Jean-François Guerry.
A la gloire du G.A.D.L.U., Mes V. M. et tous mes FF... en vos grades et qualités,
Lors de ma dernière planche sur l'abolition de l'esclavage, nous avions pu découvrir que la prise de conscience au XVIII iéme siècle de l'inhumanité de cette exploitation des hommes entre eux avait été fondamentale dans l'abolition de cette pratique universelle et séculaire. Nous avions également constaté l'importance de la morale chrétienne et l'influence des philosophes des lumières dans ce combat contre l'esclavage. Nombreux furent les Francs-Maçons qui s'impliquèrent dans cette lutte même si des bateaux armés par des négociants du Havre, de Nantes ou de Bordeaux s'appelèrent : • Le Temple de Salomon, • Les Trois Frères, • La Fidélité • l'Atlas • le Franc Maçon... qui disparut en mer avec toute sa "cargaison". Châtiment de Dieu ou sinistre présage ?
Par la suite, au long de mes lectures, j'ai découvert, que cette page d'histoire était plus complexe que celle présentée actuellement par un grand nombre de nos contemporains, le plus souvent animé par des arrière-pensées politiques entraînant à des simplifications, voire des raccourcis simplistes dans leurs analyses. . Ces dernières années, les commémorations célébrant les dates anniversaire de l'abolition de l'esclavage ont fleuri, répandant dans les médias des discours rappelant ceux déjà entendus quelques années auparavant lors des mêmes cérémonies sur la Révolution française et dont l'impartialité me semblait déjà totalement absente et la vérité bafouée. A la recherche d'une approche la plus objective possible, sur les causes et le déroulé de cette première période de mesures pour l'abolition de l'esclavage je n'ai pu trouvé dans tous les articles que j'ai lu aucune réponse me satisfaisant. En désespoir de cause, je suis revenu en arrière et j'ai décidé d'analyser les principaux faits classés par ordre chronologique et, essayer d'en tirer quelques réflexions. Revenons en 1789. La Révolution dite des droits de l’homme, proclamant l’universalité de ces droits, pouvait-elle ignorer l’existence d’esclaves sur les territoires relevant de la souveraineté française ? Et bien contrairement à ce que nous pourrions croire, l’Assemblée constituante (I789-I791) ne porta pas la moindre atteinte au système colonial esclavagiste même si Mirabeau, Brissot ou l'abbé Grégoire présentaient régulièrement des doléances pour y mettre fin.
En fait, ce fut un enchaînement d'événements aux causes multiples qui participa à l'extension des droits humains aux esclaves.
Dès les manifestations de 1789, Outre-mer, la Révolution fut reprise par des colons qui virent dans ses principes le moyen politique de briser la tutelle de la métropole sur leurs activités. N'ayant aucun moyen de se battre si loin et, pour ainsi dire «d'autres chats à fouetter», l’Assemblée constituante finit par donner toutes les libertés octroyées aux citoyens métropolitains aux colons, en excluant bien évidemment les libres de couleur et plus encore les esclaves. Elle accepta la création d'assemblées coloniales blanches dotées de larges pouvoirs et par le décret du 8 mars 1790, légalisa ces assemblées coloniales, consacrant le principe du gouvernement autonome et le racisme institutionnalisé.
N'acceptant pas cette situation, fin 1790, des mulâtres se révoltèrent, montrant à l’opinion française que les grands colons ne représentaient pas à eux seuls les colonies, mais peut-être qu’ils en étaient « l’aristocratie ». Cependant, dans un premier temps, les invocations à la « liberté », habilement instrumentalisées par les partisans du statu quo colonial, représentés à Paris par le Club Massiac, un groupe de pression auprès de l'Assemblée constituante, persuadèrent la majorité des députés de maintenir en l'état l'esclavage.
En 1791, la révolte s'amplifia pour atteindre la plus grande île des Antilles, St Domingue où, les querelles entre Colons - planteurs, bien représentés à l'assemblée coloniale, qui souhaitaient préserver les liens avec la France, et les « petits Blancs ››, dont les revendications étaient défendues par l'assemblée séparatiste de Saint-Marc, une ville de la province de l'Ouest, dégénérèrent en affrontements et prirent en plusieurs endroits 1'allure d'une véritable guerre civile. Les libres de couleur, dont le statut était l'un des enjeux du débat, devinrent acteurs du conflit ; dans le Nord, Ogé et Chavannes, deux propriétaires mulâtres, lancèrent leurs partisans dans une insurrection armée.
Comme eux, nombre de petits planteurs blancs considérèrent alors que le ralliement des gens libres de couleur à un « front des propriétaires ›› était la seule façon de maintenir le système esclavagiste, ébranlé par la révolte servile et se joignirent aux insurgés.
Cette révolte eut un retentissement particulier parce qu'elle frappait au cœur de la prospérité coloniale, détruisant les riches plantations de la grande plaine du Nord qui en étaient la source principale. Les troupes coloniales intervinrent, capturèrent et mirent à mort dans des conditions atroces, le 26 février 1791 les deux rebelles. Ce dénouement tragique incita les mulâtres du Sud à prendre les armes à leur tour. Ils entraînèrent avec eux les esclaves qui se révoltèrent en nombre durant l'été 1791.
Le pouvoir colonial était totalement affaibli par ses divisions internes et par la défection des libres de couleur les plus politisés, dont un certain nombre finit par rejoindre les esclaves en révolte. Tel fut le cas des chefs mulâtres du Sud, comme Toussaint Louverture, un noir affranchi devenu propriétaire, qui rejoignit les rangs des insurgés avec de nombreux de ses partisans quelques mois après l'incendie de la plaine du nord en novembre 1791, ôtant à l'autorité coloniale toute capacité de riposte armée et judiciaire.
Pendant ce temps, à Paris, alimentés par les nouvelles des Antilles, les Amis des Noirs reprirent leurs actions en faveur de l'Abolition de l'Esclavage et firent évoluer l'Assemblée constituante dans leur sens. Le 15 mai 1791, les députés adoptent, après un débat houleux entre l'abbé Grégoire, Pétion et Robespierre, favorables aux droits politiques pour les libres de couleur, et Barnave, Moreau de Saint-Méry et l'abbé Maury, favorables aux privilèges des colons blancs, un décret qui accorde la citoyenneté aux gens de couleur, nés de parents libres. Ce décret fut abrogé le 24 septembre suivant pour être finalement élargi par la nouvelle Assemblée législative grâce aux Amis des Noirs le 4 avril 1792 : l'égalité des droits politiques est pleinement accordée aux libres de couleur.
Cette décision intervenant dans une situation de guerre civile entraîna dans les Antilles l'exil d'un grand nombre de maîtres blancs avec dans leur immense majorité, leurs esclaves. Ils diffusèrent dans tout l'espace Caraïbe les structures de l'économie de plantation, mirent en valeur de nouveaux espaces sur le modèle du «paradigme sucrier›› ; la Louisiane, Cuba, la Jamaïque, les rives de la vice-royauté hispanique de la Nouvelle-Grenade puis le sud-est des États-Unis. Ces mouvements de population s'inscrivent dans une démographie américaine caractérisée par une forte mobilité. Ces départs s'apparentèrent au phénomène de l'émigration dans la France révolutionnaire : fuite devant l'insécurité, recherche de la protection des troupes anglaises, proscriptions politiques. À SaintDomingue et à la Guadeloupe se produisirent d'importants transferts de propriétés, les biens des émigrés étant placés sous séquestre, souvent affermés. Les émigrés formèrent d'importantes colonies urbaines, particulièrement aux États-Unis (Philadelphie, Charleston, ….).
Les petits colons qui étaient restés sur leurs terres, prirent contact avec les Anglais, pour une protection militaire, la garantie du maintien de l'esclavage et du préjugé de couleur, la liberté commerciale. Par ailleurs, l'Assemblée dépêcha des commissaires civils (Sonthonax, Polverel) avec pour instruction de faire appliquer le décret sur légalité civile sans toucher à la question de l'esclavage. Mais, devant l'anarchie croissante et surtout la détermination des autonomistes blancs d'ouvrir les principaux ports aux Anglais, les commissaires en arrivèrent bien vite à la conclusion que l'unique voie pour conserver la colonie à la République était de rallier les troupes d'anciens esclaves réfugiés dans la partie espagnole de la colonie en proclamant l'abolition immédiate de l'esclavage. L'autorité militaire se délitait ; le gouverneur Galbaud fit cause commune avec les colons, le commandant du corps expéditionnaire, Laveaux, resta fidèle aux commissaires. En juin 1793, les autonomistes ouvrirent plusieurs ports aux Anglais. Le 29 août, Sonthonax proclama l'abolition immédiate de l'esc1avage dans le nord de la colonie, suivi par Polverel dans l'ouest et le sud.
Une résistance isolée à l'occupation anglaise, se maintint : Laveaux, dans le nord-ouest, les chefs mulâtres Rigaud et Beauvais dans le sud conduisant à une situation de chaos. Les commissaires furent rappelés en métropole pour rendre compte de la complexité de la situation et de leur initiative.
En France, la Convention montagnarde, en pleine répression dans les terres vendéennes nouvellement conquises, défendant âprement les frontières contre les armées coalisées et faisant face aux rébellions des villes suite à une terrible disette, instaure la terreur. Elle est dans la plus totale incapacité de conduire quelconque action dans les tropiques. A l'unanimité, le 16 pluviôse an Il (4 février l794), elle décrété la liberté générale pour tous les habitants de Saint-Domingue, légitimant après coup l'initiative de ses commissaires. Les effets du décret du 16 pluviôse furent décisifs sur le rapport de forces ; les 5 000 hommes de Toussaint Louverture rallièrent les troupes républicaines.
Un an plus tard, l'action coordonnée par Laveaux, Louverture dans le nord et Rigaud dans le sud, permit la libération des villes principales ; partout Espagnols et Anglais battirent en retraite.
Le 29 Août 1794, la Convention étendait à toutes les colonies françaises l’abolition proclamée à Saint-Domingue. Ainsi, la Révolution française réintégrait au sein de l'humanité les centaines de milliers d’Africains réduits en esclavage après avoir été déportés en Amérique.
Après cette étude un peu fastidieuse de faits, on est bien loin de la propagande jacobine, tiersmondiste ou indigéniste actuelle qui tend à expliquer que les « bons » représentants du peuple parisien ont libéré de leurs entraves tous les enchaînés de la terre ou que les « pauvres » esclaves vivants dans des conditions d'asservissement épouvantables se sont levés et sont « descendus dans la rue les armes à la main » pour acquérir leurs libertés.
Depuis toujours la vie aux colonies était fondée sur un équilibre instable entre les différentes communautés que constituaient les planteurs, les petits blancs qui ne portaient pas à cette époque des gilets jaunes, les mulâtres, les libres de couleur et les esclaves. Cette apparente harmonie reposaient sur un subtil mélange fait d’intérêt, de terreur, de gestion publique mais aussi d'humanité ou plutôt de charité chrétienne. Souvent, cet équilibre se rompait et des mulâtres ou des esclaves se révoltaient. Ceci avaient été le cas dans le début des années 1780 à Saint-Pierre en Martinique, où des esclaves avaient répandu la fausse nouvelle qu'un décret royal leur avait accordé la liberté. Dans toutes ces révoltes, avant un facteur déclencheur qui était souvent issu de faits divers concernant des esclaves, on retrouvait ces ferments qui conditionnaient leur vie: l'absence d'une quelconque éducation ou enseignement, les rumeurs, les rites d’initiation africains, le rôle de la musique et, aucune aspiration donc espoir d'accéder à une vie meilleure hormis celle de survivre.
Aucun grand courant politique n'animait vraiment ces populations sinon celui de « massacrer tous les blancs ». Elles s'organisaient au mieux de leurs intérêts pour les plus favorisés et de leur survie pour les autres.
Tiens, cette réalité socio-politique de la fin du XVIII éme ne pourrait-elle pas s'appliquer et présenter à l'identique la segmentation et la vie de certaines de nos populations résidant actuellement sur notre territoire?
Revenons à notre étude. Alors que la situation aux Antilles se stabilise, à Paris tout bascule. Le 28 juillet 1794, Robespierre et les membres du Comité du Salut public sont conduits à l'échafaud.
“C'était bien toute une guenille humaine, éclaboussée de sang et de boue, qu'on jetait ... dans la charrette du bourreau ….Et, soudain, la Révolution, brusquement arrêtée à un tournant imprévu, va virer sur elle-même. A l'étonnement de ceux-là même qui ont fait le 9 thermidor, cet événement va apporter au pays la réaction, parce que le pays en veut tirer la liberté et la paix ". dira un proche de Fouché, instigateur avec Tallien et Barras du renversement de Robespierre.
Profitant de cette nouvelle situation, après le départ pour la Métropole des généraux Laveaux et Sonthonax, Toussaint Louverture qui s'était proclamé gouverneur, mena en 1799 une guerre d’extermination contre les mulâtres de Rigaud dans le sud, puis annexa la partie espagnole de l’île. En 1801, il se fit désigner gouverneur à vie par une assemblée désignée. Cette dernière rédigea une Constitution autonomiste rétablissant notamment le travail forcé dont les conditions étaient quasiment similaires à celles de l'esclavage.
A Paris, le Directoire se traduira in fine par un brusque tournant autoritaire de 1799 à 1800 avec la montée au pouvoir de Bonaparte. Il brisa totalement ce lien entre révolution des droits de l’homme et abolition de l'esclavage. Dès 1802, le Consulat opta pour un retour à l’ancien régime colonial en rétablissant l'esclavage et la traite négrière. Pour les anciens esclaves et les libres de couleur, la fin de la République n’était pas une vaine formule : elle se concrétisait par le retour à la servitude pour les premiers et l'inégalité des droits pour les seconds. Le processus révolutionnaire qui avait conclut à l'abolition se déconstruisit, puis engagea un processus inverse de restauration dans les années 1802-1804 avec le désarmement des troupes de couleur et le rétablissement total de l'esclavage dans ses plus terribles conditions.
Deux événements favorisèrent cette décision: le coup d’État de Bonaparte, qui supprimait la garantie constitutionnelle de la liberté générale, inscrite dans le texte de 1795, et la paix avec l'Angleterre, qui autorisait le régime consulaire à mettre en œuvre un projet global pour les Caraïbes.
Les héritiers de la Société des amis des Noirs encore présents avaient été totalement marginalisés. Seul, l'abbé Grégoire ne devait sa liberté et restait libre de ses propos et ses mouvements qu'à l'amitié que lui portait Fouché. “Il est des destinations toutes marquées: Grégoire n'a qu'à aller à Saint-Domingue, on l'y fera pape”. s'irritait Napoléon à son sujet.
La politique coloniale du Consulat se trouvait totalement influencée par les nostalgiques de l’Ancien régime et de sa prospérité, qui reposait sur la plantation esclavagiste. Les pièces maîtresses du projet étaient la Louisiane, la Martinique et Saint-Domingue: • La Louisiane, cédée par 1’allié espagnol, devait permettre de restaurer l’influence de la France en Amérique du Nord et de contrer l’expansion des États-Unis. • La Martinique, occupée par les Anglais en 1793, n’avait jamais connu l’abolition de l'esclavage. • Le sort réservé a Saint-Domingue n’était pas fixé : un groupe plaidait pour l'entente avec Toussaint Louverture, qui faciliterait le retour (les colons émigrés et la restauration de l'économie de plantation sous le régime du travail forcé ; un autre, majoritaire, insistait sur le mauvais exemple offert par l’insubordination d’un « nègre » et les accords commerciaux de celui-ci avec les États-Unis.
La promulgation de la Constitution autonomiste de Toussaint Louverture conduisit Bonaparte à employer la manière forte, préconisée par le lobby esclavagiste devenu puissant depuis le 18 Brumaire. De plus, la population française influencée par les récits des atrocités commises par les esclaves révoltés souhaitaient le retour à une situation antérieure. Rappelons qu'à cette époque, la production sucrière à Saint-Domingue représentait plus de 50% de la production mondiale et que plus d'un français sur dix vivait du commerce colonial signifiant une source de revenus indispensable à l'économie de la France. Enfin, il est possible que l'influence de Joséphine ne fut pas neutre dans cette décision. Un corps expéditionnaire, commandé par le général Leclerc, mari de Pauline Bonaparte, débarqua à Saint-Domingue en mars 1802. Officiellement, l’objectif n’était pas le rétablissement de 1’esclavage, mais le retour des colonies sous tutelle métropolitaine et le désarmement des troupes de couleur. Toussaint organisa la résistance au corps expéditionnaire, gagnant les montagnes et incendiant plusieurs villes. Cette première phase de la guerre se termina par l'arrestation de Toussaint Louverture le 7 juin 1802, sa déportation en France et le ralliement à Leclerc de la plupart de ses généraux.
En Guadeloupe, les tentatives de désarmement de Richepanse se heurtèrent à une résistance des troupes de couleur menées par les officiers Delgres et Ignace. La mort de ceux-ci entraîna une répression sanglante, prélude au rétablissement de l'esclavage, en juillet 1802.
Mais avec l'apparition de la fièvre jaune décimant les troupes métropolitaines, les officiers de couleur de Saint-Domingue reprirent les armes. Avec des groupes d‘insurgés isolés, ils lancèrent conjointement un appel d'insurrection générale en septembre 1802. Un an plus tard, les survivants du corps expéditionnaire décimés par la maladie, qui avait également tué le général Leclerc, encerclés dans quelques villes isolées, capitulaient. Pendant ce temps, la rupture du traité d'Amiens et la reprise des hostilités avec l'Angleterre qui avait confisqué plus de 1200 navires français rendait impossible l'envoi d'un nouveau corps expéditionnaire.
Le général noir Dessalines proclama l'indépendance de Haïti (nom d’un ancien d'un royaume caraïbe) le 1 janvier 1804. Ce fut la première république noire indépendante.
Entre nous, lorsque nous voyons son état actuel, ne pouvons nous pas supposer que les grands puissances lui ont fait, consciemment ou inconsciemment cher payer cette proclamation et comment se fait-il qu'aucun mouvement ou porteur de théories indigénistes qui nous repaissent de leur bonnes intentions ou de leurs condamnations incessantes de la colonisation n'ait pas porté plus haut le flambeau de la transformation des conditions de vie misérables sur cette île?
Revenons à l'Histoire. C'est dans ce contexte avec l'occupation des colonies par l'Angleterre et l'Espagne que la Restauration revint aux affaires à Paris. Pour le roi Louis XVIII, la question de l'abolition de l'esclavage ne fut pas prioritaire, même si le Congrès de Vienne en 1815, sous l'influence de l'Angleterre avait déclarée illégale la traite des noirs. Il est à noter que la France devait sa présence à Vienne que parce que Talleyrand avait promis aux anglais qu'il voterait contre la traite des noirs.
Mais le temps passe; nous sommes déjà au XIX ième siècle qui occupe une place très particulière dans l’histoire de la traite négrière organisée par les puissances occidentales pourtant déclarée illégale. En effet; elle a continué à prospérer pendant plusieurs décennies, jusqu’au début des années I860. Ainsi, sur les presque quatre siècles d’existence de la traite des Noirs d'Afrique vers les colonies européennes, le XIX ième siècle arrive en seconde position, avec prés de deux millions de déportés, juste derrière le XVII ième siècle, apogée de la traite légale. ll convient de s’interroger sur cette apparente contradiction entre l’interdiction internationale de la traite et sa poursuite quasiment au grand jour.
Par ailleurs, si la lutte contre la traite avait été l’objectif principal des anti-esclavagistes du XVIII ième siècle : aspect le plus inhumain du système négrier, elle en était également son point faible.
Arrivé au termes de cette planche, je suis loin de mon objectif initial qui était de discourir sur la fin de l'abolition de l'esclavage. Mais, comme je vous l'avais dit en préambule, je me suis laissé conduire par la chronologie des faits et in fine qu'ai je découvert? Ai-je avancé?
Comme vous avez-pu le constater, ce sujet est immense et éminemment complexe. Ceci se trouvera d'ailleurs confirmé dans l'enchaînement des actions qui conduiront à l'abolition de l'esclavage au milieu du XIX ième siècle.
Mais, ce qui semble se détacher de ce travail ne serait ce pas qu'une caractéristique principale de ce grand fait historique soit la similitude étonnante qu'il présente avec les problèmes qui bouleversent notre société et menacent notre vie d'aujourd'hui. Flux migratoires, chocs des civilisations, intérêts économiques majeurs, guerres, humanisme, ne sont-ils pas toujours d'actualité conditionnant notre actualité?
Au milieu des tempêtes que traverse notre vieux pays, pouvons-nous tirer des enseignements à partir de cette étude approfondie de l'abolition de l'esclavage et, en ce qui nous concerne plus particulièrement, de l'implication et de l'influence réelle des Francs-Maçons dans ce combat? Sur ce dernier point, une analyse précise des actions conduites tout au long de leurs vies par l'Abbé Grégoire et Victor-Schoelcher devrait nous éclairer.
J'ai dit.
Jean-François Guerry.