Publié le 14 Février 2024 par Jean-François GUERRY

LUMIÈRE DE L’HOMME, LUMIÈRE DU CIEL ÉTOILÉ.

Le sublime chez Kant

LUMIÈRE DE L’HOMME, LUMIÈRE DU CIEL ÉTOILÉ.

Königsberg Prusse, le 22 avril 1724 il y a 300 ans, quelques années après la naissance de la Franc-maçonnerie spéculative naissait Emmanuel Kant. Il allait devenir un des penseurs emblématiques des Lumières. Mais, il allait aussi révolutionner la pensée philosophique. Il parlait de Liberté, d’immortalité de l’âme, de l’existence de Dieu comme être moral, mais non nécessairement comme juge entre le bien et le mal, mais comme capable d’assurer une synthèse de la Vertu et du Bonheur. Kant philosophe de la Raison, mais aussi capable de critiquer celle-ci. Il concédait que la Raison ne pouvait tout résoudre, répondre à toutes les questions n’en déplaise aux scientistes ! La Raison demeure néanmoins pour lui un impératif catégorique bien distinct de la Foi. La Raison touche le sens des choses, elle aide à la discipline intérieure, elle soumet nos actions et nos pensées à notre tribunal intérieur dont le juge est notre conscience.

Si l’on doit résumer l’œuvre magistrale de Kant elle pourrait peut-être l’être en trois maximes : la première serait la pensée libre sans préjugés, la seconde celle d’une pensée élargie et la troisième celle du pensée conséquente.

Un triptyque fortement intriqué avec les Lumières, avec L’Aufklärung l’illumination kantienne et aussi la Franc-maçonnerie qui est Connaître, Comprendre et Agir. L’illumination Kantienne permet la Re naissance, la Régénération de l’homme, qui s’éveille aux Lumières et sort de son immaturité. Il va pouvoir se construire ou se reconstruire, avec l’aide des autres, mais d’abord en s’aidant lui-même. Il lui faudra donc s’initier, recommencer avec courage, volonté et persévérance, pour penser par lui-même Sapere aude ! Ce n’est pas si simple, il devra dans son silence intérieur acquérir la Force (B) et établir cette force (J). Des travaux pratiques, des Exercices Spirituels d’application et de formation lui seront nécessaires. Ses réflexions vont le mener à la conversion de son regard sur les choses de la vie et les autres. Une manière d’établir la paix en lui et d’essayer de l’établir dans le monde de manière permanente perpétuelle. Il ne s’agit d’une pratique bien-être temporaire, mais d’atteindre une forme de plénitude de la Paix, pas une respiration ou une trêve. L’ataraxie de l’âme délivre les peuples des souffrances de la guerre, Kant l’avait compris il fallait lutter pour la justice et la Paix perpétuelle. Sa Paix Perpétuelle publiée en 1795 est inspirée d’une idée de Charles-Irénée Castel de Saint-Pierre en 1713 ou Abbé Saint-Pierre, académicien et penseur des Lumières politiques. L’idée de Paix Perpétuelle est fondatrice de la Démocratie et de la République, elle reste toujours à mettre en œuvre, s’il elle était appliquée tous les hommes seraient Frères. L’on peut lire à peu près dans les préliminaires de l’ouvrage de Kant, les principes suivants :

Pas de signature de traité de paix se réservant la possibilité d’une guerre ultérieure.
Aucun achat d’un état indépendant par un autre.
Bannissement des armées permanentes.
Pas de budget pour préparer la guerre.
Pas d’ingérence entre états.
Aucun état en guerre avec un autre ne doit commettre des atrocités qui rendraient impossibles toute confiance future.

Etc.. on peut constater que 230 ans plus tard malgré l’ONU et son conseil de sécurité à peu près aucun de ces principes n’est respecté.

La suite de l’ouvrage de Kant, ne fait état que des aménagements nécessaires pour l’application de ces principes par les états qui doivent respecter la dignité et la liberté de l’homme. Peut-être parce que les dirigeants des états se refusent à prendre à côté d’eux comme conseillers des philosophes, des métaphysiciens, ils préfèrent des courtisans pour les dictateurs et des technocrates, des administratifs pour les plus démocrates d’entre eux ? Imaginons que leurs proches conseillers soient des hommes comme Kant avec sa métaphysique de la morale ou un autre Emmanuel comme Levinas le philosophe de l’altérité et sa métaphysique de l’éthique qui redoutait les excès de la bureaucratie qui mènent à la banalité du mal. Pour fermer le triangle de ses deux Emmanuel, dans le centre duquel l’on voit l’œil du principe. Nous pouvons ajouter l’Emmanuel de la Bible, qui signifie Dieu est avec nous qui appelle la réponse Pax Vobis. Cet Emmanuel biblique qui se confond souvent suivant les évangélistes avec le prophète Jésus et sa Loi d’Amour. Cela nous amène en forme de synthèse à l’une des plus sublimes pensées de Kant, une association entre Foi et Raison : Deux choses remplissent le cœur d’une admiration et d’une vénération toujours nouvelle et toujours croissantes, à mesure que la réflexion s’y attache et s’y applique : le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi d’amour en moi. Ce double infini extérieur à l’homme et son infini intérieur deux immenses mystères qui inspirent grandeur et humilité. Le Franc-maçon l’exprime autrement quand il prend place au centre du cercle et lève les yeux, il affirme : Qu’il a les pieds sur terre en équerre et le compas de l’œil ouvert vers le ciel, ou encore les pieds sur terre et la tête dans les étoiles.

La prise de conscience de ces deux infinis, nous impose le respect de nous-mêmes, des autres de leur totale Liberté dans l’honneur et le respect du monde de la nature. Cette élévation de conscience progressive du Franc-maçon, donne une dimension universelle à la morale et la Foi maçonnique. Pour parvenir à cette élévation de conscience nous devons sortir de nos certitudes et aller vers l’autre. Nous devons sortir de nos villes où nos cœurs et nos yeux sont rivés, entravés, nous devons aller de temps à autre regarder les étoiles qui illuminent le ciel, le monde et notre cœur.

Jean-François Guerry.

Notes :

Isaïe – XII-14. C’est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe : Voici la jeune femme est enceinte, elle va enfanter un fils et est lui donnera le nom d’Emmanuel.

Mathieu- I- 20,21,22,23. Alors qu’il avait formé ce dessein, voici que l’Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ta femme : car ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu l’appelleras du nom de Jésus car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés » Or tout ceci advint pour que s’accomplit cet oracle prophétique du Seigneur.

Voici que la vierge concevra et enfantera un fils, et on l’appellera du nom d’Emmanuel, ce qui se traduit : « Dieu avec nous. »