Hier, Aujourd’hui, Demain…
Et puis…tout simplement l’enfant se tint debout,
L’oiseau quitta son nid du duvet plein les yeux,
Le monde les attendait ni tendre ni soyeux,
Insensé, dangereux, mais ça valait le coup !
Ils allaient s’élancer pour prendre leur envol,
Lui se tenant debout, sans repère ni boussole,
Et l’autre au bord du gouffre hésitant et pataud
Piaillait, voletait, mais il était trop tôt…
Une mère secourable s’empara du pierrot,
Tandis que sur la cime d’un bouleau centenaire,
La mésange couvait l’oisillon téméraire,
En retenant l’instant qu’elle redoutait trop.
Et pourtant…ils s’en vont, quittant le nid douillet
S’éloignent pour devenir, perpétuant le rite,
Ils gravissent leurs sentes au rythme du maillet
Pour mieux ressembler à l’histoire décrite.
Que sont nos ambitions aujourd’hui devenues ?
Au faîte de l’existence, il y a des regrets
Pour nos renoncements, nos mines parvenues
Tout ce temps gaspillé sur l’autel du progrès.
Alors…
Quand le miroir renvoie des chagrins et des rides
On songe au crépuscule et ses plaines arides,
On voudrait retenir d’anciennes pulsations
Qui chaviraient nos âmes et nos chères passions.
Le temps a fait son œuvre, insidieusement
Le passé nous assène, sous le balancement
Du tic-tac infernal de l’horloge automnale,
Des vérités absconses sous des atours bien pâles.
Pourtant…
Il faut se souvenir de nos premiers combats,
De nos désirs d’antan, des fiévreux débats
Qui nous laissaient vivants exaltés et heureux,
Sous le regard sceptique des morts et des peureux.
Se souvenir du temps de notre séduction
Des amours de passage drainant tant d’émotion…
Exhumer les idées que l’on avait enfouies,
Les serments oubliés qui nous donnaient envie.
Car aujourd’hui aussi nous trace un avenir.
Alors que nous croyions avoir céder la place,
A scruter l’horizon, nous découvrons, fugace,
Une raison d’aimer et des plans à finir.
Projeter par-delà nos somptueux échecs,
De nouvelles envies, de splendides désirs
Pour notre âme d’enfant qui est cet élixir
Qui ravive la flamme d’un bonheur intrinsèque.
Elle affleure sous la peau et puis gomme nos rides,
Il faut oser tomber le masque et puis l’égo
Et tout redeviendra plus simple et plus limpide
Dans le miroir magique qui nous rend tous égaux.
Plus tard quand viendra l’heure de faire le bilan
Au seuil du grand voyage, que l’on dit sans retour,
Il faudra discerner sur nos passés navrants,
les graines qui ont germé sur un terreau d’amour.
Nous pouvons retrouver cette innocente image
D’un possible bonheur, et s’il n’est pas trop tard,
Acquitter notre dîme pour devenir un sage,
Pour que nos lendemains ne soient plus des hasards.
Car nous sommes à la fois la lumière et le fou
Qui déchiffrent parfois du symbole l’atout.
Au tréfonds de nos cœurs où siège le repentir
Nous Pouvons retrouver l’originel arôme,
La saveur des saveurs qui fait ce que nous sommes,
De solides maçons, bâtisseurs d’avenir.
L’enfant sommeille en nous, il est omniprésent
Veillant dans la pénombre de nos cœurs fatigués
Comme en un sanctuaire fragile et apaisant
Où l’âme se régénère, où la raison du cœur,
Modère nos passions pour construire du bonheur.
Alors enfin tournés vers de verts pâturages
Nous oublierons le dogme des rides et des chagrins,
Nous chérirons encore des projets, des mirages,
Par des chemins radieux, nous sèmerons des grains.
Voilà ce que demain, résolu, je veux vivre,
Voilà mon test’amour pour bannir le hasard,
Glorifier la vie qui nous met en retard,
Et boire à ma jeunesse jusqu‘à m’en rendre ivre…
Philippe Jouvert.
"Hier aujourd'huidemain thème 2019 du concours de poésie de Villennes sur seine
Avec l'aimable autorisation de l'auteur.