L’INITIATION EN QUESTION – LES LUMIÈRES DE PYTHAGORE.
L’initiation en général, est le passage d’un état à l’autre, elle émaille les périodes de notre vie parfois sans que nous nous en rendions compte, le jeune enfant passe l’âge de raison, puis à l’adolescence, puis à l’âge adulte il devient mûr c’est le moment que les grecs appellent le Kairos, le moment opportun, le midi de la vie, enfin la vieillesse qui précède l’ultime initiation qui ouvre les portes de l’inconnu.
L’initiation est donc une succession de passages, de morts de régénérations, des cycles qui forment une spirale ascendante. Elle communication des mystères, dont le plus important celui qui surplombe les autres, le mystère de la vie. Ces changements d’état, modifient notre manière de voir, de sentir, d’entendre, conversion du regard, de notre manière d’être, de nos relations aux autres.
Les initiations sont ancestrales, elles remontent dans la mémoire des temps, dans notre mémoire. L’initiation est une descente dans notre inconscient personnel et dans l’inconscient collectif ou nous trouvons les traces de l’un, de la source, c’est un voyage dans la psychologie des profondeurs.
L’on décèle là, l’individuation de Jung, Jean-Luc Maxence a écrit à ce propos, dans son livre Jung est l’avenir de la Franc-Maçonnerie Édité chez Dervy :
« Il y a un jeu de miroir entre individuation et initiation… la propédeutique de Jung et celle de la Franc-Maçonnerie en général, les enseignements de l’une et l’autre, les deux voies originales et complètes ! (….) l’individuation, approche progressive d’un Centre que l’homme ne peut jamais atteindre, et l’initiation approche progressive de la sagesse que l’éternel apprenti que nous demeurons tous jusqu’au dernier soupir ne peut jamais vraiment acquérir. »
L’on ne peut pas dire que cela soit vraiment réconfortant, du moins en apparence car la joie se trouve sur le chemin, qui donne progressivement et de plus en plus intensément un sentiment de plénitude à portée d’esprit.
L’initiation selon Pythagore est comparable à cette psychologie des profondeurs, de l’intime de Jung. La connaissance des mystères intemporels, les mystères de l’existence humaine, recherche de toutes les époques depuis la naissance de l’humanité.
Au commencement, au début, je cherchais puis je fus sélectionné, élu parmi les néophytes. Pour aller à la conquête d’une vie nouvelle, d’un changement d’état. Pour passer du profane au sacré par la porte basse, à la découverte des secrets qui mènent au sacré, jusqu’à l’illumination.
Devenir moi-même un temple remplit de lumière, cette lumière intérieure éternellement vivante. Celle qui brille dans le noir comme les vitraux de Pierre Soulages, on est alors heureux comme l’écrit Christian Bobin :« Impossible de s’éprouver abandonné devant un tableau de Pierre. On est, enfin, devant quelqu’un. Et ce quelqu’un, c’est nous. »
L’initiation est donc l’éveil de l’être à la Lumière, que l’on peut appeler Vérité ou Parole, ou Grand Architecte.
Quelle est la clé de cet éveil ? C’est le symbolisme. Pour les Pythagoricien la connaissance des nombres dorés.
Le profane a reçu la Lumière et plus aussi le « le pouvoir » par la pratique des rites initiatiques, par la pratique des Vertus nous dit la Franc-Maçonnerie. Véritables exercices spirituels, qui sont les voies vers la Connaissance.
C’est quoi au juste cette initiation ?
Le réveil des facultés enfouies, encloses, l’ouverture des travaux, d’où l’impérieuse nécessité du respect des rituels initiatiques.
Ce pouvoir du rituel est transmis du maître à l’élève, à celui qui s’élève. Le maître est détenteur du pouvoir, maillet et épée en main, c’est lui qui dit mes frères que le profane entre dans la chaîne.
La transmission du Pouvoir, du souffle, doit être rigoureuse, le rite doit être immuable, c’est seulement à cette condition que peut se réaliser la transmission initiatique.
Selon les Pythagoriciens le pouvoir spirituel vient d’en haut, et non d’en bas. Il est transmis par le maître médiateur qui se situe entre terre et ciel.
Pour les Pythagoriciens ce médiateur l’était AD VITAM ETERNAM, il ne représentait que lui-même, il était investi par son prédécesseur. Aujourd’hui le pouvoir vient d’en bas, par élection, sans douter de la bonne foi des électeurs et des postulants à l’élection, l’horizontalité n’est pas verticalité spirituelle.
On observe d’ailleurs que les corps maçonniques sont de deux niveaux, ceux qui régissent les premiers degrés initiatiques sont horizontaux, ceux qui régissent les degrés supérieurs, les degrés de perfectionnement sont verticaux, c’est l’association complémentaire du temporel et du spirituel. C’est sans doute ce qui créé parfois des tensions dans leurs rapports.
Les Pythagoriciens eux sont à cet égard plus sévères :
« Chez les anciens l’initiation était un acte cultuel et religieux, chez les modernes égarés, il est tout au plus une sorte de mauvais théâtre, une parodie sans âme d’une chose sacrée ! (…) Les anciens formaient des initiés, les modernes ne forment très superficiellement que des amateurs. »
Cette rigueur est-elle critiquable ? Cela ressemble au « de mon temps », et résonne comme la nostalgie du passé. Les adaptations successives des rituels, ont-t-elles abouties à une dégradation de ceux-ci, et à une perte de leur sens et de leur rôle initiatique ?
Faut-il s’adapter aux circonstances passagères ? Peut-on dispenser une propédeutique initiatique avec Skype ou Zoom, les anciens avaient sans doute la même interrogation quand la transmission qui était orale, devint écrite avec la révolution de l’imprimerie.
Les Pythagoriciens apportent une réponse, quand ils disent :
« Car, c’est à l’effet que l’on juge le rite ; au fruit que l’on juge l’arbre. »
Leurs critiques des initiations modernes se poursuivent ainsi :
« Les Anciens Mystères ont produit dans les âmes des révolutions extraordinaires ; ils ont eu leurs Saints, leurs Martyrs, leurs Thaumaturges, leurs Docteurs, leurs Philosophes, les grands Législateurs.
Les modernes ont sombré dans le matérialisme, la querelle des intérêts, la brigue électorale, la démagogie la plus mercantile.
Les marchands ont envahi le Temple et les fils de l’Esprit n’ont plus été capables de la reconnaître. »
Leur apparente intransigeante n’est pas loin de la vérité, car le but de l’initiation n’est pas l’enrichissement matériel, voire intellectuel, mais l’élévation spirituelle, et le désir de plus d’humanité, de fraternité et d’amour entre les hommes. Il y a dans les initiations antiques un véritable secret traditionnel, sur le destin de l’homme, de son âme, dans le présent d’où la Praxis des vertus, et une espérance pour certains de salut, cette espérance est celle promise par les religions, l’espérance maçonnique, comme la foi maçonnique est celle de rendre l’homme meilleur, ici et maintenant. Ce qui n’empêchent pas le Franc-Maçon de boire le nectar qui coule des sources des meilleurs Traditions, pour construire sa vie.
Jean-François Guerry.
Sources : Ordre Pythagoricien.
Quelques citations références pour les Pythagoriciens :
« Heureux celui des hommes, vivant sur la terre, qui a vu les Mystères dit un hymne à Déméter ; heureux, celui qui a vu cela, avant d’entrer dans les fosses de la terre, a dit Pindare ; Ô trois fois heureux, le mortel qui, après avoir contemplé ces Mystères, s’en ira dans l’Hadès ; lui seul pourra y vivre heureux, les autres n’y trouveront que souffrance dit Sophocle. Et Platon ajoute celui qui aura été purifié et initié vivra avec les Dieux, mais ceux qui viendront dans l’Hadès sans avoir été reçus aux Mystères, seront plongés dans l’océan de boue… »
À ces citations je rajouterais volontiers quelques lignes du prologue de l’évangile ésotérique de Jean, bien postérieur mais qui est toujours présent dans de nombreuses loges maçonniques :
« et la Lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas saisie.
Et les siens ne l’ont pas accueilli. Mais à tous ceux qui l’on accueilli, il a donné le pouvoir de devenir….
C’est de lui que j’ai dit : celui qui vient derrière moi, le voilà passé devant moi, parce qu’avant moi il était. »
Conseils de lecture pour ceux qui veulent aller plus loin :
Biographies :
Vie de Pythagore par Jamblique.
Vie de Pythagore par Porphyre.
Études et recherches sur la littérature pythagoricienne :
Études sur la littérature pythagoricienne par A. Delatte.
Recherches sur les sources de la légende pythagoricienne par I.Lévy
Les Vers Dorés :
Pythagore : Le Vers d’Or, Hièroclès par M. Meunier.
Les Vers Dorés de Pythagore par Fabre d’Olivet.
Recherches et études sur la philosophie pythagoricienne :
Les penseurs de la Grèce par Th. Gomperz.
Les Études de Philosophie Antique par E. Brehier.
Recherches sur la science pythagoricienne :
Le nombre d’Or, Rythmes et Rites Pythagoriciens par Matila Ghyka.
Le Rôle du Pythagorisme dans l’évolution des idées par L. Brunschvicg.
La Liturgie pythagoricienne :
La Basilique Pythagoricienne de la Porte Majeure par J. Carcopino.