C’est encore une de ces curieuses (et nombreuses) torsions du langage qui nous donne l’impression fugace que nous croulons sous les questions et les questionneurs. Passons rapidement sur les innombrables jeux qui attisent la sagacité des téléspectateurs, des auditeurs et des lecteurs. Rien que pour ces jeux, combien de questions consommons-nous par jour dans le monde ? Passons tout aussi rapidement sur les examens, les concours, les entretiens d’embauche, les premiers rendez-vous amoureux, les notices de programmes informatiques, les unes des magazines et autres foyers d’interrogations brûlantes. Sans oublier les sacro-saints sondages, bien entendu. Détournons pudiquement le regard de ces problèmes si délicats à régler qu’ils sont prudemment rebaptisés « question » (je laisse à chacun le choix du sujet…) et ne nous attardons pas non plus sur les errements de l’histoire et de la religion qui firent de « la question » un épisode terrifiant des capacités sadiques de la nature humaine.
Or toutes ces questions ne sont que des paravents et ce que nous cherchons en fait ce sont des réponses. Ah ! La bonne réponse que voilà ! Gagné !
Mais surtout ne nous faisons aucune illusion, les réponses que nous espérons sont toujours définitives, sans appel, propres comme un sans faute. Elles doivent être conformes à ce que nous savons déjà y compris jusque dans leurs délires les plus fous. Or la maïeutique nous enseigne peu de chose si ce n’est l’essentiel : la réponse à une question n’est intéressante que si elle mène à une autre question.
Il y a quelques décennies déjà, Ernst Cassirer nous mettait en garde contre ces réponses qu’il assimilait au mythe, fermé par nature ; alors que la question, elle, se rapporte au symbole, nécessairement ouvert. Et si les réponses sont souvent contradictoires, jamais deux questions ne s’opposent. Les réponses sont certes utiles car elles nous rassurent, mais seules les questions, les incertitudes, les manques nous contraignent au déséquilibre, lequel est le fondement même de la marche.
Socrate, Socrate, Socrate, pourquoi veulent-ils tous des réponses ? Les questions ne sont-elles pas plus intéressantes ? La question est ouverte.
Théodore Neville. ( Dictionnaire Inutile.)
Ma Réflexion :
Pourquoi souvent poser des questions, dont nous pensons connaître la réponse, peut-être pour faire briller, notre Ego, faire l’animal savant, cela ressemble à un dressage. C’est donner une importance à la mémoire qu’elle ne doit pas avoir. On manque cruellement d’idées neuves, pour ma part j’aime beaucoup les questions dont je n’ai pas la réponse ou une réponse partielle, voire erronée. Cela confirme les limites de mon humanité, ravive mon besoin de connaissance, conforte ma recherche de Lumière, m’oblige à rectifier à me souvenir que seul je ne puis rien. Toutes ces questions forgent mon humilité, c’est comme regarder les étoiles d’un ciel d’été, se surprendre et se questionner.
Merci à Théodore pour cette remise en question.
JFG