ATTEINDRE L’APATHEIA
Nous sommes ce que nous sommes, ce constat Lapalisse aurait pu le faire. Devons-nous succomber à la dictature de l’envie d’être autre ? C’est-à-dire un personnage de fiction, de désir, inspiré par nos pulsions. Ou peut-être choisir d’être ce que sommes et d’évoluer, de s’initier à nous-même, non pas de changer, mais de se changer.
Les initiés savent que de jour en jour ils changent, ils se libèrent de l’emprise de leur personnalité pleine de ses certitudes, ils s’ouvrent à autre chose, ils mettent en œuvre leurs aspirations profondes, en maitrisant sans les ignorer leurs passions, c’est le secret de l’ouverture de leur esprit et de leur cœur, ils gravissent peu à peu les marches, ils pénètrent dans le temple de leur être intérieur.
Les initiés font de plus en plus confiance en leur soi, ils sont sûrs de la force de leur soi, pour se libérer de leurs angoisses, ils ont appris à connaître la souffrance, mais aussi la joie, le bonheur même, ils peuvent affronter le monde tel qu’il est avec leur volonté.
Les initiés sont sur le chemin de la conquête de leur âme et du meilleur du monde son âme universelle. Ce sont des naïfs utopistes, des « gourmands » de l’amour fraternel. Ils veulent tout, avoir la conscience d’une certaine éthique, être altruiste, ils refusent l’oisiveté, le temps presse. Ils veulent êtres des artistes du monde, êtres dans le réel en même temps, pas des obscurantistes, être loyal avec eux-mêmes, refuser l’individualisme, être fort, être des vigies de l’harmonie, quelle vanité !
Pourquoi pas dirait Jacques : « Être cela une fois, une fois seulement beau et con (bon) à la fois. »
Ce n’est pas la même chose de voir la Lumière et de parler de la lumière, cela oblige au travail, cela nous oblige à apprendre à nous aimer, pour pouvoir aimer les autres, c’est cette voie de l’amour qui apporte la paix et la liberté. Cette paix intérieure qui est « l’Apatheia »d’Evagre Le Pontique.
JF.
Notes : Ce texte m’a été inspiré par la lecture du roman de Laurent Gounelle paru chez Calmann Lévy sous le titre « Je te promets la liberté.» Ainsi que quelques recherches sur les pères du désert en particulier sur Evagre le Pontique, qui fût peut-être un précurseur de la psychologie, il a été inspiré par la pensée d’Origène. Pour Evagre la vie spirituelle à pour objectif de se purifier intérieurement, se purifier de ses passions, de ses pulsions pour atteindre une plus grande charité.
Ce père du désert reconnait avec humilité : « La vie spirituelle est faite toutefois de va-et-vient entre ces deux étapes. On n’est jamais totalement libéré de ses passions, mais il peut y avoir des seuils, on devient plus libre à l’égard de ses passions, on entre dans une charité plus profonde envers les autres. »
Cet état pour Evagre est à la charnière entre la purification et la contemplation c’est « l’Apatheia »la paix intérieure.
Fuir le vice et pratiquer la vertu, maîtriser ses passions, cette maïeutique est un des buts de l’initiation maçonnique. Véritable travail de son soi et sur soi, véritable médecine du corps et de l’âme, à pratiquer avec mesure et humilité, pour atteindre une vie plus bonne, maintenant, une vie plus libre.
Les enseignements et l’exemplarité des pères du désert, ces professeurs de l’université de l’âme, sont des sources d’inspiration pour le franc-maçon désireux de s’élever vers les hautes sphères de la spiritualité, celle où le cœur et l’esprit règnent ensemble, et dépassent les limites de l’intellect.
Ainsi Evagre Le Pontique sert de guide à ceux qui cherchent la liberté intérieure.
Dorothée de Gaza nous enseigne cette spiritualité sans limites.
Isaac Le Syriennous incline à la pratique de la fraternité universelle.
Jean Climaqueavec son échelle mystérieuse, nous fait franchir les barreaux jusqu’à une forme de grâce, dont il faut savoir revenir avec douceur et humilité. Il est plus dur parfois de descendre que de monter. Ce n’est pas sans nous rappeler le fil à plomb du maçon.
JF.