DE LA VANITÉ À L’HUMILITÉ
« L’esprit de ce souverain juge du monde n’est pas si indépendant, qu’il ne soit sujet à être troublé par le premier tintamarre qui se fait autour de lui. » Blaise Pascal-Pensées.
Au commencement des mondes, du monde, il n’y avait pas l’homme, peut-être même pas l’idée de l’homme, il y avait le vide. Puis vinrent le ciel et la terre, et le souffle sur la surface des eaux. La nuit puis le jour, et toutes le bêtes. C’est seulement le cinquième jour, le jour du nombre de l’homme, que celui-ci apparu.
Avec dans ses bagages si j’ose dire, les grandes et les petites vertus ainsi que tous ses vices quel potentiel !
Dès le début l’homme fut-il bon ou mauvais, cela se discute, peut-être les deux. Comme il était seul, ne pouvant encore se comparer, il examina la nature et les bêtes et conclu rapidement à sa supériorité, sur tout ce qui l’entourait.
Ainsi commença l’opposition entre la vanité et l’humilité. Si comparer, c’est rechercher des ressemblances, c’est aussi affronter. Comparer les différences mène à créer une échelle de valeurs, l’homme cherche donc tout de suite à dominer la nature.
Il devient démiurge d’un panthéon, il sera tout, il sera Éole le dieu du vent, Poséidon le dieu de la mer, Gaïa le dieu de la terre, Héphaïstos le dieu du feu, et pourquoi pas tant qu’à faire Zeus le dieu des dieux, mon Dieu, quel orgueil, quelle vanité !
C’est là que l’homme entre dans la brume matinale, celle du début, des apparences, ses yeux, sont voilés, il est dans l’hebel hébreu dans la Vanité des Vanités, celle de l’Ecclésiaste. Il devient sa propre idole, un véritable Golem de matière.
Il aura dès lors un long chemin à parcourir pour passer la porte, pour aller de la vanité à l’humilité, un véritable parcours initiatique, un labyrinthe parsemé d’embûches.
L’humilité est une vertu très humble, comparer aux grandes vertus théologales, c’est la vertu de l’homme qui sait n’être pas Dieu, elle est petite fille de l’Amour et de la Vérité. Mais elle aussi besoin de la force, du courage et de la sagesse.
La vanité quant à elle mène au néant, à rien, alors que l’humilité mène à l’amour, à l’amour de l’autre. Aimer son prochain comme soi-même, et soi-même comme un prochain :
« Là où est l’humilité, disait Saint-Augustin, là aussi est la charité. »
Je reviens à la genèse, et à notre père Adam, la légende du 28ème degré du Rite Écossais Ancien et Accepté se déroule dans l’Éden, dans ce degré hermétique, alchimique, nous demande de travailler sur 7 réflexions : sur le principe de la vie humaine, sur l’harmonie universelle, sur l’esprit infini, sur les manifestations, sur notre condition, sur la nature et ses mystères. L’immensité du domaine de ces réflexions, fait appel à notre humilité.
Marc Halévy, physicien de la complexité et philosophe de la spiritualité voit dans ce degré maçonnique, de Chevalier du Soleil, l’enseignement de ce qu’il appelle « la naturalité », c’est-à-dire la cohérence avec le réel. Il pense que tous nos maux viennent de notre vanité et donc de notre manque d’humilité, qui serait notre erreur fondamentale, nous nous croyons supérieur à la nature. Il écrit à ce sujet :
« Toute l’immense crise écologique (largement irréversible) que nous connaissons aujourd’hui prend racine dans cette idée absurde que l’homme ‘est à part’, qu’il n’est pas partie intégrante et prenante de la nature, mais qu’il en est au mieux un visiteur, au pire un envahisseur.(…) »
« Il faut être fou de vanité pour se croire supérieur à tout ce qui existe, pour croire que l’homme est le centre le sommet et le but de tout ce qui existe, pour imaginer que tout ce qui existe est à sa disposition, fait pour lui, offert à toutes ses concupiscences et à tous ses caprices. (…) Parfois je me dis que là se place la vraie mission de l’initiation. »
Pour conclure : Avec Pascal et ses Pensées, et leur acuité en ces temps difficiles.
96- « La puissance des mouches ; elles gagnent des batailles, empêchent notre âme d’agir, mangent notre corps. »
Ce ne sont pas des mouches que nous combattons aujourd’hui, mais un sale et infiniment petit virus. Dans cette période sinistre, il y a aussi lieu d’espérer, pour peu que nous ne perdions pas la mémoire.
Pour finir enfin peut-être, avec notre arrogance, il y a la mémoire, la peur, qui précède l’angoisse, et voici encore Pascal :
97- « La mémoire est nécessaire pour toutes les opérations de la raison. »
Il nous faut avec humilité savoir écrire dans notre esprit, et renoncer à notre vaniteuse arrogance.
100- « En écrivant ma pensée, elle m’échappe quelquefois : mais cela me fait souvenir de ma faiblesse. »
Jean-François Guerry.
Mes Sources :
La Bible de Jérusalem.
Le Petit Traité des Grandes Vertus – Alain Comte Sponville.
Rituels Maçonniques.
Les 33 Marches Maçonniques de Marc Halévy.
Les Pensées de Blaise Pascal.