LA FRATERNITÉ À L’ÉPREUVE
La Franc-maçonnerie telle que pratiquée en Grande Loge de France et dans beaucoup d’obédiences. Associe et confond spiritualité et humanisme pratique individuelle dans un cadre collectif, comme des regards convergents dans la même direction, des milliers de petites lumières rassemblées dans un prisme et qui se diffusent ensuite dans le monde. Ces lumières si faibles soient-elles, sont à l’image de l’humble colibri, qui sans cesse œuvre à la réalisation d’une utopie dans laquelle il discerne la réalité d’un demain plus juste, plus beau, plus vrai, meilleur. Le Franc-maçon par sa démarche, active, volontaire élève sa dignité et celle de ses Frères humains, sans vanité à hauteur d’homme. Ainsi se construit, brique après brique une société plus belle, plus tolérante, une société faite de pierres vivantes et actives. Sans cela, la Franc-maçonnerie, ne serait qu’un cénacle ou sont entendues des spéculations intellectuelles, une compilation imparfaite de savoirs temporaires, propices à favoriser les egos de quelques-uns. Il ne s’agit pas de remettre en cause l’utilité des savoirs, des sciences, des progrès qui soulagent l’homme dans ses tâches les plus pénibles. Les symboles et leurs outils, ne vivent que par les idées qu’ils génèrent, ils sont des instruments de la construction, favorisent par les idées qu’ils dissimulent, le passage du visible à l’invisible. Ils donnent accès au feu intérieur de l’esprit qui anime l’âme.
Dans l’initiation maçonnique, comme dans les autres, il y a des passages, des parcours, des chemins. Le Franc-maçon marche à l’horizontal, puis en se perfectionnant il aspire à connaître les plus hautes sphères de la spiritualité. Son regard change, se convertit progressivement, plus que de voir, il regarde le monde et les autres, l’autre, son visage et partage avec lui. C’est par le corps, l’extériorité qu’il affronte l’autre, devient responsable de l’autre, c’est une épreuve qui lui permettra l’accès au meilleur qui est en lui. Extériorité et intériorité pour une réalisation d’unité, son regard se tourne de plus en plus vers plus haut que lui. Il n’est cependant pas un mystique ou un anachorète, sa réalisation spirituelle et humaine se réalise pour son profit personnel et celui des ses Frères, des autres. Plus il s’élève, plus se rapproche des autres, plus il fait alliance avec les autres, après avoir fait alliance avec le principe. L’épreuve de la Fraternité est peut-être la plus difficile, l’amour de l’autre avec ses qualités, sa proximité est assez facile. Dès que l’autre nous montre, ses défauts, ses imperfections, ses parts d’ombre, son éloignement l’épreuve est plus dure, elle devient une responsabilité, un devoir. Admettre que nous sommes le gardien de notre Frère, de nos Frères, sans fuir et chercher un quelconque bouc-émissaire, faire preuve de tolérance sans tomber dans l’indifférence est une épreuve. Ceux qui parviennent à franchir cette épreuve, sont reconnus comme justes, ce sont des praticiens de la Fraternité, souvent de grands initiés, comme Jean par exemple qui nous recommande de « faire en actes pas en paroles », Socrate, Confucius … et le plus humble de tous.
Quelques réflexions sur la spiritualité, qui n’est pas opposable à la Fraternité. La spiritualité est souvent associée à la religion, à une religion, elle devient alors une dévotion et souvent par conséquence une contemplation. Elle serait dans ce cas : « Tout ce qui a rapport aux exercices intérieurs d’une âme dégagée des sens, qui ne cherche qu’à se perfectionner aux yeux de Dieu. » Transformer la matière en esprit, et non faire pénétrer l’esprit dans la matière pour l’améliorer. Chateaubriand a vu dans le Génie du Christianisme cette faculté de transformation du but de la spiritualité en amour de l’autre, en loi d’amour. En élevant la vertu d’Amour au premier rang des vertus, le christianisme a fait de l’Amour fraternel une valeur universelle, valeur reprise dans la plupart des traditions initiatiques. La spiritualité devient alors inséparable de l’amour et de la Fraternité. Peu importe le principe, la polysémie du mot, il y a un rassemblement dans l’unité. Les dieux, le Dieu, le soleil, le feu, l’esprit, la parole, la vérité même. Il y a deux princes souverains l’un temporel et l’autre spirituel ensemble ils ne font qu’un. L’homme perd son temps en voulant les séparer, se séparer d’eux, l’alliance entre le temporel et le spirituel, permet l’action dans le monde. Jusqu’au seuil de l’Orient éternel, l’homme ne peut vivre en séparant le corps de l’esprit, la foi et la raison, l’Amour du principe et l’Amour de l’homme. Foi et Raison sont les deux ailes de l’espérance. Jusqu’au moment où la chair quittera mes os, je serais fait de corps et d’esprit. J’aurais peut-être insensiblement fait penché, un peu, un tout petit peu la balance qui pèsera mon âme vers l’esprit plus que la matière avant de franchir le fleuve.
De La Fraternité elle est en nous, elle est nous, faisons en sorte qu’elle le soit toujours. Parce qu’elle est à la fois le ferment et le ciment de l’humanité, le ciment de l’union entre les hommes. Elle concrétise cette union, comme la spiritualité elle est, elle n’a pas besoin d’adjectif, elle n’est ni religieuse, ni laïque, ni blanche, ni noire, elle est universelle. Tout autre formulation entrainerait son amoindrissement, en ferais une solidarité de groupe ou de circonstance. Les Francs-maçons l’ont bien compris, en faisant le ciment de leur institution. Ce ciment des pierres vivantes que nous sommes, sans elle nous ne serions que des pierres sèches, séparées, tremblantes, soumises à tous les vents, prêtes à s’écrouler sans le soutien des autres. La Fraternité, serait-ce cette tension permanente qui nous relie à plus haut que nous, à l’amour inconditionnel de l’autre différent de nous et le même à la fois. Elle est le levier de la morale la plus élevée. Cette morale aujourd’hui aussi à l’épreuve, comme l’écrivait E. Levinas dans Totalité et infini son essai sur l’extériorité, cette morale donc : « dont il importe au plus haut point de savoir si l’on n’est pas dupe de la morale. La lucidité - ouverture de l’esprit sur le vrai – ne consiste-t-elle pas à entrevoir la possibilité permanente de la guerre ? » Force est de constater, que les faits de notre actualité font plus que d’entrevoir, ils affirment cette possibilité, la concrétise. Il rajoutait : « l’état de guerre suspend la morale. » J’abonderais, comme le manque de Fraternité suspend l’amour entre les hommes. Cet état de guerre : « dépouille les institutions et les obligations éternelles de leur éternité et, dès lors, annule, dans le provisoire, les inconditionnels impératifs. Il projette (l’état de guerre) d’avance son ombre sur les actes des hommes. La guerre ne se range pas seulement -comme la plus grande- parmi les épreuves dont vit la morale. Elle la rend dérisoire. »
Je dirais par une analogie, que je concède exagérée, que les performances intellectuelles, les exercices intellectuels d’information, s’ils ne sont enrichis par des exercices spirituels de formation et d’application nécessaires à l’élévation de l’homme, de ses états de conscience, s’ils ne sont pas soumis sans cesse à l’épreuve de la Fraternité. Ils sont alors comme les ricochets de ces pierres plates, incapables de pénétrer dans la profondeur de notre intérieur et de participer à sa construction et son élévation. Les savoirs appréhendés par notre intellect fussent t’ils immenses, s’ils ne cherchent pas le chemin de notre cœur s’ils ne frappent pas à sa porte, ils résonnent alors comme des cymbales sans but, incapables de pénétrer dans notre cœur, ils ne servent à rien. La spiritualité ne peut vivre qu’en symbiose avec la Fraternité. Nous serions donc inconséquents à vouloir les opposer. La joie ne pourrait pas alors être dans nos cœurs, et nous ne pourrions pas transmettre au dehors les vertus approchées expérimentés dans nos loges et parmi celles-ci l’Amour Fraternel, la plus sublime d’entre elles.
Je dédie ces quelques lignes à toutes les Sœurs et les Frères et en particulier à mon Frère F. D en le remerciant pour la grandeur de sa Fraternité en actes pas seulement en paroles.
Jean-François Guerry.
ABONNEZ-VOUS EN DÉPOSANT UNE ADRESSE MAIL DANS LA FENÈTRE S’INSCRIRE A LA NEWSLETTER. (Gratuit)
Pour les Abonnés : Il est possible de recevoir gratuitement les textes des articles au format Word en écrivant à l’adresse suivante :
Info : le blog respecte la loi RGPD
www.lafrancmaconnerieaucoeur.com
DÉSABONNEMENT SUR SIMPLE DEMANDE SUR LE SITE OU À L’ADRESSE MAIL : courrierlafmaucoeur@gmail.com
Astuce : cliquez sur les images pour les aggrandir.
FAITES CONNAÎTRE LE BLOG À VOS AMIS.