Est-ce le centre de cette cité mythique, solaire, souterraine, de cette Jérusalem céleste improbable, inatteignable, ou de cette cité que l’on découvre tout simplement en poussant la porte de son cœur, en s’ouvrant à l’autre.
Cette Agartha qui est nulle part et partout, sous nos pieds ou au-dessus de nos têtes. Cette cité ouverte à tous ceux qui veulent connaître un autre monde que celui dirigé par le matérialisme et l’égoïsme.
Le franc-maçon s’efforce chaque jour de construire ce temple de l’esprit, centre du monde, il vise à réaliser un paradis sur terre, avec certes une forte dose de naïveté, et c’est nécessaire !
Dans ce temple de l’esprit saint, il travaille à réunir les esprits sains, chaque pierre il est allé la chercher dans la carrière du jour présent, cette carrière où s’accumulent les strates des traditions, où chacun a naturellement sa place, où chacun est naturellement respecté. Mais aussi où chacun s’engage à respecter et à aimer l’autre.
Ce temple de l’esprit, émane d’un plan divin, d’un plan du grand architecte, d’un ordre après le chaos. Cet ordre doit être protégé, défendu par les chevaliers de l’esprit, les plus pauvres de tous.
Ce temple de l’esprit est édifié au centre de la terre nourricière féminine, fille de l’univers, que le franc-maçon se fait un devoir de protéger, pour pouvoir accueillir tous ses frères en humanité. S’ils sont libres et bonnes mœurs.
Sommes-nous dignes de ce temple de l’esprit ? Je soumets à votre réflexion les premières lignes de l’Archipel du Chien ce roman de Philippe Claudel :
Vous convoitez l’or et répandez la cendre.
Vous souillez la beauté, flétrissez l’innocence.
Partout vous laissez s’écouler de grands torrents de boue. La haine est votre nourriture, l’indifférence votre boussole. Vous êtes créatures du sommeil, endormies toujours, même quand vous vous pensez éveillés. Vous êtes les fruits d’une époque assoupie. Vos émois sont éphémères, papillons vite éclos, aussitôt calcinés par la lumière des jours. Vos mains pétrissent votre vie dans une glaise aride et fade. Vous êtes dévorés par votre solitude. Votre égoïsme vous engraisse. Vous tournez le dos à vos frères et vous perdez votre âme. Votre nature se fermente d’oubli.
Comment les siècles futurs jugeront-ils votre temps ?
La franc-maçonnerie ne propose pas de recettes miracles, simplement un éveil de l’esprit, vers le bon, le bien, le beau, pour que les hommes vivent ensemble un beau roman d’amour sur terre, et, pour leur terre.
JF.
POUR ALLER PLUS LOIN, PLUS HAUT !
Lire : Le Roi du Monde de René GUÉNON.
L’Archipel du Chien de Philippe CLAUDEL Chez Stock. ISBN 9 782234 085954
EXTRAIT ÉDITEUR :
« Le dimanche qui suivit, différents signes annoncèrent que quelque chose allait se produire.
Ce fut déjà et cela dès l’aube une chaleur oppressante, sans brise aucune. L’air semblait s’être solidifié autour de l’île, dans une transparence compacte et gélatineuse qui déformait ça et là l’horizon quand il ne l’effaçait pas : l’île flottait au milieu de nulle part. Le Brau luisait de reflets de meringue. Les laves noires à nu en haut des vignes et des vergers frémissaient comme si soudain elles redevenaient liquides. Les maisons très vite se trouvèrent gorgées d’une haleine éreintante qui épuisa les corps comme les esprits.
On ne pouvait y jouir d’aucune fraîcheur.
Puis il y eut une odeur, presque imperceptible au début, à propos de laquelle on aurait pu se dire qu’on l’avait rêvée, ou qu’elle émanait des êtres, de leur peau, de leur bouche, de leurs vêtements ou de leurs intérieurs. Mais d’heure en heure l’odeur s’affirma. Elle s’installa d’une façon discrète, pour tout dire clandestine. »