans discuter de la convention collective, des jours fériés, des jours de carence, des horaires, parce-que nous célébrions la gloire au travail.
Nous avons reçus et nous avons donné
Puis est venu, vers midi, le temps de construire une autre cathédrale, cette cathédrale intérieure, cette humble église romane, où la lumière ne pénètre que par rayons, et réchauffe les pierres qui suintent, qui pleurent, ceux qui sont montés au centre de la rose mystique.
Alors oui je suis devenu peu à peu différent, magie du chemin initiatique, j’ai rencontré un homme cet autre moi-même. Je suis passé progressivement de l’équerre au compas, sans oublier la rectitude et la justice.
J’ai eu un deuxième bonheur, celui d’équilibrer ma vie, de lui donner du sens. Dans ma vie profane après tout je n’ai fait que mon devoir moral, j’ai eu ma part et j’ai donné ce que j’ai pu à la société qui m’a accueilli quoi de plus normal, j’ai eu la chance de ne pas naître sur les trottoirs de Manille ou d’ailleurs,comme dit le chanteur.
Je fais donc mon deuxième parcours, plus lent, plus progressif, l’éveil à mon être intérieur. Je déchire le voile douillet de la conscience morale extérieure, j’essaye de détruire mon Ego, pour accéder à la conscience de mon être intérieur.
« Un éveil de plus en plus puissant de la conscience et son ascension à des niveaux de plus en plus hauts, une vision et une action qui s’élargissent sans cesse, telles sont les conditions de notre progrès vers cette perfection suprême, totale, qui constitue le but de notre existence. » Sri Aurobindo.
Ce chemin est long, jalonné d’une multitude de portes fermées qu’il faut ouvrir pour apercevoir la lumière. Je l’ai vu cette lumière dans les loges, dans les ashrams, sur les pierres des églises romanes, je l’ai vue courir sur les berges du Nil ou du Gange, je l’ai vu illuminer les montagnes du Tibet, mais surtout je l’ai vu dans les yeux de mes sœurs et de mes frères.
Dans ce monde intérieur tout est différent et le même à la fois.
Jean-François.