LES RACINES PROFONDES DE LA FRANC-MAÇONNERIE
La méthode initiatique de la Franc-maçonnerie est l’art de la construction, sitôt franchit la porte de son atelier le Franc-maçon observe la présence des outils déposés à même le sol. Lui qui ne sait ni lire ni écrire comprend quand dans cet espace tout est symbole. Toutes les idées qui sont derrière les symboles vont progressivement naître en lui après avoir observé en silence, il voudra comprendre, connaître et devra agir, c’est-à-dire construire se rendant compte avec le temps qu’il se construit lui-même, se métamorphose. En interprétant les mythes anciens et les légendes il y découvre les vertus qui pratiquées rendent l’homme un peu meilleur. Plus il élève sa conscience, plus son regard change sur le monde, au-delà de l’apparence et du visible, de ce que lui permet d’aborder sa Raison, il devient capable de concevoir l’invisible grâce à son intuition et son imagination, il conçoit l’infini et l’absolu sachant humblement qu’il est hors de sa portée. Mais cette simple contemplation met de la joie dans son cœur, il sait qu’il est sur le chemin de la Vérité et de la Lumière.
Toute son énergie se déploie pour construire avec ses frères le Temple de l’esprit, là où la matière cède peu à peu sa place à l’esprit, la lumière éternelle qui habite tout homme. L’obscurité de l’ignorance diminue peu à peu donc au profit de la lumière de la Connaissance, comme le disait à peu près Gaston Bachelard : en réfléchissant et en rêvant sur les symboles, on rêve sur ses rêves, l’esprit s’élève vers des constellations imaginaires le désir naît alors de percer les mystères de la vie.
Celui frappe à la porte d’un temple maçonnique, ne comprend pas toujours bien sa démarche lui-même, il pressent ou il a été pressenti par son parrain comme un chercheur, un demandeur prêt à recevoir. Il se soumettra de sa propre volonté aux épreuves initiatiques au terme desquelles il sera reconnu comme sincère et prêt à être fidèle et persévérant, il aura donc l’autorisation de passer pour connaître les mystères de la Franc-maçonnerie. Devenu myste lui-même, s’il garde en lui les secrets qui lui ont été confiés, s’il respecte le silence, plus tard il connaîtra la mort symbolique de la matière et renaîtra à la vie spirituelle. Prenant conscience de son horizontalité et de sa verticalité le myste partira à la recherche des sources et des traditions, des racines profondes de ce corpus initiatique lentement façonné ceux qui l’ont précédé des siècles avant. Comment peut-il y parvenir, parce qu’il est apte à recevoir les forces telluriques et célestes. Les pieds fermement posés dans la position requise suivant l’injonction qui lui ait faite il tourne son regard vers le centre de sa loge, il participe alors à une cosmogonie, il élève peu à peu son esprit puis son âme. Il s’interroge sur le principe de la création de toutes choses, sur ce Grand Architecte de l’Univers, sur cette théogonie mise en poème par Hésiode en Grèce huit siècle av -J.C, ce passage du chaos à l’ordre.
Celui qui a faim et soif de connaissance, va naturellement chercher qui il est, d’où il vient et où il va. Sur le plan historique l’origine de la Franc-maçonnerie est bien documentée à la fois dans sa forme opérative et celle que l’on appelle spéculative.
Sur le plan de ses sources spirituelles, traditionnelles, c’est plus diffus, on a affaire à des revendications multiples, l’on finit par conclure sans doute par commodité que ses sources sont nombreuses et proviennent de toutes les traditions occidentales et moyen orientales, cela ne froisse personne ! Cependant si l’on se livre à un travail sur les analogies entre les initiations, les symboles universels, l’ésotérisme des traditions anciennes, ce qui n’est visible qu’aux initiés, l’on discerne souvent trop de ressemblances pour que ce soit un hasard. Il y aurait un arbre commun, et des branches diverses mais nourries par des racines profondes, ce qui donne à la Franc-maçonnerie son caractère universel.
À la lumière d’un ouvrage de Bernadette Cappello, je vais m’interroger, aujourd’hui, sur une possible source de la pensée maçonnique qui serait née sur les bords d’un fleuve sacré le Nil. Les courants d’eau comme les courants telluriques (terre) et célestes (soleil et lune) irriguent la matière et dans un limon fertile (chemia), pénètre la force de l’esprit qui transforme la matière et anime l’âme.
Il est admis sans équivoque que la plupart des Rites maçonniques s’inspirent du symbolisme de la construction, Temple de Delphes et mystères d’Éleusis, Temple de Salomon et sa loi mosaïque, Temples de Mitrha, et Cathédrales qui couvrent l’occident et le Christianisme. Pourquoi pas dès lors faire référence aux Temples et constructions de l’Égypte ancienne. Nous rappelant que Moïse fût à la fois Juif et Égyptien, que de nombreux philosophes grecs comme Pythagore et les néoplatoniciens firent le voyage d’Alexandrie. Plotin fils de Romains est né en Égypte à Lycopolis, il fût initié aux mystères isiaques, ce n’est pas non plus par hasard que son œuvre principale fût nommée les Ennéades du nom des neuf divinités égyptiennes de la fondation de l’univers. Les exemples pourraient être multipliés, nombreux furent ceux qui passèrent dans la « marmite d’Alexandrie ». La rédaction de la septante, ensemble de livres de la bible hébraïque fût rédigée en grec mais sur les bords du Nil. La chrétienté primitive se développa aussi sur les bords du fleuve sacré, elle fût imprégnée par le juif Philon d’Alexandrie, religieux et philosophe sans doute le premier, à avoir prononcé le nom de Grand Architecte de l’Univers. Ses principales idées furent sa doctrine du logos et l’allégorisme. Si l’on rajoute l’hermétisme et son premier livre du corpus le poïmandres sans doute du à Hermès, il ne reste plus qu’à enfiler ses chaussures ailées pour se convaincre que c’est bien là que se trouve les racines profondes de toutes les traditions d’occident et du moyen orient. Les manuscrits Nag Hammadi viennent encore si besoin est abonder cette thèse. Pas étonnant que le jeune général français Bonaparte ait été impressionné par les pyramides et les temples égyptiens.
C’est là aussi donc que la Franc-maçonnerie du Rite de Memphis Misraïm puise sa symbolique et se répand en occident. Ce rite selon Bernadette Cappello : « Porte une intentionnalité, c’est-à-dire un projet de connaissance ». Soulignons que Bernadette Cappello fût grand Maître de la Grande Loge Féminine de Memphis Misraïm de 2006 à 2012, cette universitaire témoigne avec son approche éclairée de son Rite des liens entre l’ancienne Égypte et la bouillante marmite intellectuelle, philosophique et spirituelle de la cité d’Alexandrie. Peut-on aller jusqu’à imaginer que c’est des mystères de l’Égypte ancienne, que sont nés le miracle grec, les traditions juives et chrétiennes, qui allaient se répandre peu à peu en occident et imprégnerait aussi la Franc-maçonnerie.
Au-delà de la connaissance de son Rite B. Cappello dans son deuxième ouvrage : Mystère et secrets de la cérémonie de fondation d’une loge maçonnique. Grâce à sa grande culture Égyptienne, Hébraïque, Cabalistique, théologique chrétienne et philosophique nous donne accès, nous révèle un certain nombre d’analogies entre le temple antique Égyptien, l’église chrétienne et le Temple Maçonnique. Elle précise à propos de son rite : le Rite de Memphis Misraïm est dépositaire d’un patrimoine spirituel spécifique. Il introduit une filiation symbolique avec l’ancienne Égypte issue à la fois des mystères d’Aset-Isis divine mère et de l’hermétisme.
Or nous connaissons l’importance du corpus hermeticum texte simple qui illustre et démontre la jonction entre le ciel et la terre. Texte qui fût remis en valeur par l’Académie Néoplatonicienne de Florence créée par Cosme de Médicis et dirigée par Marsille Ficin (1433-1499) entouré de des savants de l’époque dont Pic de la Mirandole et Giordano Bruno dont il se dit qu’il pourrait être un des précurseurs de la Franc-maçonnerie dans sa forme contemporaine dite spéculative et qui allait naître en Écosse. Les textes de l’hermétisme alexandrin, enrichis par la découverte plus tardive des manuscrits de Nag- Hammadi écrits en copte et découverts sur les bords du Nil démontre l’importance la Gnose. B. Cappello, voit en creux dans son Rite de Memphis Misraïm la synthèse des traditions anciennes ou encore le lien entre ces traditions, ou leur regroupement en une sorte de tradition unique, universelle, primordiale disait René Guénon l’inclassable. Guénon qui n’hésita pas a tourner son regard de l’occident vers le moyen orient et l’orient, jusqu’aux états multiples de l’être.
Mais ne nous éloignons pas du Nil, l’Égypte serait fondatrice spirituelle supposée des traditions hébraïque et chrétienne et de la philosophie grecque. B.Cappello démontre les analogies à ce propos entre la construction des temples égyptiens et celui du Roi Salomon, voire des cathédrales : « Ces trois traditions véhiculent un point commun : celui de préparer ici-bas, et dans son sanctuaire intérieur, image du Temple cosmique, le retour à l’unité primitive, l’harmonie des premiers temps, ceux d’avant le temps. » Ce qui peut nous faire réfléchir et éclairer peut-être la formule maçonnique : « Il n’y a pas de temps. »
Maçons contemporains, nous discernons aussi l’importance essentielle du tracé du tableau de loge (de préférence avec une craie à la main), au moment de la sacralisation du temple. Devant nos yeux se construit un temple de pierre et simultanément en nous en silence notre Temple intérieur. Nous assistons, à l’élévation des colonnes, des marches de l’occident, jusqu’aux marches de l’orient pour accéder au sanctuaire et tournons notre regard vers la Lumière, la Grande Lumière unique et éternelle.
Peu importe la voie traditionnelle spirituelle choisie, elle a une dimension cosmique et spirituelle, elle est universelle, elle est le lien entre existence et essence.
Jean-François Guerry
Pour aller plus loin :
Lire : Bernadette Cappello Mystère et secrets de la cérémonie de fondation d’une loge maçonnique. Collection Quête spirituelle sous la direction de Joël Gregogna aux Éditions Numérilivre 211 pages illustrées- 25€
Notes pour réfléchir : Hermès dit Lactance à découvert, je ne sais comment, presque toute la Vérité.
Les livres d’Hermès sont un trait d’union entre les dogmes du passé et ceux de l’avenir.
Les prêtres égyptiens selon Platon auraient dit des Grecs : Ô Grecs, vous n’êtes que des enfants. Des vieux enfants aussi incapables de chercher la Vérité que de conquérir la justice.
Platon ne serait qu’un Moïse ?
Une stèle du Musée de Berlin dit Monsieur Mariette appelle le soleil le premier né, le fils de Dieu, le Verbe. Sur l’une des murailles du Temple de Philae… et sur la porte du Temple de Medinet-Abou on lit : « C’est le soleil, qui a fait tout ce qui est, et rien n’a été fait sans lui jamais. » Cela rappelle les paroles de Saint-Jean 14 siècles plus tard.
POIMANDRÈS
poimandrès Cette lumière, c’est moi, l’intelligence, ton Dieu, antérieur à la nature humide qui sort des ténèbres, et le Verbe lumineux de l’Intelligence, c’est le Fils de Dieu. Ils ne sont pas séparés, car l’union c’est leur vie. La parole de Dieu s’élança des éléments inférieurs vers la pure création de la nature, et s’unit à l’Intelligence créa- trice, car elle est de même essence (omooÚsioj). En la vie et la lumière consiste le père de toutes choses. Bientôt descendirent des ténèbres... qui se changèrent en une nature humide et trouble, et il en sortit un cri inarticulé qui semblait la voix de la lumière; une parole sainte descendit de la lumière sur la nature. Ce qui en toi voit et entend est le Verbe du Seigneur ; l’Intelli- gence est le Dieu père. Je crois en toi et te rends témoignage ; je marche dans la vie et la lumière, O Père, sois béni, l’homme qui t’appartient veut partager ta sainteté comme tu lui en as donné le pouvoir. |
saint jean Dans le principe était le Verbe, et le Verbe était avec Dieu, et le Verbe était Dieu. Il était dans le principe avec Dieu. Toutes choses sont nées par lui, et rien n’est né sans lui, de tout ce qui est né. En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes. La lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas contenue. C’est la lumière véritable qui illumine tout homme venant en ce monde. À ceux qui l’ont reçue elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom. |
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