Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
la Franc Maçonnerie au Coeur

la Franc Maçonnerie au Coeur

Un blog d'information, de conversations sur le thème de la Franc Maçonnerie, des textes en rapport avec la Franc Maçonnerie, comptes rendus et conseils de lectures.

Publié le
MIROIR, MON BEAU MIROIR, DIS-MOI..

MIROIR, MON BEAU MIROIR, DIS-MOI…

 

 

Le conte de Jacob Grimm, « Blanche Neige et les Sept Nains », repris par Walt Disney, est un rêve pour enfants et adultes. La scène du miroir rappelle, celle du jeune initié, postulant à la connaissance des mystères. Il y a un paradoxe apparent dans les travaux de loge, il n’est pas souvent question de la symbolique du miroir, en même temps elle est présente dans tous les travaux, pratiquement quel que soit le degré initiatique du franc-maçon.

Le verbe mirer du latin mirari s’étonner, admirer, a parfois pris le sens de regarder attentivement. Les plus anciens miroirs étaient en cristal de roche, des pierres extrêmement polies. Le miroir prit au Moyen-Âge, avec l’amélioration des techniques de fabrication une signification différente. On peut lire dictionnaire historique de la langue française je cite : « Ce qui offre l’image des choses et des gens, représentation idéale de.. » à l’instar du latin Speculum, qui provient du verbe spéculer qui est l’action d’observer le ciel et les mouvements des étoiles. Cela nous rappelle le « gnoti seauton » du temple d’Apollon à Delphes, le connais-toi, toi-même.

Puisque l’on est dans le Miracle Grec, dans la ‘République’ Platon divise le corps en trois parties la tête, le tronc et le bas du corps, à chaque partie il attribue une qualité de l’âme, le bas du corps le ventre est le siège des désirs, le tronc avec le cœur le siège de la volonté, et la tête le siège de la raison. Dominer les passions attribuées aux parties du corps permet un accès à la sagesse et la connaissance.

 

L’image, le symbole nous ramène à la cérémonie d’initiation et à notre miroir, je n’irais pas plus loin cela doit être vécu. Le postulant à la sortie de sa caverne, sera confronté au miroir, à son image. Plotin dans les Énéades : «  L’image d’un être est disposée à recevoir l’influence de son modèle. »

À ce stade le jeune initié a demandé à recevoir la lumière, mais il ne perçoit pas encore comment y parvenir. Il a encore les yeux voilés par le bandeau  de l’ignorance. Attãr a dit : « Le corps est dans son l’obscurité comme le dos du miroir ; l’âme est le côté clair du miroir. » C’est bien vers à la recherche de la spiritualité qu’aspire le jeune initié. Il est encore comme dans un rêve, il se laisse guider, il suffit de regarder dans ses yeux son étonnement, il est dans le mirari évoqué ci-avant. Le miroir pour Gérard de Nerval est l’épanchement du songe. L’initié va devoir imaginer, ce qu’il y a derrière le miroir. Imaginer ce pays des Merveilles, d’Alice de Lewis Caroll.

 

En travaillant sur les trois niveaux de son être décrit dans la ‘République’ de Platon, il apprendra à se connaître lui-même, le miroir est un moyen  d’accès à cette connaissance, c’est ce que propose Saint-Paul dans sa 2ème Épitre aux Corinthiens (De Troas en Macédoine. Digression : le ministère apostolique) 2co 3,17-18 :

 

« Le Seigneur c’est l’esprit ; et où est l’esprit du Seigneur, là est la liberté. Et nous tous qui, le visage dévoilé, nous sommes transformés en cette même image, de gloire en gloire, comme de par le Seigneur, qui est esprit. »

 

 Le miroir dans lequel nous nous voyons est donc un symbole, une image de nous-mêmes. Le chemin initiatique est la voie d’accès pour regarder derrière le miroir, la réalité de nous-mêmes. Ayant pris conscience de notre soi véritable, nous pouvons entreprendre la métamorphose spirituelle, faire notre quête. Être à l’image de, n’est pas être identique à, comme le fils ressemble à son père sans être identique à lui, il vient de la même source, mais n’est qu’un affluent dans la rivière. Le miroir rétablit, ‘verticalise’, notre être. C’est la légende du « miroir des fiancés » qui se rencontrent au paradis, leurs visages étant redressés, l’œil droit à droite et non inversé comme en ce monde. Miroir magique aux multiples formes, le triangulaire symbole de la fécondité, le trapézoïdal symbolise l’entente parfaite, le rectangulaire le nombre des années passées ensemble, l’ovale le bonheur.

 

Ce miroir qui donne une image inversée des sujets rappelle le double triangle inversé du sceau de Salomon, de l’étoile à six branches.

Le miroir est un symbole fort, il fait appel à notre imaginaire, on y voit les rêves, se transformer en réalité, il a beaucoup inspiré les poètes, comme moyen de vision de l’âme. Ainsi Baudelaire dans l’Homme et la Mer :

 

«  Homme libre, toujours tu chériras la mer !

La mer est ton miroir, tu contemples ton âme

dans le déroulement infini de sa lame.

 

Et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image

Tu l’embrasses des yeux et des bras… »

 

L’on ressent là, le processus de réintégration en marche, c’est le commencement de l’initiation par la connaissance de son soi, un avant-goût de la conquête de l’âme, de la conscience de son immensité et de sa nécessité. La question de Narcisse au miroir qui es-tu ? Et sa réponse : Je suis toi-même ! Devient soudain claire.

 

Le miroir est donc l’outil symbolique du rêve, de l’imagination féconde. En observant l’on se rend compte que c’est le premier symbole des grands mystères que voit l’initié, prémisse de l’étoile flamboyante, l’initié le découvre quand il entre dans la chaîne de l’or initiatique. C’est le symbole, l’image du rêve, mais aussi de la connaissance.

 

Le poète surréaliste André Breton dans un hommage à Saint-Pol Roux en 1935, à propos de l’image écrit :

 

«  Il m’apparaît de plus en plus que l’élément générateur par excellence de ce monde qu’à la place de l’ancien nous entendons faire nôtre, n’est autre chose que ce que les poètes appellent ‘l’image’.

 

La vanité des idées ne saurait échapper à l’examen même rapide. Les modes d’expressions littéraires les mieux choisis, toujours plus ou moins conventionnels imposent à l’esprit une discipline à laquelle je suis convaincu qu’il se prête mal. Seule l’image, en ce qu’elle a d’imprévu et de soudain, me donne la mesure de la libération possible et cette libération est si complète qu’elle m’effraie. C’est par la force des images que par la suite des temps pourraient bien s’accomplir les vraies révolutions. »

 

Le miroir dans le processus initiatique, provoque ce que je qualifierais d’un choc initiatique, ayant un effet de levier sur la conscience, dans le fil du cabinet de réflexion. Il suffit d’observer le jeune initié, pour voir l’effet produit.

 

Le miroir révèle l’âme, la spiritualité endormie, il redresse notre regard, nous voyons plus loin, plus profondément en nous-mêmes et plus haut. Si sur le plan horizontal il existe une correspondance entre l’homme et la nature, sur le plan vertical, il y a une analogie entre les réalités spirituelles et la nature, le miroir est un des outils de sa révélation, une clé cachée, a porté de notre main, combien de fois passons-nous devant un miroir sans le regarder, c’est comme refuser de voir notre âme, d’entrer en contact avec elle.

 

Dans le Don Quichotte de Miguel Cervantès, il est intéressant de lire le passage concernant le combat avec le chevalier au miroir, qui face à son propre visage prend conscience de sa réalité. De l’homme véritable qu’il est, sa quête permet la réalisation, la réconciliation, avec son être intérieur et l’unification de son être dans sa totalité.

Quand nous serons vraiment face à face avec nous-mêmes, nous aurons atteint, je pense un état d’harmonie, sans doute au seuil de l’Orient éternel. En attendant l’on peut essayer de regarder de temps en temps dans cette lucarne, ouverte sur le ciel et l’infini.

 

Je conclu avec deux distiques du Cantique des Oiseaux de Farîd od-dîn ‘Attâr.

 

« Ce sont tes yeux, hélas, qui sont toujours fermés.     

           Entre dans le désir et alors tu verras

   Que la porte jamais n’est fermée devant toi !"

 

 

« Et par cette lucarne, d’ici je sortirais. Prenant la direction du monde des lumières. »

 

Jean-François Guerry.

Commenter cet article
F
Sujet très intéressant et riche... mais c’est dommage de parler du miroir sans évoquer la Vérité.<br /> En effet quand on vient d’indiquer au jeune initié qu’il est maintenant sur le chemin de la Vérité et de la Lumière il parait intéressant de souligner que le miroir est aussi le reflet de la Vérité : il ne ment jamais et montrera toujours la véritable image de celui qui s’y regarde. Il n’y a pas de fausse image autre que celle qu’on y verra car derrière l’image il y a une conscience, une vie profane qu’on ne peut se cacher. C’est toute la différence entre l’être et le paraître...<br /> Bien fraternellement, de Frère Tuck.
Répondre