SORTIR DU MONDE
Sortir du monde, pour aller à la rencontre de soi, des gens, de leurs âmes.
Sortir doucement de notre esprit tous ceux qui l’habitent, nous ne sommes que des hommes. Ceux qui sont passés de l’autre côté ne peuvent pas toujours rester en nous, nous les déposons dans nos temples, nos églises, leurs nouvelles demeures.
C’est pourquoi notre cœur bat plus fort quand nous prenons l’irrésistible chemin du temple. On tremble quand la musique monte, les âmes s’accrochent aux notes, les âmes se posent à notre portée. Le monde s’efface, il laisse place aux gens, aux femmes aux hommes.
Les temples nous les avons construits pour sortir du monde, pour recueillir les âmes, les faire vivre dans la lumière verticale qui descend pure, sans poussières, la lumière bleue de l’azur universel.
Cette lumière éternelle qui nous tire du monde, des coupons de nos supermarchés.
Jean-François.
Rencontres…
On s’est croisé un soir sur un trottoir bondé
Du côté d’saint germain, et quand tu as souri
J’en fus tout retourné, j’en fus tant attendri,
Et je suis resté là, planté, à m’attarder,
Près du kiosque à journaux, dérisoire refuge,
Pour figer ton sourire, dans mon cœur, dans ma tête,
Pour retenir l’instant, pour en faire une fête,
Et pour me souvenir en coupable transfuge.
Tu n’t’es pas retournée, le boul’mich t’a croqué,
Avalé ; j’aurais dû courir après ton ombre
Mais, las, j’ai sans nul doute craint de te choquer,
De te voir disparaître vraiment, telle une ombre,
Et suivre, inatteignable, dans une course effrénée,
Un autre port d’attache, pour te rasséréner.
La pluie a entonné son refrain clapotant,
Tandis que je ressasse, ce rendez-vous fugace,
Tandis que j’ai perdu depuis quelques instants,
Le souvenir d’un soir qui devient une farce…
Une douloureuse farce, la mémoire est prison
Quand elle restitue, des chagrins et des larmes,
Quand elle distille, secrète, son terrible poison.
Des rencontres improbables, Des sourires timides,
Avec dans le regard un incroyable charme,
Témoignent qu’elle existe l’étincelle qui guide
Vers un bonheur possible pourvu que l’on y croie,
Pourvu que l’on soit prêt à courir chaque fois ;
Il n’y a point de hasard, et la vie restitue,
A qui le veut vraiment, son comptant de crédible,
Pourvu que l’on soit prêt d’accueillir l’indicible.
Le kiosque est toujours là, à côté de l’église,
Sur le boul’vard magique, je m’y promène encore,
Je m’attable en terrasse de la brasserie du Flore,
Guettant un souvenir qui toujours m’électrise.
Les belles déambulent mais je reste invisible,
Solitaire et chagrin installé en automne,
Mais le cœur au printemps, exalté, accessible,
Espérant l’impossible, qu’une romance entonne,
Une chanson nouvelle, dans la ronde du vent…
Philippe Jouvert.
Avec l’aimable autorisation de l’auteur.