SUR LA COLLINE D’ARÈS.
Le soleil allait bientôt se lever sur la colline d’Arès, elle faisait face à celle de Pnyx et dominait l’Agora d’Athènes, où le tumulte allait bientôt chassé le silence de la nuit, sur cet énorme monolithe de marbre suivant la coutume ancestrale, le collège des pontifes s’était réuni la nuit entière sous la présidence du Grand Pontife, pour rendre la justice dans le calme.
Dans ce collège pas de joutes oratoires enflammées, chaque mot étant pesé, comme d’habitude c’est dans une grande sérénité, que furent écoutés les plaignants et les accusés.
Les plaignants réclamant vengeance sur la pierre de l’Anésie, et les accusés criant leur orgueil bafoué sur la pierre de l’Hybris. Chacun martelant ses propos dans le désordre de leur esprit. L’aéropage siégeant pour remettre de l’ordre dans le chaos et faire régner la justice. Face à la vengeance inflexible et l’orgueil qui pousse au crime.
Le Grand Pontife (Pontifex Maximus) souverain du collège, fit son apparition, peu avant que la lumière du soleil n’envahisse toute la terre. Il allait faire une fois de plus le pont, le lien entre la terre et le ciel, il incarnait ce pont spirituel, cette alliance entre la Jérusalem terrestre et la Jérusalem céleste, cette ville-temple où toutes les vies sont sacralisées. Chevalier de l’esprit le Grand Pontife est le pont entre la profanité et la sacralité, chargé de faire régner la justice, mais aussi de purifier le profane, pour réinstaller le sacré partout, rebâtir une ville de Lumière.
Il n’est pas surprenant que les francs-maçons chercheurs de la Lumière aient fait référence au Grand Pontife dans leurs rituels, au Rite Écossais Ancien et Accepté il siège si j’ose dire au 19ème degré, donc au premier degré de l’Aéropage, il fait le lien avec le Chapitre, il fait pont entre le terrestre et céleste. Ce qui à mon sens est une anomalie, il aurait pu être jumelé avec le 17ème degré, degré du dévoilement de la Jérusalem céleste, de la Gnose.
Le pape chef des catholiques porte le nom de souverain pontife, pourtant ce titre pour les francs-maçons n’est pas religieux au sens commun. Il est plutôt un degré de religiosité, dans le sens de « reliance » ou de religare en latin, c’est-à-dire de lien entre.
Fortement imprégné par l’Apocalypse de Jean, il symbolise l’arbre de vie, racines en terre et feuillage dans l’air vers le ciel. Il symbolise donc l’Alpha et l’Oméga, en liaison avec le symbole du pont et Emmanuel, dieu est en nous.
Ce degré, est le degré de la vie de l’esprit découvert, par le dessillement, le dévoilement, la révélation. Il n’y a pas de mysticité mais plutôt une prise de conscience que l’homme est un pont, qu’il est dans le monde intermédiaire entre terre et ciel par la force de son esprit. Il est capable de concilier les contraires entre chair et esprit, de faire balance, harmonie juste équilibre.
C’est cela « Pontifier », et non pas faire preuve de vanité, de même qu’humilité n’est pas humiliation. Pontifier donc c’est faire du sacré, relier, en jetant les apparences pour voir le réel. On peut y voir une explication du : « ni nu, ni vêtu » ou encore du fil à plomb et des échelles symboliques, où l’esprit monte et descend en permanence. Ces symboles axiaux ou de passages, comme le Serpent Vert de Goethe qui se transforme en pont, ou encore les colonnes du temple qui ont les bases profondément enfoncées dans le sol pour recueillir les énergies telluriques et montent le plus haut possible pour recevoir les énergies célestes.
C’est encore ce magnifique arc dans le ciel qui étonne à chaque les jours de pluie, dont il est dit dans la Genèse IX -12-17 :
12- « Et Dieu dit : Voici le signe de l’alliance que j’institue entre moi et vos et tous les êtres vivants qui sont avec vous, pour les générations à venir. Je mets mon arc dans la nuée et il deviendra un signe d’alliance entre moi et la terre. »
17- « Dieu dit à Noé : « Tel est le signe de l’alliance que j’établis entre moi et toute chair qui est sur terre. »
C’est ainsi que sans orgueil, le maçon du 19ème degré peut affirmer : « Je suis Grand Pontife », « Je suis un pont. »
Jean-François Guerry.