À PROPOS DU LIVRE DE LA SAGESSE ET DE L’ÉCCLÉSIASTIQUE
Le Livre de la Sagesse fait partie des livres poétiques et sapientaux de l’ancien testament, il est connu comme le plus récent d’entre eux son support est la Sagesse légendaire du Roi Salomon, son auteur probablement un juif connaissant la langue grecque et résidant à Alexandrie. Son auteur était soucieux de préserver et transmettre la tradition juive dans le bouillonnement spirituel de la marmite égyptienne d’Alexandrie où se mêlait la diversité des traditions et leurs enseignements fortement imprégnés par la philosophie grecque, les religions à mystères, les initiations égyptiennes, l’alchimie, l’ensemble de l’hermétisme alexandrin. Ce livre de la Sagesse veut faire la démonstration de la présence immanente du Dieu transcendant en s’appuyant sur le récit mythique de l’exode. Une tentative d’association de la Foi et la Raison. On retrouve ce thème plusieurs siècles plus tard dans la tradition chrétienne par exemple dans la lettre encyclique de Jean Paul II, une ouverture entre la philosophie et la Foi, une reconnaissance de la participation de la Raison pour la compréhension des mystères.
Je soumets quelques extraits à votre réflexion, comme un geste d’encouragement pour lire ou relire ce Livre de la Sagesse. Vous découvrirez sans nul doute des analogies avec la pensée maçonnique, la spiritualité pure c’est-à-dire universelle qui n’a pas de spécificité. Cette spiritualité une, qui n’a besoin d’adjectif. Faire usage de son intellect sans succomber à un syncrétisme réducteur, ni aux dogmes religieux.
À propos de la Sagesse : « Car elle sait et comprend tout ».
Salomon évoquant son estime pour la Sagesse : « J’ai invoqué, et l’esprit de la Sagesse m’est venu. Je l’ai préférée aux sceptres et aux trônes et j’ai tenu pour rien la richesse en comparaison d’elle. »(Sg 7- 7 à 14)
Plus loin il en fait l’éloge : « En elle est, un esprit intelligent, saint, unique, multiple, subtil, mobile, pénétrant, sans souillure, clair, impassible, ami du bien, prompt, irrésistible, bienfaisant ami des hommes, …(…) Car elle est un reflet de la lumière éternelle, …(…) elle renouvelle l’univers en passant en des âmes saintes, …(…) comparée à la lumière, elle l’emporte ; car celle-ci fait place à la nuit, mais contre la Sagesse le mal ne prévaut pas. » (Sg 7- 22 à 30).
« Elle s’étend avec force d’un bout du monde à l’autre et elle gouverne l’univers avec bonté. » (Sg 8- 1).
Salomon tombera amoureux si j’ose dire de la Sagesse, il en fera sa compagne, affirmant qu’elle est indispensable à tous les souverains.
Dans l’épisode de l’Exode Salomon dira encore à propos de la Sagesse : « C’est elle qui délivrera un peuple saint et une race irréprochable d’une nation d’oppresseurs. » (Sg 10- 15) Dans ce même passage Salomon dira : « Car la Sagesse ouvrit la bouche des muets et elle rendit langue aux tout-petits. » (Ibid 10- 21) pensait-il à Moïse que l’on disait bègue, juste capable d’épeler auquel la Sagesse aurait donné les mots Sacrés, c’est-à-dire la Force pour combattre et établir son peuple. Cette recherche de Sagesse, de Force, de Lumière n’est pas sans nous rappeler ce que demande le profane, qui deviendra postulant aux mystères de la Franc-maçonnerie. La Sagesse de Salomon est ici présentée comme une voie d’accès à la connaissance nécessaire au combat contre l’ignorance, l’idolâtrie, le fanatisme.
Le Livre de la Sagesse se conclu par un paragraphe sur la naissance d’une harmonie nouvelle ainsi la Sagesse rassemble ce qui est épars, elle favorise la concorde : « Ainsi les éléments étaient différemment accordés entre eux, comme, sur la harpe, les notes modifient la nature du rythme tout en conservant le même son… » (Sg 19- 18).
Regardons maintenant l’Ecclésiastique ce livre daté du IIème siècle av. J-C, attribué à Jésus Ben Sira en grec dit le Sicaride. Il était maître de Sagesse à Jérusalem, ce livre est la somme du meilleur de son enseignement. Ce livre traduit en Grec a la même visée que le Livre de Sagesse de Salomon, préserver les forces de la tradition hébraïque face globalement à la philosophie grecque. Par dégradation si j’ose dire ce texte est devenu une référence pour les juifs hassidim ces pieux du Judaïsme. On notera qu’il ne fait pas partie du canon hébreu et que l’église catholique le reconnaît dans ses deux éditions grecques. La Sagesse est ici associée à la crainte de Dieu. Néanmoins quelques extraits méritent une attention en évitant de succomber à cette crainte dogmatique.
Le bonheur du Sage : « Heureux l’homme qui médite sur la Sagesse et qui raisonne avec intelligence, qui réfléchit dans son cœur sur les voies de la Sagesse et qui s’applique à ses secrets. Il la poursuit comme le chasseur, il est aux aguets sur la piste ; il se penche à ses fenêtres et écoute à ses portes ; il se poste près de sa demeure et fixe un pieu dans ses murailles ; il dresse une tente à proximité et s’établit dans une retraite de bonheur ; il place ses enfants sous sa protection et sous ses rameaux il trouve un abri ; sous son ombre il est protégé de la chaleur et s’établit dans sa gloire. » (Si 14-20 à 27).
Je ne résiste pas chercheurs de lumière à vous encourager à la lecture de certains chapitres de ce livre, connaître pour faire votre jugement, non pas admettre cet enseignement, mais en retirer les meilleures valeurs. Je cite quelques titres des chapitres qui peuvent obtenir partiellement notre assentiment :l’humilité, l’orgueil, la charité envers les pauvres, la sagesse éducatrice, pudeur et respect humain, fermeté et possession de soi, contre l’orgueil, humilité et vérité, les gens dignes d’honneur, ne pas se fier aux apparences, réflexion sur la lenteur, la liberté humaine, silence et parole etc… Bien entendu tous ces textes sont dédiés à la Gloire de Dieu. On peut oser un comparatif avec le plus ancien des Statuts de la Franc-maçonnerie opérative, le célèbre catéchisme Régius ou manuscrit du libraire londonien Halliwell, qui fait partie des Old charges Anciens Devoirs. Ces textes font appel à la Foi et la Raison sans les opposer. Foi et Raison peuvent êtres les deux ailes d’un même oiseau qui permettent à l’être humain de s’élever au-dessus de sa condition, vers la rechercher de la Vérité ou pour le moins de pouvoir peut-être la contempler. Dans tous les cas Foi et Raison peuvent donner un sens, une direction à notre vie par l’affirmation, la volonté de vouloir pratiquer modestement un peu plus les vertus qui rendent l’homme plus digne, plus humain, plus conscient de sa responsabilité vis à vis de ses Frères.
Les Frères du Rite Français, ceux du moins qui pratiquent ce Rite à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers se référent pour leurs Grades de Sagesse au Livre de Sagesse de Jésus Ben Sira, livre évocateur de la Sagesse de Salomon. Mais aussi livre qui symbolise la justice, la dualité entre l’ombre et la Lumière, le Bien et le mal. Ce livre est posé ou pas sur l’autel des serments, mais dans tous les cas il est présent dans la mémoire des Frères. Salomon propage la Sagesse du Grand Architecte de l’Univers, vers les Frères constructeurs de leur propre vie. Ce Livre de la Sagesse de Salomon, traite dans son chapitre I de La Sagesse et la destinée humaine, le substrat de l’enseignement Des Élus Secrets premier grade des Ordres de Sagesse du Rite Français est contenu (semble-t-il) dans le chapitre IX du Livre de la Sagesse qui porte le titre de Prière pour obtenir la Sagesse. Ce chapitre rend gloire d’abord à Dieu, puis est suivi d’une supplique à devenir meilleur en construisant sa vie sur à l’image d’un édifice vertueux, qui ne peut être dressé sans l’aide du Grand Architecte car les pensées des mortels sont timides, et instables nos réflexions ; un corps corruptible, en effet appesantit l’âme, … (Sg IX-14, 15).
Ce chapitre IX n’est en définitive que le développement de la parole de Salomon, il commence ainsi : « Dieu des Pères et Seigneur de miséricorde, toi qui, par ta parole, as fait l’univers, toi qui par ta Sagesse as formé l’homme pour dominer les créatures que tu as faites, pour régir le monde en sainteté et justice et exercer le jugement en droiture d’âme, donne-moi celle qui partage ton trône, la Sagesse…(…) Quelqu’un, en effet, serait-il parfait parmi les fils des hommes, s’il lui manque la Sagesse qui vient de toi, on le comptera pour rien. (Sg IX- de1 à 4 et 6). L’épilogue du Chapitre IX rend Gloire à la Sagesse vertu royale : « Ainsi ont été rendus droits les sentiers de ceux qui sont sur la terre ainsi les hommes ont été instruits ce qui t’est agréable et, par la Sagesse, ont été sauvés. » (Sg IX- 18).
La Sagesse mène à l’amour de soi et des autres, la plus haute vertu théologale les Frères des Ordres de Sagesse du Rite Français ont fait de l’amour la vertu culminante de leur dernier et ultime grade, celui de Chevalier Rose-Croix qui met en exécration la haine des autres et sublime la Rose de l’amour.
Jean-François Guerry.