J’ai longtemps cru que quand je serais vieux, je saurais. Initié franc-maçon au milieu de ma vie, souvent quelques vieux frères donnait des coups de tromblons à mon ignorance, d’autres ceux dans les yeux desquels je voyais la lumière, me gratifiait d’un simple sourire et me prenait la main.
Jeune coq pétri d’orgueil et chantant à toutes les aurores en secret, oui, je les admirais. Non pas que j’avais une envie de rides, mais je voulais tout, tout de suite, la jeunesse extérieure et la beauté intérieure.
Mais enfin, oui, je les admirais, aujourd’hui on n’admire plus les vieux, ils sont trop nombreux, ils coûtent trop cher. Aujourd’hui l’on passe son temps à vouloir être jeune, l’apparence domine l’existence.
Autrefois on mourrait plus jeune, les vieux étaient rares, donc beaux, étaient-ils plus sages ?

Le vieux maçon vieilli, porte avec son tablier, le poids et les rides de son âge, il se métamorphose quand son corps diminue, s’appauvrit, son âme grandit, elle grandit encore plus quand il voit ses frères nombreux sur la colonne du nord.
Je l’avoue maintenant, je les admirais, non pas pour leur savoir, mais pour le temps qu’il me donnait, pour leur sagesse et leur force.
Je ne sais pas par quel mystère, quel hasard Victor Hugo en chantant la vieillesse dans son poème « Booz l’endormi »s’est approché de cette colonne située à l’entrée du temple que les francs-maçons appellent Boaz.
« Le vieillard, qui revient vers la source première,
Entre aux jours éternels et sort des jours changeants ;
Et l’on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens,
Mais dans l’œil du vieillard ont voit la lumière. »
JF.
« La vraie lumière ne s’use pas
On a beau l’appeler souvenir
On a beau dire qu’elle disparaît
On beau dire et vouloir dire que tout s’en va
Tout ce qui est vrai reste là
Quand la vérité est laide c’est une bien fâcheuse histoire
Quand la vérité est belle rien ne ternit son miroir
Les gens très âgés remontent en enfance
Et leur cœur bat
Là où il n’y a pas d’autrefois. »
Jacques Prévert.