DU BANDEAU ET DU VOILE
Il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.
Le proverbe qui contient en lui une morale, une sagesse dite populaire c’est-à-dire simplement humaine, une vérité simple qu’il faut mettre à l’épreuve des faits, afin d’éviter tout sophisme déviant, qui ne serait qu’apparence de la vérité.
Les francs-maçons ont dans leurs rituels des invariants, le dévoilement en est un. Le profane qui frappe à la porte du temple, avant d’être mis en face de lui dans la caverne, doit subir l’épreuve du bandeau qui précède sa cérémonie d’initiation aux mystères dans beaucoup de rites. Ce qui peut apparaître comme une humiliation, n’est pas seulement la volonté de dissimuler les symboles du temple ou l’identité des sœurs ou des frères présents dans le temple.
En réalité, c’est le début du processus initiatique, si le profane est privé de la vue, il ressentira l’importance de la parole, de ses paroles, il comprendra qu’il existe une porte du dedans, celle de l’homme intérieur. Le bandeau qui occulte la vue, dévoile bien plus que ses yeux, il permet à l’homme sincère, qui cherche la lumière, d’ouvrir la porte de son cœur.
Le postulant prend conscience que c’est sous le voile des apparences qu’il faut s’efforcer de chercher la Connaissance et la Lumière.
Depuis la plus haute antiquité les rites initiatiques ont recours à ce procédé du voile pour dévoiler.
La véritable nature de l’homme est cachée à l’intérieur de lui-même, l’initiation va permettre de la mettre au jour, en lumière, cela se prépare il faut être capable de supporter la lumière, puis la grande lumière, il faut apprendre à se connaître, puis opérer un détachement des choses inutiles pour aller vers l’essence. Les mystères initiatiques d’Eleusis et d’Isis sont des exemples de ces dévoilements, les mystes participent à cette cosmogonie d’eux-mêmes.
L’art et plus particulièrement la peinture et la poésie, sont féconds dans la représentation de ces dévoilements de la nature et des hommes. Les tableaux jalonnent les siècles : Appolon en génie de la poésie dévoile la statue d’Isis –Artémis, le Titien avec son amour sacré et profane, la philosophie de Raphaël qui trône entourée de deux Artémis figurant la nature, le génie d’Epicure dévoile Lucrèce tableau de La Grange en 1795 visible à la bibliothèque de la Sorbonne etc…
Le siècle des lumières met les sciences, les techniques et l’expérimentation au service du dévoilement, le poète Goethe a reproché à Newton ses recherches sur la composition de la lumière et son dévoilement, qui peut prétendre en effet arracher son voile à la nature !
« Mystérieuse au grand jour, la Nature ne se laisse pas dérober son voile et ce qu’elle ne veut pas révéler à ton esprit, tu ne pourras pas la contraindre à le faire avec des leviers et des hélices. »
Goethe l’initié considère l’art comme le meilleur interprète de la nature, l’intuition et la conscience intérieure prennent le pas sur la raison.
Pour ma part je le suis aveuglementsur ce chemin quand il écrit :
« Si tu réussis à ce que ton intuition, pénètre d’abord à l’intérieur, puis revienne vers l’extérieur, alors tu seras instruit de la meilleure manière. »
Ainsi l’on découvre qu’il y a bien des choses à voir derrière le bandeau et les voiles qui sont présents sur la voie spirituelle de l’initiation.
JF.