MORT SYMBOLIQUE, MORT INITIATIQUE
Notre société moderne refuse la mort, elle cherche par tous les moyens à prolonger la vie. Elle ne veut pas voir « la mort en face. »Il suffit d’observer la manière dont s’organise le repos des corps, nous avons adopté la crémation, non pas par tradition comme en Orient, mais pour éviter la construction des sépultures qui rappelle à notre mémoire la présence de nos défunts. On ne veut plus être confronté à la mort, à nos morts, sans doute que les pierres tombales incarnent la mort, qui nous angoisse.

Pour les francs-maçons la mort est un thème central de l’initiation, on le trouve dès le cabinet de réflexion, puis dans la légende de la construction du temple de Salomon avec le meurtre de l’architecte Hiram Abif et plus tard dans les degrés qui vont au-delà du grade de Maître.
Si selon la formule connue de Montaigne : « Philosopher c’est apprendre à mourir. » S’initier c’est apprendre la vie de la mort. Mourir symboliquement c’est apprendre à vivre véritablement, c’est pourquoi l’initiation maçonnique propose un apprentissage de la mort et augmente ainsi la valeur de la vie.
Jean-Claude Sitbon dans son livre Hiram consacre un important chapitre au thème de la mort, en parcourant les divers rites maçonniques et en particulier les rituels de Maître Maçon.
Ainsi au Rite Écossais Rectifié l’on demande au futur Maître Maçon de lire cette formule : « Pensez-donc à la mort ! »

Il ne faut donc pas fuir la mort, il ne faut pas la craindre, elle pose le problème du sens de la vie, elle est indispensable à la vie : « Si le grain ne meurt…. »Penser à la mort libère, de la souffrance physique, pour les malades, pour avoir accompagné mon beau-frère médecin jusqu’à la dernière porte, je peux témoigner qu’il a beaucoup pensé à la mort, qu’il l’a abordé avec lucidité et courage en réconfortant ses proches, il ne vivait plus dans l’angoisse, mais dans l’attente d’une libération.
Avec la mort symbolique, l’initiation maçonnique propose une métamorphose de l’individu, elle associe la mort à la renaissance.

Jean-Claude Sitbon nous rappelle cette formule du poète Allemand Angelus Silesius :
« Je ne crois en nulle mort ;
Je meurs à toute heure
Et chaque fois je n’ai trouvé qu’une vie meilleure. »
Elle pourrait être associée à une phrase du rituel du grade de maître du Rite Écossais Ancien et Accepté : « le Maître a réapparu plus radieux que jamais. »
Chaque mort symbolique permet donc d’élever sa conscience, de se métamorphoser de passer d’un état à un autre, la mort renouvelle la vie.
En cette période de célébration de la mort, de nos morts, nous devons essayer de ne pas être dans la tristesse, mais garder le meilleur d’eux-mêmes en nos mémoires, comme nous le faisons régulièrement dans nos loges, en pensant à nos sœurs, à nos frères qui ont rejoint l’Orient éternel, mais qui sont encore présents dans notre chaîne d’union et éclairent nos travaux, rien ne meurt en effet tout se transforme.
Je cite comme Jean-Claude Sitbon notre frère Roland Gillard : « Nos cœurs ne doivent pas être le tombeau de nos frères. »Quand la chair quitte les os, la substantifique moelle de l’esprit s’élève.
JF.
Celui qui s’est choisi le centre pour demeure embrasse d’un seul regard toute circonférence.
Angelus Silesius Livre II, 24 Extrait du Pèlerin Chérubinique.
A LIRE : HIRAM Exégèses bibliques et maçonniques du mythes fondateur de la Franc-Maçonnerie de Jean-Claude Sitbon Éditions de la Tarente.
Chapitre : Le thème de la Mort dans la tradition maçonnique de la Page 179 à la page 228.