« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent ». La coexistence est consubstantielle à la pensée humaine, qui ne peut distinguer une forme ou un concept que par rapport à un même ou à un différent, sans quoi n’existerait-elle pas. Tout entendement d’un principe passe par cette dynamique. Un exemple, dans la Kabbale hébraïque, la 1ère Sephirah, Kether, la couronne, qui coiffe et surplombe, représente une forme absolue de connaissance, transcendante par nature ; pour qu’elle puisse devenir visible à un entendement, un regard en miroir sera nécessaire à sa substantiation : ce sera la 2ème Sephirah, Hochmah, ou sagesse, cette qualité étant perçue ici comme une symétrie, plus précisément une mise en abyme philosophique, dont chaque mouvement se reflètera dans le suivant, indispensable à son appréhension. Si le symbolisme est le moteur de la franc-maçonnerie moderne, c ‘est qu’il est quelque part la science de la coexistence, car il n’existe que dans le cadre de la similarité de parties, de l’assemblage de constituants, du mimétisme des composants, ces parties étant, suivant le moment, ou bien jointes, ou bien disjointes ; et ce sera alors là toute cette dynamique alternative qui fera le sel du progrès. L’assemblage est le mécanisme par lequel on fait coexister les choses. Cet assemblage est la projection dans le tangible d’un ordonnancement qui nous donne à voir, par exemple, la loi maçonnique, censée prolonger chez l’humain la prégnance du Grand Architecte De L’Univers, mais aussi l’égrégore entre les FF, le déroulé déambulatoire, la gravité supplétive des outils. La coexistence est le bain nécessaire à cette dynamique qui fera de l’individualité une monade, c’est-à-dire un maillon, une brique au sein d’un tout.
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Le terme même de monade, créée et utilisée par Leibniz, permet de ne pas cantonner l’unité à un absolu, mais d’y voir déjà un système complexe, bien que de nature individuelle : cette technique de réflexion permettra, dès le nombre « 1 », de ne rien s’interdire, car le diable règne aussi dans la stagnation. La symbolique surfe donc en permanence sur la vague analogique. La symbolique est l’exercice conjoncturel d’une coexistence structurelle, elle la rappelle à tout moment, permettant à cet exercice de devenir une discipline qui aboutit à la substance, sorte de compromis entre conjoncture et structure. Leibniz parlera donc au sujet de la chose d’une monade : ce terme a l’avantage de laisser la place à 2 versants : d’une part une notion d’unité, de brique élémentaire, et donc d’absolu, et en même temps, celle d’un système, qui est par excellence constitué, de même nature que la dyade ou la triade, qui possèderait donc une vie propre, c’est-à-dire la reproduction en son sein d’un monde total. On pourrait voir cela comme une unité en devenir, simple mais tendant naturellement à la combinaison, à l’agrégation, à une complexification instantanée, qui serait la condition sine qua none de sa survie. D’où le terme de « coexistence », qui illustre magnifiquement ce continuum de la Nature dont parle Leibniz, où toute chose existe par sa singularité, mais en même temps, la condition de la survivance de cette individualité est une fusion douce et permanente, car « la nature ne fait pas de sauts ». Certains esprits retorqueront que le saut quantique existe, mais il ne s’agit selon moi que la vision erronée d’un continuum qui reste à découvrir. Car ce saut impliquerait à une particule, à être mobile par rapport au milieu où ce saut est censé avoir eu lieu : si l’on se réfère à l’unité structurelle de l’Univers, rien ne sort de ce cadre, ne serait-ce que temporairement, invalidant l’idée d’une sortie, puis d’une rentrée transitoire, et donc d’un saut. L’espace est paradoxalement la manifestation horizontale et physique de l’Ordre : il est un moindre mal, un pis-aller, un artéfact indépassable, qui nous ramène à tout moment à notre condition d’humain. C’est pourquoi on parle d’espace-temps ! Ce simple terme les combinant trahit du même coup les limites de notre intellect. L’espace et le temps, ne sont, selon moi, que les 2 versants d’une même notion, que nous ne pouvons pas aborder autrement. Ainsi l’ouverture et la fermeture des travaux seront-elles le miroir des limites informelles, et donc spatiotemporelles de la loge.
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« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent ». Ce qu’il y a de frappant dans cette citation, est que l’espace, que nous voyons donc volume, est défini par Leibniz comme un ordre et une coexistence. Alors bien sûr, nous pourrions nous dire que la tridimensionnalité s’appuie sur 3 mots, l’ordre, la chose et la coexistence de ces choses, en lieu des 3 axes que la géométrie définit. La différence est qu’en géométrie ces 3 axes semblent de même nature, recoupant chacun une dimension, alors que choses, ordre et coexistence constituent des monades, c’est-à-dire des éléments unitaires possédant néanmoins une vie propre la coexistence une adaptation des concepts d’analogie, de mimétisme et de dualité qui nous indiquent que rien n’est visible, si ce n’est au travers d’un autre, d’un même, et dans ce cas la coexistence cohabite avec l’existence et son biais discursif. Enfin, l’ordre va régir, selon des lois d’ordonnancement, cette matière en un ensemble cohérent pour l’esprit humain. Cet ordonnancement semblant par essence inhérent à un principe transcendant. Les choses présentes dans le temple seraient alors toujours, dans 1 1er temps, des monades, même si elles peuvent, ultérieurement se combiner en dyades, triades, etc… Le soleil, le carré noir du Pavé mosaïque ou un pilier sont d’abord à considérer comme existant par eux même. Ils vont devenir des symboles à partir du moment où nous irons à leur rencontre, eux même venant à la nôtre : ces 2 dynamiques se coupleront alors dans ce qu’on appelle un mécanisme symbolique, dans lequel aussi bien l’initié que l’objet de son intérêt ne s’appartiennent plus complètement, contribuant à élaborer ce que Leibniz appelle une substance. La substance est ce qui existe de telle sorte qu'aucune autre chose individuelle qu'elle-même ne lui est nécessaire pour exister : c’est ce que vit en fait l’initié au sein d’une tenue : son existence même est conditionnée au sein de cet espace, à sa relation avec ce qui l’entoure Pris en ce sens, le Temple n’est pas qu’un édifice matériel , ni même seulement un espace sacralisé le temps des travaux, il est avant tout la somme des relations qu’une personne sera susceptible d’établir avec ce qui l’entoure : comme dit Leibniz, les choses coexistent nécessairement, et la prise de conscience par l’initié de ces interrelations en fera maçonniquement un « commandeur »
L’ordre, tel que le conçoit Leibniz, dépend d’un maillage de « choses qui coexistent », allant dans le sens qu’il impulse, et qui est celui d’un continuum. Le présent est gros de l'avenir, et le futur ne peut se lire que dans le passé. La coexistence des choses transcende les choses elles-mêmes, c’est-à-dire que la nature desdites choses a sa réalité propre, mais c’est le lien qu’elles établissent avec tout le reste qui en détermine structure et portée : la vérité ne dépend donc pas de la teneur de ce qu’on affirme, mais de la capacité à articuler ces postulats. Pour ce faire, un continuum est indispensable, car il est le témoin autant que l’objectif de toutes ces interrelations. Et dans l’absolu et au bout du compte seul subsistera le lien “L'homme doit agir le plus possible car il doit exister le plus possible et l'existence est essentiellement action ». Cette action est de lier entre eux chaque constituant de la vie.
Mais l’on dira, écrit le philosophe, que « les maux sont grands et en grand nombre, en comparaison des biens » : peut-être se trompe-t-il, car ce n’est que le défaut d’attention qui diminue nos biens, et il faut bien que cette attention nous soit donnée par quelque mélange de maux…
Thierry DIDIER , le 05 AVRIL 2024
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent »
Leibniz
Cette citation appartient au philosophe Leibniz, qui avait l’immense qualité d’être polymathe, c’est-à-dire compétent dans de nombreux domaines, dont la philosophie, les mathématiques, la linguistique, le juridique, l’histoire, etc… Cette multiculture lui permit de pouvoir observer le monde sous différents angles, afin d’en tirer des conclusions dégagées le plus possible des contingences et des contraintes que pose inévitablement la pratique d’une seule discipline. Les limites que pose la réflexion lorsqu’on aborde un seul versant des choses ne correspondent pas à une volonté insidieuse du praticien, mais simplement à l’inclination naturelle que possède toute discipline de voir le monde du seul bout de sa lorgnette. C’est très humain, et il faut simplement l’avoir en permanence à l’idée. Je ferai de la citation de Leibniz une anaphore, afin d’en permanence m’y recentrer, m’y référer de façon presqu’obsessionnelle, d’en faire un cap idéel sur lequel forger mes convictions. Les citations sont toujours le fruit d’une longue réflexion, mais ne sont utiles que si le long travail intrinsèque de celui qui la produit en rend une ouverture lisible, dicible et surtout originale pour tout un chacun. La citation doit être une forme de condensé didactique apte à provoquer chez celui qui la lit, une appréhension nouvelle des choses, quel que soit la culture dudit lecteur. Pour cela, la citation doit être constituée de mots simples, donc ne pas conduire à une suffisance, une arrogance du style et de la syntaxe, qui deviendrait pour le coup castrateur, et surtout inutile pour celui qui la lit.
L’étude des citations constitue donc un outil irremplaçable pour nous maçons : elle peut être en cela initiatique, composant pour le franc-maçon un « produit momentanément fini », qui porte certes les limites de la réflexion de celui qui l’a produite, mais sans préjuger de ce que le regard neuf d’une tierce personne pourra y trouver. La citation peut être considérée comme le résultat alchimique d’un processus qui s’est déjà déroulé. Pourquoi alchimique ? Tout simplement parce que l’ordonnancement final de cette citation, en termes de mots choisis et de ce qui les relie, est apte, par mimétisme, à s’ajouter presque géométriquement au schéma de pensée de celui qui s’y penche.
« L’espace est l'ordre des choses qui coexistent ». Si cette sentence peut paraître hermétique au premier abord, elle recèle en fait tout une mécanique qui peut nous aider à comprendre et à approfondir le fait maçonnique dans son ensemble. L’espace, par exemple, tel que le définit Leibniz ici, ne s’apparente pas au volume préexistant de notre environnement, mais plus à une sorte de moment de vérité, de phénomène secondaire à l’installation d’un ordre général tel que le pressent le philosophe. Cet espace-là rappelle fortement celui de la loge, qui se constitue également progressivement lors, d’abord, de la disposition des éléments rituels, mais surtout lors de l’ouverture des travaux : cet endroit va se trouver momentanément consacré par le rituel. On dit en effet que l’espace de la loge est sacré, en particulier parce qu’il se trouve alors « coupé » du milieu extérieur profane : cette allégation n’est pas fausse mais incomplète, car c’est en fait l’ordre régnant, par les actes et les paroles, à l’intérieur de la loge, qui va constituer la tenue maçonnique. Le sacré devenant là, non le résultat d’une césure, d’un clivage, mais un différentiel entre un espace ordonné par une forme de liturgie, et un espace environnant qui suit, lui, l’ordre naturel des choses. Nous voyons bien là que la séparation entre loge et parvis dépend d’une différence de structuration entre 2 milieux. C’est pourquoi le terme de séparation et non de coupure est plus approprié ici. Quelle importance cela a-t-il ? Eh bien, cela permet en particulier de ne pas détacher en nous ce qui relève de la chair et de ce qui relève de l’Esprit, car consacrer un endroit appelle incidemment à considérer que cette mise à disposition n’est que temporaire, et que donc l’initiation, n’est, pour paraphraser un rituel, « permise qu’aux sages ».
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent. » Sur un plan purement mécaniste, le fait de voir dans un espace le produit d’un ordre perturbe considérablement notre vision géométrique des choses : nous avons déjà bien du mal à associer espace et temps, mais nous y arrivons quand même plus ou moins, en utilisant des concepts tels que la croissance en épaisseur, aussi banal qu’incontournable, ou que le « Big Bang », qui nous paraît découler de source, alors que sa réalité n’est audible qu’en faisant l’impasse intellectuelle de l’amont, de l’avant. Il me paraît ainsi très étonnant, et c’est là où le bât blesse, qu’on puisse circonscrire un objet appartenant à l’Univers proche (l’ordinateur devant moi, par exemple), mais qu’on soit dans l’impossibilité de définir les bornes extérieures de ce même Univers : un décalage ontologique existe. La franc-maçonnerie résout temporairement ce problème en dégageant un endroit rituel « délimité » par la concavité de la voûte étoilée, par les nœuds lâches et desserrés de la houppe dentelée, et par des perspectives géographiques (Nadir, Zenith, Occident, Orient, Septentrion, Midi), c’est-à-dire qu’on délimite un espace en utilisant, en lieu et place de l’inconcevabilité, un envisageable : c’est en cela que l’espace est un ordre, c’est-à-dire le produit d’une réflexion par essence limitative et carencée, qui devient pour le coup un « tout » théorique. En effet dans un univers non défini, les choses se propagent nécessairement suivant une ligne de fuite dont on ne perçoit que l’origine, et sont le témoin de cette vision parcellaire qui est la nôtre. Si nous percevions la complétude de l’univers, les choses ne s’y propageraient pas, mais seraient structurelles : c’est tout le secret d’une Échelle présente dans un des derniers degrés du Rite, et nous serions là à l’apothéose de ce que le REAA nous enseigne.
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent » Cette sentence est très dérangeante pour l’esprit, car elle est contre-intuitive, suggérant à demi-mots que l’espace, au sens large, n’est pas une réalité transcendante, mais secondaire à l’installation d’un ordre qui porte, lui, souvent à l’exercice d’une pensée rationnelle. Cette citation est en fait divisée en 2 parties : « l’espace est l’ordre... » en est la 1ère, « les choses qui coexistent… » en est la seconde. Leibniz était un grand penseur, et les appuis qu’il constitua à l’aide, à la fois, des sciences dures (mathématiques, logique) et molles (philosophie, théologie…n’est qu’un versant de sa réalité. Il possédait visiblement aussi une intuition presque poétique. L’intuition peut être très dangereuse lorsqu’on n’en sent pas l’évidence. C’est encore mieux si cette évidence s’appuie sur des données rationnelles. L’intuition ne plait pas aux apparatchiks ou aux moines-soldats, parce qu’elle leur fait peur, qu’elle les met face à leur médiocrité, car l’inconnu fait peur à celui qui est mal doté. Et justement une intuition bordée de toutes parts de raison, comme semble l’avoir fait Leibniz, lui garantit une bonne fin, c’est-à-dire une utilité pour ses semblables : Leibniz l’a bien compris, qui écrit : « On reconnaît une politique correcte à ce qu'elle est utile à soi-même ».
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent » Cette petite phrase, apparemment absconse, est en fait porteuse d’une réflexion qui sied parfaitement au cherchant initiatique qu’est le franc-maçon. Dans son ordonnancement, dans le choix des mots et dans sa syntaxe, elle sous-tend quelques principes chers à Leibniz, tels le principe de parcimonie, celui de continuité, de raison suffisante et d’une forme d’optimisation, que d ’aucuns qualifient à tort d’optimisme. Tous ces principes sont aussi, nous allons le voir, des points fondamentaux du Rite Écossais Ancien et Accepté. De plus, Leibniz ne s’abstint pas d’une gouvernance divine, qui pourrait trouver son pendant en franc-maçonnerie écossaise dans le Grand Architecte De L’Univers, sorte de déisme, c’est-à-dire de guidance par une architecture suprême et transcendante, qui serait à l’œuvre dans toute pensée et action maçonniques. Leibniz est un de ceux dont la pensée élaborée mêla à un haut degré de subtilité les mathématiques, la logique, le juridique, la philosophie au sens large, métaphysique et autre. Leibniz visait l’apothéose, en tentant de trouver un langage universel qui mêlerait l’ensemble des domaines qu’il explora, mais il n’y parvint pas. Leibniz est pour moi un précurseur de l’idée maçonnique contemporaine, en ce qu’il mêla à un très haut niveau les différentes disciplines précitées. La franc-maçonnerie est en effet l’expression non confessionnelle la plus spirituelle possible de la pensée humaine occidentale ; plus on mêlera d’approches diverses, plus sera-t-elle puissante, comme l’expression possible d’un ensemble d’occurrences, soit, différentes, mais allant dans un même sens, celui de la compréhension de l’univers.
En franc-maçonnerie, chaque degré, chaque ambiance, chaque tenue même, correspond à un monde possible, différent des autres mais aussi légitime que les autres : le théâtre d’un degré se manifeste ainsi à l’œil du récipiendaire comme une vision nouvelle aliénée à notre capacité évolutive et cumulative de comprendre. Cette intuition des mondes possibles recoupe certaines théories cosmologiques modernes, qui présupposent, sans pouvoir le prouver, l’existence d’une superposition infinie d’univers existants comme des strates concentriques. Dans l’Histoire contemporaine de Leibniz, celle de la seconde moitié du 17ème siècle fut particulièrement marquante avec, en toile de fond, une Europe à feu et à sang, et sur un plan idéel, l’expansion de la Rose+ Croix et de la Royal Society, sorte de ferments intellectuels de la future franc- maçonnerie moderne. Les rosicruciens, par exemple prétendaient déjà « parler toutes les langues ». Il s’agissait bien sûr d’une métaphore, allant ou bien dans le même sens syncrétique que Leibniz, ou bien dans l’expression de la mécanique symbolique, manière universelle d’appréhender tout ce qui compose l’univers. On peut effectivement imaginer qu’un mathématicien et un philosophe parlent le même langage. Car il existe finalement autant de doctrines philosophiques que de postulats mathématiques qui peuvent s’invalider, se surajouter, se succéder ou se compléter. Il s’agira alors d’explorer par des voies différentes une même réalité. L’idée est non seulement séduisante, mais également tout à fait concevable dans l’esprit, puisque toute connaissance humaine est une facette d’un tout universel. Et qu’une source, une cause existent nécessairement en amont de toute spécialisation.
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent » : cette phrase est, sur le plan syntaxique ce qu’on appelle une inférence. Une inférence est un mouvement de la pensée qui permet de passer d'une ou plusieurs assertions, appelés prémisses, ici ordre, choses et coexistence, à une nouvelle assertion qui en est la conclusion, ici l’espace. La sensation d’espace n’est en effet perceptible que si des choses y sont présentes. On peut imaginer et parler de l’espace, mais celui-ci n’est perceptible que par rapport aux limites qui le circonscrivent : si on imagine l’espace, on est obligé de le cerner, intellectuellement comme physiquement, afin de lui donner une consistance, une « substance » comme l’aurait dit Leibniz. En franc-maçonnerie écossaise, l’inférence majeure est la pensée ternaire. L’inférence est d’autant plus efficace qu’elle est associée au principe de parcimonie, ou rasoir d’Ockham : elle permet de ne raisonner qu’avec des mots simples. La dimension maçonnique du nombre 3 obéit à ce principe de parcimonie, qui bien sur limite l’usage à ce qui est nécessaire, sans toutefois se priver d’une dimension : par exemple, la pensée dualiste s’interdit tout un pan de la connaissance, sauf à être utilisée dans un cadre initiatique, où le myste constituera alors le 3ème terme. C’est tout le principe de l’alchimie, dans lequel l’opérant applique une vision discursive à un évènement quelconque, afin de le comprendre et de l’impliquer, pour ensuite accepter un « retour d’expériences » que serait l’effet qu’il provoque chez ledit opérant. C’est pourquoi les dynamiques symboliques sont souvent portées en franc-maçonnerie par des formes duales (luminaires, pavé mosaïque, colonnes, outils (qui ne connaissent que 2 positions, action et repos), qui offrent à la réflexion du maçon de devenir le tiers inclus indispensable, c’est-à-dire la 3ème composante.
Cette approche permet de limiter au maximum les digressions inutiles, qui complexifieraient une pensée qui n’en a pas besoin. Ce principe de parcimonie est extrêmement exigeant, parce qu’il oblige à chercher avec le minimum de supports possibles. Il ne s’agit pas ici de déterminer une vérité universelle, mais de définir une méthode la plus épurée possible. A bien y regarder, l’apprentissage maçonnique est à l’aune de ce principe : les gestes sont codifiés, simples et mesurés, la déambulation faite de lignes et d’angles, la symbolique est une construction en miroir, où sujet et objet ne tolèrent aucune ingérence qui en polluerait le message, le rituel ne se fend pas de mots inutiles, les sentences sont frappées au coin du « bon sens », même si ce qualificatif est sujet à caution. En franc-maçonnerie, en loge symbolique, le principe de parcimonie est en permanence utilisé, au travers donc de l’usage d’outils symboliques : ceux-ci sont des supplétifs de la main et de l’intellect humain, car seul le mouvement, physique ou mental qu’on leur applique sera porteur de réflexion et d’action. Le principe de parcimonie est partout présent en franc-maçonnerie : « l’analogie est l’unique clé de la nature » cet adage alchimique rend au mieux compte de cette simplicité, confrontée à un minimum d’intervenants, soi-même et la chose en regard. Enfin, d’une façon générale, l’initié est soumis en loge à la Nature. Il ne s’agit pas là uniquement des fleurs et des petits oiseaux, mais plus globalement ce que la Nature donne à voir dans sa dimension cosmogonique et cosmologique (directions, perspectives, rythme et durée…), c’est-à-dire dans le strict besoin de sa construction. L’analogie associe dans un même élan le principe de parcimonie, d’inférence, et de respect de la mesure, c’est-à-dire la raison : une seule mécanique répond à ces 3 occurrences : la symbolique. Il est vrai que son usage est récent, et ne concerna pas la pensée des maçons du 18ème et 19ème siècle. On pourrait donc penser qu’elle n’est pas forcément nécessaire à l’exercice initiatique : certains rites progressistes le pensent d’ailleurs toujours aujourd’hui. Cela dit, comment se démarquer, dans l’initiatique, d’une pensée qu’on rencontre déjà partout dans le monde profane, celle de la simple cause et de l’effet ? Cette relation est bien sur nécessaire, mais insuffisante : Leibniz nous dit « Tout va par degré dans la nature, et rien par saut, et cette règle à l'égard des changements est une partie de ma loi de la continuité. » C’est pourquoi en franc-maçonnerie sont utilisés en priorité les nombres simples : ils sont porteurs d’une vérité non divisible, c’est-à-dire principielle. Les nombres complexes (à partir de 10) ne sont jamais que la synthèse entre des principes déjà véhiculés par les nombres simples, et l’apport d’une culture jamais inutile, mais dont le maniement réclamera la maitrise totale de la base : c’est pourquoi les tenants du degré le plus élevé pratiqué en loge symbolique sont appelés des maîtres.
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent » : ce qu’il y a de très parlant dans cette phrase, est ce principe d’égalité entre d’une part l’espace, qu’on définit intuitivement comme un volume, et d’autre part 3 concepts autonomes, ordre, choses et coexistence, qui pour autant sont liés par un point de jonction, qui va leur permettre de se combiner. En effet, dit comme ça, qui peut penser qu’« ordonner un absolu multiple » puisse nous amener intellectuellement à y voir un volume ? C’est a priori proprement impossible, parce que les dimensions que nous sommes supposées imaginer sont indépendantes : seul notre entendement d’humain permet d’y voir des liens, Cette transcendance semble empêcher toute digression à une dimension supplémentaire, puisque l’ordre tel qu’il est formulé provient déjà de ce que Leibniz appelait le Divin, mettant un terme à une spiritualité encore plus élevée. Ce qu’il y a de singulier avec l’espace est qu’il se définit, pour être entendable, avec des limites, qu’il est borné, entre 2 ères, 2 battements,2 lettres, sauf dans son acception d’espace universel, qui apparaît alors un peu comme une aporie : cette aporie fragilise la compréhension de cette notion, mais en même temps oblige à s’y référer, et donc à relativiser. Nous retrouvons là l’aporie de la quadrature du cercle ( 5ème degré) et celle d’un heptagone qu’on voudrait régulier ( 17ème degré) Si l’on y regarde de plus près l’espace, comme l’ordre ou la chose ne sont pas palpables : c’est leur incidence dans le tangible qui est perçue : le concept de substance, cher aussi à Leibniz, recouvre bien ces 3 termes. Pour Spinoza, n'existe qu'une seule substance (définie comme « ce qui est en soi et est conçu par soi ») : Dieu, la pensée et l'étendue n'étant pour lui que des attributs, parmi d'autres possibles, de cette substance. La vision de Leibniz est complémentaire, dans cette volonté d’articuler des occurrences, pour en réaliser seulement ensuite un tout. Ces 2 visions s’entendent et me semblent complémentaires. La conception leibnizienne de « raison suffisante » trouve, elle, son expression scientifique dans ce que les astronomes appellent, nous y reviendrons plus tard, « le réglage fin de l’univers », c’est-à-dire l’équilibre et la finalité la plus adaptée que semble posséder l’Univers dans lequel on baigne. Cependant, sur le plan théologique, Leibniz y ajouta le concept de théodicée ontologique, qui veut que ce que nous percevons de l’univers n’est pas exempt de défauts, car sinon l’univers serait Dieu lui-même, invisible car transcendant dans son essence. Je trouve cette théorie extrêmement séduisante, quand bien même les gnostiques verraient dans ces défauts une expression possible du mal, du malheur et de la misère inséparables de la condition humaine. Cette notion de « défauts » est à prendre au sens large, à la façon de ce qui résulte de la chute adamique, c’est-à-dire une somme infinie de « détails » qui rend immanente notre existence : les défauts pourraient être ce qu’on appelle en franc-maçonnerie les « métaux », c’est-à-dire des propriétés consubstantielles, des supports irremplaçables permettant la continuation de la vie dans ses joies mais aussi ses désagréments. Ces métaux sont cités dans la cérémonie d’initiation au 1er degré, mais uniquement sur un plan moral, limités alors aux passions tristes qui habitent l’humain. En fait, si l’Univers est appréhendable pour nous humains c’est qu’il comporte des défauts, qui accrochent l’entendement et permettent justement à l’œil et à l’intellect humain de voir ses dissonances, l’humain étant par principe dissonant lui-même, comme le prouve sa vision toujours binaire de l’existence.
C’est aussi un peu le mantra du jeune normalien Nathan Devers, qui nous explique fort habilement que « philosopher, c’est penser contre soi-même ». Ces métaux sont au contraire les jalons qui permettent à la pensée de ne pas se perdre dans les méandres d’une bienséance lénifiante, portée comme les canons d’une quelconque orthodoxie. Les « défauts » leibniziens, et donc les métaux maçonniques sont les viatiques et les témoins vivants de l’existence profane : c’est pourquoi on les laisse à la porte du temple lorsqu’on y entre, puis on les reprend en quittant ledit temple. Cet acte est vécu exotériquement comme une façon de se dépouiller, dans l’espace sacré de la loge, de vices et de comportements vécus moralement comme un joug ou un fardeau : hubris, concupiscence excessive, avarice et autres travers qui alourdiraient et freineraient alors notre capacité à nous améliorer, bref, tout ce que la morale judéo-chrétienne condamne. Cette approche est néanmoins incomplète, car ésotériquement, il s’agira aussi pour l’initié de se départir temporairement desdits métaux, à la façon dont on construit pas à pas une expérience, en faisant varier des paramètres qui représentent également ce qui a servi à construire l’homme profane avant son entrée dans le temple. L’espace sacré auquel nous faisons référence pourra alors être entendu comme un modèle expérimental, retranché un temps de la vie commune et de ce qui la caractérise. Toute expérience est par essence renouvelable, mais aussi susceptible d’être modifiée, par la variabilité de ses acteurs : or l’homme représente par lui-même un ensemble cohérent de caractéristiques mobiles, qui instilleront dans ce milieu sacré des mouvements contribuant à son évolution. L’homme, dans son immense imperfection, constituera là l’électron libre ou le « facteur X » du sacré. Pour en revenir au principe leibnizien de « raison suffisante », certains astrophysiciens en transposent le sens dans ce qu’ils nomment le « réglage fin de l’univers », c’est à dire la conséquence de la succession d’un nombre presqu’infini de paramètres qui ont contribué à l’émergence de l’univers tel que nous l’observons aujourd’hui, qui est donc viable car existant. Le qualifier de « réglage fin » n’est pas en soi une erreur, mais il peut sous-entendre que nous sommes partis d’une masse informe, et qu’un « régleur » existe : ce sera le point de vue du théiste ou du déiste. Mais si on prend l’univers aujourd’hui, on peut aussi y voir l’avènement d’un monde qui serait le seul héritier d’un nombre incommensurable de tentatives, nombre qui, confronté à cette sélection infinie, n’aurait abouti qu’à un seul univers, celui que l’on connait, et qui pourrait aussi être le produit du hasard, sans conscience supérieure... On peut aussi considérer que le réglage en lui-même est déjà une architecture suprême, guidant un principe déiste tel que le Grand Architecte De L’Univers. Certains pensent même que nous serions les seuls êtres de cet Univers connu ; cela va à l’encontre des théories probabilistes, mais jusqu’à preuve du contraire, on ne peut pas complètement écarter cette possibilité. Nous rejoignons alors le principe de raison suffisante de Leibniz, qu’on peut voir comme la somme infinie des raisons particulières parmi lesquelles ne subsiste qu’une possibilité, celle ayant abouti à notre monde d’aujourd’hui.
Les croyants vont partir de maintenant, et y voir l’incroyable addition de facteurs ne pouvant provenir que d’une entité divine. Les non croyants partiront au contraire d’un potentiel de facettes possibles infinies, qui, soumis au tamis du hasard des circonstances, aboutiraient à cette forme contemporaine. Quelque part, l’espace sacré de la loge est aussi, en ce qu’il représente l’Univers, le produit de cette raison suffisante, car aucun des éléments qui le composent n’est au final inutile ou superflu, formant un tout à la fois stable et cohérent, dans la stricte observance de la durée et du contenu des travaux. De plus, la Tradition qui porte notre ordre est un véritable « niveau d’Achab », c’est-à-dire qu’elle crée et détruit en permanence. Il s’agira donc ici aussi d’un « réglage fin », opéré pas à pas, produisant un milieu équilibré, c’est-à-dire durable mais qui reste néanmoins soumis à une progressivité permanente qui provient bien sûr de la personnalité des maçons qui s’y intègrent. Leibniz définit la raison suffisante par cet axiome : « Il faut changer le moins possible, il faut choisir le milieu entre les contraires, il faut compenser toute soustraction par une addition. » Cette sentence un peu sommaire explicite néanmoins très bien que toute chose soumise à la flèche du temps et de l’espace se doit pour rester dans la course de la réalité, d’épouser des remaniements et donc une forme de continuité dans le changement. Si la franc maçonnerie est efficiente, c’est justement qu’elle optimise en permanence les situations possibles ; le principe de parcimonie devient alors l’à-côté indispensable à une optimisation. Le sacré correspond à cette optimisation du milieu : on a coutume de se concentrer sur le caractère clivé et en retrait de cet espace sacré par rapport au monde profane, mais il s’agit là d’une conséquence, et non d’une cause. Cela dit la liturgie maçonnique se doit de borner cet espace sacré, pour 2 raisons : 1°) parce que Rite et rituel sont des modes opératoires, et se doivent donc de préexister à ce qu’ils induisent, en l’occurrence une forme de sacralisation, et 2°) parce que ce modus operandi s’adresse à tout un chacun, sans distinction de niveaux, cela impliquant un processus simple et efficace : ce seront l’ouverture et la fermeture des travaux. Ce sacré diffère surtout du profane par une organisation perfectionnée qui en est la signature : tout ce qui s’y trouve est optimisé par le rite et le rituel, qui ne sont pas seulement des biais, mais aussi des leviers les plus adaptés possibles aux circonstances qui s’y déroulent. Ce terme de travail doit être entendu dans ses acceptions diverses, à savoir, faire avec une discipline, un code, mais aussi sous son aspect obstétrical, qui amènera à accoucher d’une idée, en partant d’un domaine, pour aboutir à une autre domaine, un peu comme le nouveau-né passe du milieu utérin au milieu extérieur. Le travail est une action qui réclame donc un continuum : « La Nature ne fait pas de sauts » nous dit Leibniz. Nous allons en reparler.
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent ». La coexistence est consubstantielle à la pensée humaine, qui ne peut distinguer une forme ou un concept que par rapport à un même ou à un différent, sans quoi n’existerait-elle pas. Tout entendement d’un principe passe par cette dynamique. Un exemple, dans la Kabbale hébraïque, la 1ère Sephirah, Kether, la couronne, qui coiffe et surplombe, représente une forme absolue de connaissance, transcendante par nature ; pour qu’elle puisse devenir visible à un entendement, un regard en miroir sera nécessaire à sa substantiation : ce sera la 2ème Sephirah, Hochmah, ou sagesse, cette qualité étant perçue ici comme une symétrie, plus précisément une mise en abyme philosophique, dont chaque mouvement se reflètera dans le suivant, indispensable à son appréhension. Si le symbolisme est le moteur de la franc-maçonnerie moderne, c ‘est qu’il est quelque part la science de la coexistence, car il n’existe que dans le cadre de la similarité de parties, de l’assemblage de constituants, du mimétisme des composants, ces parties étant, suivant le moment, ou bien jointes, ou bien disjointes ; et ce sera alors là toute cette dynamique alternative qui fera le sel du progrès. L’assemblage est le mécanisme par lequel on fait coexister les choses. Cet assemblage est la projection dans le tangible d’un ordonnancement qui nous donne à voir, par exemple, la loi maçonnique, censée prolonger chez l’humain la prégnance du Grand Architecte De L’Univers, mais aussi l’égrégore entre les FF, le déroulé déambulatoire, la gravité supplétive des outils. La coexistence est le bain nécessaire à cette dynamique qui fera de l’individualité une monade, c’est-à-dire un maillon, une brique au sein d’un tout.
Le terme même de monade, créée et utilisée par Leibniz, permet de ne pas cantonner l’unité à un absolu, mais d’y voir déjà un système complexe, bien que de nature individuelle : cette technique de réflexion permettra, dès le nombre « 1 », de ne rien s’interdire, car le diable règne aussi dans la stagnation. La symbolique surfe donc en permanence sur la vague analogique. La symbolique est l’exercice conjoncturel d’une coexistence structurelle, elle la rappelle à tout moment, permettant à cet exercice de devenir une discipline qui aboutit à la substance, sorte de compromis entre conjoncture et structure. Leibniz parlera donc au sujet de la chose d’une monade : ce terme a l’avantage de laisser la place à 2 versants : d’une part une notion d’unité, de brique élémentaire, et donc d’absolu, et en même temps, celle d’un système, qui est par excellence constitué, de même nature que la dyade ou la triade, qui possèderait donc une vie propre, c’est-à-dire la reproduction en son sein d’un monde total. On pourrait voir cela comme une unité en devenir, simple mais tendant naturellement à la combinaison, à l’agrégation, à une complexification instantanée, qui serait la condition sine qua none de sa survie. D’où le terme de « coexistence », qui illustre magnifiquement ce continuum de la Nature dont parle Leibniz, où toute chose existe par sa singularité, mais en même temps, la condition de la survivance de cette individualité est une fusion douce et permanente, car « la nature ne fait pas de sauts ». Certains esprits retorqueront que le saut quantique existe, mais il ne s’agit selon moi que la vision erronée d’un continuum qui reste à découvrir. Car ce saut impliquerait à une particule, à être mobile par rapport au milieu où ce saut est censé avoir eu lieu : si l’on se réfère à l’unité structurelle de l’Univers, rien ne sort de ce cadre, ne serait-ce que temporairement, invalidant l’idée d’une sortie, puis d’une rentrée transitoire, et donc d’un saut. L’espace est paradoxalement la manifestation horizontale et physique de l’Ordre : il est un moindre mal, un pis-aller, un artéfact indépassable, qui nous ramène à tout moment à notre condition d’humain. C’est pourquoi on parle d’espace-temps ! Ce simple terme les combinant trahit du même coup les limites de notre intellect. L’espace et le temps, ne sont, selon moi, que les 2 versants d’une même notion, que nous ne pouvons pas aborder autrement. Ainsi l’ouverture et la fermeture des travaux seront-elles le miroir des limites informelles, et donc spatiotemporelles de la loge.
« L'espace est l'ordre des choses qui coexistent ». Ce qu’il y a de frappant dans cette citation, est que l’espace, que nous voyons donc volume, est défini par Leibniz comme un ordre et une coexistence. Alors bien sûr, nous pourrions nous dire que la tridimensionnalité s’appuie sur 3 mots, l’ordre, la chose et la coexistence de ces choses, en lieu des 3 axes que la géométrie définit. La différence est qu’en géométrie ces 3 axes semblent de même nature, recoupant chacun une dimension, alors que choses, ordre et coexistence constituent des monades, c’est-à-dire des éléments unitaires possédant néanmoins une vie propre la coexistence une adaptation des concepts d’analogie, de mimétisme et de dualité qui nous indiquent que rien n’est visible, si ce n’est au travers d’un autre, d’un même, et dans ce cas la coexistence cohabite avec l’existence et son biais discursif. Enfin, l’ordre va régir, selon des lois d’ordonnancement, cette matière en un ensemble cohérent pour l’esprit humain. Cet ordonnancement semblant par essence inhérent à un principe transcendant. Les choses présentes dans le temple seraient alors toujours, dans 1 1er temps, des monades, même si elles peuvent, ultérieurement se combiner en dyades, triades, etc… Le soleil, le carré noir du Pavé mosaïque ou un pilier sont d’abord à considérer comme existant par eux même. Ils vont devenir des symboles à partir du moment où nous irons à leur rencontre, eux même venant à la nôtre : ces 2 dynamiques se coupleront alors dans ce qu’on appelle un mécanisme symbolique, dans lequel aussi bien l’initié que l’objet de son intérêt ne s’appartiennent plus complètement, contribuant à élaborer ce que Leibniz appelle une substance. La substance est ce qui existe de telle sorte qu'aucune autre chose individuelle qu'elle-même ne lui est nécessaire pour exister : c’est ce que vit en fait l’initié au sein d’une tenue : son existence même est conditionnée au sein de cet espace, à sa relation avec ce qui l’entoure Pris en ce sens, le Temple n’est pas qu’un édifice matériel , ni même seulement un espace sacralisé le temps des travaux, il est avant tout la somme des relations qu’une personne sera susceptible d’établir avec ce qui l’entoure : comme dit Leibniz, les choses coexistent nécessairement, et la prise de conscience par l’initié de ces interrelations en fera maçonniquement un « commandeur »
L’ordre, tel que le conçoit Leibniz, dépend d’un maillage de « choses qui coexistent », allant dans le sens qu’il impulse, et qui est celui d’un continuum. Le présent est gros de l'avenir, et le futur ne peut se lire que dans le passé. La coexistence des choses transcende les choses elles-mêmes, c’est-à-dire que la nature desdites choses a sa réalité propre, mais c’est le lien qu’elles établissent avec tout le reste qui en détermine structure et portée : la vérité ne dépend donc pas de la teneur de ce qu’on affirme, mais de la capacité à articuler ces postulats. Pour ce faire, un continuum est indispensable, car il est le témoin autant que l’objectif de toutes ces interrelations. Et dans l’absolu et au bout du compte seul subsistera le lien “L'homme doit agir le plus possible car il doit exister le plus possible et l'existence est essentiellement action ». Cette action est de lier entre eux chaque constituant de la vie.
Mais l’on dira, écrit le philosophe, que « les maux sont grands et en grand nombre, en comparaison des biens » : peut-être se trompe-t-il, car ce n’est que le défaut d’attention qui diminue nos biens, et il faut bien que cette attention nous soit donnée par quelque mélange de maux…
Thierry DIDIER , le 05 AVRIL 2024
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