Comme des oiseaux sans ailes, terrassés sur la terre, incapables de reprendre notre envol, asservis à la brutalité des sciences, entre les mains de quelques uns ils ont pris le pouvoir sur notre vie en société et envisagent de leur prendre sur nos cerveaux, ils fabriquent un imaginaire collectif dans des laboratoires dédiés à l’impérialisme de la raison. Ces big data sont pareils aux marins cruels de Baudelaire qui veulent couper les ailes de l’albatros, le poète ne doit pas parler, où est passé le petit prince de notre enfance.
Un voile noir tombe, c’est une évidence nous n’avons pas besoin de poètes mais seulement de casque de réalité virtuelle, de smartphones connectés. Nous sommes pris au piège de l’abondance de la matérialité. Les poètes indolents, insolents, adeptes du silence et de la lenteur sont eux déconnectés, besoin de mises à jour me dit ma petite fille en souriant.
« Le poète est semblable au prince des nuées,
qui hante la tempête et se rit de l’archer ;
exilé sur le sol au milieu des huées,
ses ailes de géant l’empêchent de marcher. »
Le Franc-Maçon du XXIème siècle est-il un mystique dans un monde sacré, un monde imaginaire, un des derniers mohicans de la spiritualité occidentale, accroché, aux mains de ses Frères qui sont passés à l’orient éternel.
Les promoteurs de l’intelligence artificielle et du trans humanisme nous considèrent sans doute comme les derniers cerbères d’un monde obscur. Alors que notre but est bien le renversement de la conscience, pour la croissance de notre vie intérieure, notre ambition n’est pas l’Hadès matérialiste, mais la Jérusalem céleste.
Le Franc-Maçon est dans le monde, il ne rejette pas la modernité, mais il sait aussi : « Que c’est avec les lumières du passé que l’on se dirige dans l’obscurité de l’avenir. »
Il sait que l’abondance, la quantité n’est pas toujours la qualité, que la profusion des informations, ne sont pas des connaissances et que même ces savoirs empilés, ne sont pas la Connaisance.
Que la virtualité, n’est pas la réalité même si elle est augmentée ; que c’est par lui-même qu’il doit avancer, construire sa vie, pour aller plus loin, plus haut.
Et que c’est son imagination, son intuition, son désir d’un monde meilleur, qui gonfle son cœur d’amour fraternel, il n’y a pas d’application dans Apple Store ou dans Google Play pour cela. Il n’y a que sa propre volonté d’homme libre et de bonnes mœurs, aidé par les outils symboliques mis entre ses mains par ses Frères, et les mots sacrés, les mots de passages transmis par le souffle, le verbe, depuis 300 ans ou 380 ans. C’est cette tradition initiatique, magique renouvelée qui revit à chaque déploiement, à chaque tracé du tableau de loge, sous le fil à plomb et la voûte étoilée. Alors soudain dans le silence on entend le bruissement des ailes tous les Frères qui sont autant d’Albatros qui prennent leur envol.
JF.
A lire :
Les Entretiens de Groix de Jean Trêve Collection Extenebris Lvx chez Agapae 65, Boulevard Bineau 92200 Neuilly.
Prix 22 € ISSN 2418-3709. Contact avec l’auteur : jean.treve@orange.fr
Franc-Maçonnerie : temps, mémoire, symboles chronique surréaliste et franc-maçonne Préface de Jean-Pierre Lassale. De Charles Bernard Jameux Collection Pierre Vivante chez Dervy. Prix 14 € ISBN 979-10-242-0199-3
Note Editeur Charles Bernard Jameux
Connu pour ses travaux sur l’origine de la franc-maçonnerie spéculative dans l’ancien « art de la mémoire », Charles B. Jameux revient tout d’abord sur les étapes de sa recherche : une jeunesse troublée par une généalogie familiale délibérément opaque, une adolescence marquée par l’adhésion au mouvement surréaliste d’André Breton, une découverte à 34 ans de la franc-maçonnerie. Cette dernière apportera bientôt à l’auteur, dont l’interrogation majeure est la relation de l’homme au temps, une réponse éclairante : la voie du franc-maçon, désormais orientée vers la mise en oeuvre du vrai, du bien et du beau, repose principalement sur la dimension d’universel et d’intemporel en germe dans chaque individu.
Mais cette quête, pour ne pas rester lettre morte, dépend du recours à la méthode propre à la franc-maçonnerie, le symbolisme. Cet examen conduit donc Charles B. Jameux à retracer l’histoire de l’apparition des symboles maçonniques. Écartant clairement toute fi liation historique directe depuis l’Antiquité, l’auteur rattache le symbolisme maçonnique à l’ésotérisme traditionnel, mais en le distinguant bien, preuves datées à l’appui, de la première apparition documentée connue d’un symbole purement spéculatif, le temple de Salomon.
Celui-ci apparaît en 1637 en Écosse, mentionné dans le « Mot du maçon », dans le milieu calviniste presbytérien. Le mystère des origines culturelles et historiques de la maçonnerie moderne se dissipe ainsi peu à peu.