Un blog d'information, de conversations sur le thème de la Franc Maçonnerie, des textes en rapport avec la Franc Maçonnerie, comptes rendus et conseils de lectures.
Le Franc-maçon associe l’humilité de ses savoirs à son désir de la Connaissance, il recherche à combler le vide pour atteindre l’inaccessible plénitude, la réalisation de son unité. Il travaille avec la Force qui est en lui pour humblement poser sa pierre polie dans le Temple matériel du monde visible, mais aussi et surtout pour construire son Temple spirituel, pour être lui-même un Temple de l’esprit.
Les stoïciens de l’antiquité avaient initié cette méthode, à l’instar d’Épictète l’esclave affranchi qui continua à servir son maître, de Sénèque le politicien précepteur de Néron, de Marc Aurèle l’empereur philosophe, un triangle d’amoureux du bien et des vertus qui auraient êtres fondateurs d’une loge maçonnique. Des hommes libres de leurs paroles et de leurs actes, préférant l’exil à la compromission comme Sénèque, des hommes riches et pauvres mais vertueux, figures de la sagesse de leur époque.
Élément de leur corpus pédagogique : pour mettre de la distance entre nos émotions afin de pouvoir résister aux moments difficiles de la vie, il faut lire et relire par exemple Les Consolations de Sénèque pour apprendre à dominer ses souffrances grâce à la raison et aussi la parole, apprendre à parler de nos souffrances. Il faut relire aussi Les Lettres à Lucilius lettres testamentaires rédigées à la fin de sa vie pour un ami fidèle.
Les stoïciens, à l’inverse des épicuriens qui font retraite dans leur jardin, participent à la vie de la cité qu’ils veulent servir et améliorer.
Comment passer du désir à la pratique, de la théorie à la pratique ? En s’exerçant au bien moral, recherche essentielle unique qui vaille pour les stoïciens. Il faut donc pratiquer des « exercices spirituels », ce que les maçons appellent des travaux de Loge. Ainsi Épictète recommandait de se faire son propre jugement sans préjugés, juger les choses telles quelles sont et non telles qu’elles peuvent nous apparaître, ce qui suppose la maîtrise de nos émotions de nos passions. Non pas, renoncer aux émotions qui viennent du cœur, ni aux passions saines. Agir ici et maintenant dans ce monde, sans être seulement préoccupé du salut de son âme. C’est la recherche de l’harmonie, de l’apaisement de l’âme des stoïciens l’ataraxie.
Soigner son âme et son corps pour pouvoir agir pour le bien moral, se préparer au meilleur et au pire, il sera plus facile d’accepter les souffrances contre lesquelles on ne peut rien.
Faire que sa vie soit utile aux siens, à la cité, convertir son regard c’est une initiation, une révolution lente et calme que stoïciens et maçons partagent. La réussite n’est pas toujours au rendez-vous, ainsi Marc Aurèle n’a pas réussi à abolir l’esclavage, il a modestement amélioré leur vie, adoucit leur condition. Marc Aurèle, a aussi comme nous tous sa part d’ombre, il a persécuté les chrétiens, persuadé que « cette secte » (Définition qui doit comprise dans le contexte de l’époque) allait contre les intérêts de l’empire (Cf Ernest Renan et son Marc Aurèle), par la suite la religion chrétienne deviendra religion d’état à Rome, les chrétiens persécutant à leur tour les autres religions.
D’une manière générale les stoïciens voulaient un traitement égal pour tous les hommes, les maçons aussi : Faire aux autres ce que l’on voudrait qu’il nous fût fait. Les stoïciens nous demandent de nous concentrer sur ce que nous pouvons faire, sur ce qui dépend de nous. (Cf Manuel d’Épictète). Ils donnaient aux dieux, à Dieu le nom de nature ou de bien moral, si les Épicuriens pensent que les dieux n’agissent pas sur les hommes, les stoïciens reconnaissent eux la participation des dieux dans les réussites et les échecs de la cité (Pour approfondir les deux thèses lire Cicéron la Nature des dieux traduction, introduction de Clara Auvray-Assayas Éditions Les Belles Lettres 2020).
Les stoïciens avaient ils l’intuition d’un Dieu intérieur à l’homme, d’une Force, d’une Lumière présente dans l’homme, une transcendance dans l’immanence ?
Comment les stoïciens envisageaient ils de « réussir leur vie » ? De la rendre la meilleure possible, par des exercices quotidiens, qui soient à la fois Praxis et Théoria. Des Exercices Spirituels bien développés par Pierre Hadot dans une thèse qui a été pour lui le travail emblématique de sa philosophie. Il y a une analogie entre ces « Exercices Spirituels » et la méthode maçonnique, les travaux maçonniques, dont les enseignements doivent êtres propagés en dehors des temples. Examens de conscience permanents, pour une élévation constante de notre conscience, ces exercices spirituels deviennent des exercices existentiels. Ces exercices, ses interrogations sur le bien qu’il avait fait chaque jour, Marc Aurèle en faisait le point chaque jour. Il les écrivait dans ses Pensées pour soi-même. C’était pour Marc Aurèle faire son devoir, ce Devoir qu’il est parfois plus facile de faire que de comprendre ou connaître.
Être capable de réagir constamment sans culpabilité mais avec conscience sur tout le bien que l’on pas pu faire et s’efforcer de se perfectionner ; travail réserver à une élite intellectuelle, non pas il s’agit là de l’intelligence du cœur.
Chacun peut élever son regard, prendre un peu de hauteur sans dédain mais par soif de connaissance spirituelle. Non pas non plus souhaité un excès de purification en restant à sa place, conscient de sa condition humaine. On connaît la philautie de la purification et de sa dictature qui élimine alors que les stoïciens et les Francs-maçons veulent réunir tous les hommes dans leurs différences, en toute fraternité. L’amélioration de la société n’est surtout la recherche d’une pureté totale !
Francs-maçons et stoïciens partagent la croyance en une providence, un ordre rationnel de l’Univers, un ordre après le chaos auquel ils travaillent. Ils associent Foi et Raison l’une et l’autre ne s’excluant pas. Ils sont persuadés que l’homme peut agir sur ses passions, préférer les vertus aux vices, réunir les contraires, à la recherche de l’harmonie. Le Franc-maçon en mouvement par son initiation est sur ce chemin, il est dans le désir de la contemplation de l’Un, ne serait-ce qu’un moment au cours de sa vie et peut-être au terme de sa vie aux portes de l’éternel Orient. En s’améliorant du mieux qu’il peut, en essayant de réaliser la plénitude de son unité, d’être Un, de passer de l’individuel à l’universel dans un monde un peu meilleur, un monde rendu plus harmonieux grâce au travail de tous, unis dans l’amour fraternel.
Joie dans les cœurs. Le cœur comme la vie. La vie qui bat et palpite. Pour quoi, pour qui ? Pour la vie qui va, qui vit. À la fois l’intime, dans le secret du cœur, taiseux en notre for intérieur, et aussi ce cœur qui bondit, s’émeut et toujours répond à l’univers et s’y accorde. Sursum corda ! Hauts les cœurs ! Ne jamais perdre cœur, cœur-courage. Toujours l’élan vital à partir de cet organe caché, niché au sein de la créature. Comme le noyau ou la graine contiennent la promesse du fruit.
Organe et symbole, ce cœur, l’autre mot de l’âme, qui ne va pas sans le don, la générosité. On ne peut manquer de cœur. De bon cœur auquel, toujours, s’associe la joie. Cœur brûlant de la promesse. Tout est affaire de cœur. Source de l’amour, de toutes les amours, des plus charnelles et érotiques, aux plus gratuites et charitables. Car ce cœur si personnel, si individuel, ne sait pas, ne peut pas, battre qu’à son unique profit. Son battement est diapason et métronome, à la recherche de l’accord parfait et du rythme universel.
À cœur perdu… Le cœur n’est rien sans le souffle. Invitation sans cesse renouvelée à la respiration du monde et l’aventure cosmique, sans laquelle ce cœur n’est rien qu’un muscle inutile. Mais pourquoi ? Pourquoi, toi qui vivais si fort, de battre ton cœur s’est-il arrêté ? Vous que j’aimais, j’entends toujours l’écho de votre cœur battant dans l’éternelle et fragile concorde qui nous lie. Cordialement, nous étions dans la joie. Joie dans les cœurs, je me souviens.