BLOGUER, PENSER
Pourquoi écrire chaque jour, peut-être pour tuer le temps qui passe et fixer celui qui reste, regarder le monde différemment, le passer modestement dans le tamis du prisme maçonnique, regarder et non voir, écouter plus qu’entendre. Mais surtout juger par soi-même, entretenir sa pensée toujours en état de marche, en éveil. Essayer d’oublier après avoir tout appris, reçu être capable de faire le vide, pour remplir de nouveau, avec l’essence des choses, donner après avoir reçu.
Retrouver un peu de l’attitude de nos frères du siècle des lumières, spéculer sur après tout, pour aller à l’essentiel, là apparaît comme un paradoxe, si l’initiation maçonnique s’est se débarrasser enfin des apparences, de la surface des choses et aller chercher dans la profondeur de son être intime les réponses au mystère de la vie.
Alors pourquoi cette logorrhée de mots couchés chaque jour sur la feuille blanche, pure le matin, et noircie le soir, peut-être pour retrouver enfin le mot, la parole, le sésame qui ouvre le cœur.
Il naît chaque jour une indignation, une impatience, de trouver le mot unique, la parole perdue, celle qui permettra de réunir ce qui est épars. C’est comme une rumination intérieure, une soif renouvelée, une espérance naïve, nourrie par la beauté de la nature si belle et si malmenée.
Quelle joie de s’émerveiller sans cesse, face au sourire de son frère, de sa sœur, de ses amis, de connaître la fraternité qui rassemble, quand montent les exclusions.
Alors ses pensées quotidiennes, sont comme des fiches de travail que chaque matin, je rédige maladroitement pour dire ce que je pense en trempant ma plume dans l’encre de mon cœur. Il y a plus d’imagination, d’intuition que de raison dans tous ces mots, ces textes trop courts, qui forment les maillons d’une chaîne et se soutiennent entre eux.
Parfois cela tourne à l’obsession de faire au mieux, de faire bien, de toucher l’inaccessible, je sais aussi que chaque matin le soleil se lève et qu’il se couchera le soir pour renaître à nouveau, je sais que les francs-maçons sont des enfants de la lumière. Il y a chaque matin des frères qui regardent l’Orient.
Bien sûr tout cela est parfois dérisoire, pathétique, de voir toutes idées qui s’entrechoquent, se complètent, se contredisent quelquefois, ne cherchons-nous pas à réconcilier les contraires ?
Les idées évoluent, deviennent sages, avec le temps, s’endorment souvent, elles demandent à être réveillées.
C’est sans doute pour cela que dans une sorte de frénésie, chaque matin la plume coure sur le papier, elle crisse, le fait chanter, donne du courage pour monter vers l’inaccessible sommet de la montagne, comment par quel orgueil pouvons-nous espérer l’atteindre sans avoir fait la conquête de soi-même ?
Bloguer, c’est tenir un petit carnet composé de mille feuilles, c’est s’obliger à penser soi-même en s’appuyant sur la pensée des autres et dans ce cas précis, c’est faire vivre les mots, le faire vibrer sous la lumière de l’initiation maçonnique.
Il y a tant de choses à connaître à explorer, tant de raisons de se révolter, comme l’écrivait Albert Camus dans L’homme révolté V- La pensée du midi :
« Quoi que nous fassions la démesure gardera toujours sa place dans le cœur de l’homme, à l’endroit de la solitude. Nous portons tous en nous nos bagues, nos crimes et nos ravages. Mais notre tâche n’est pas de les déchaîner à travers le monde. Elle est de les combattre en nous-mêmes et dans les autres. »
Bloguer, resterait une futilité dérisoire, si je ne pouvais pas plusieurs fois par mois, donner le baiser fraternel à mes frères et m’unir avec eux dans une chaîne d’union fraternelle.
JF.