UN MAUVAIS WESTERN
La lumière ne vient pas de l’ouest. Injonction : « Ce que te demande la franc-maçonnerie, c’est de défendre partout la justice. » Le franc-maçon a l’amour de la justice, il doit se faire son opinion par lui-même. Il ne suit pas toujours la même route que les autres, mais il s’engage dans l’honneur à défendre ses frères. Il se méfie des idoles humaines, il aime le peuple mais ne suit pas la foule. Amoureux de la nature il ne chasse pas en meute l’animal blessé.
Un mouvement né dans la nouveau monde « le Call Out » a donné lui-même naissance à « la Cancel Culture ».
Le Call Out la dénonciation publique est née aux Etats-Unis, elle est l’expression d’un sentiment d’injustice ou de manque de justice.
Le mouvement amplifié autrefois par la rumeur, transmise par la foule, l’est aujourd’hui par les réseaux sociaux. On est passé de l’image placardée à la sortie du Saloon au net.
Le Call Out, a donc accouché de la Cancel Culture qui peut être traduit par : une culture du boycott, une culture de l’annulation, une culture de l’humiliation publique, une culture de l’interpellation, une culture de la dénonciation, de la délation. Au mieux une auto-culture du rééquilibrage, par des auto-justiciers (Source Wikipédia)
Un mauvais Western décliné en série, un feuilleton médiatique, une multitude de petits Zorro occupent l’espace.
« La cancel culture qui nous vient des campus nord- américains et des réseaux sociaux, normalise les tentatives pour faire littéralement annuler les opinions considérées comme illégitimes. On la voit aujourd’hui défendue non seulement outre atlantique par des militants radicaux, qu’ils soient féministes, anti-homophobes, anticolonialistes, antiracistes, ou antiappropriationnistes, mais aussi des sympathisants français. » (Vu dans le journal le Monde de Nathalie Heinich sociologue, chercheuse au CNRS)
On assiste à un affrontement stérile entre ces censeurs de gauche et les anti-censeurs de droite.
Nathalie Heinich met à ce propos en lumière les différences entre la société nord-américaine et la nôtre :
« Le premier amendement de la constitution américaine, tout comme le premier article de la chartre canadienne des droits et liberté, fait de la liberté d’expression ‘un droit fondamental positif’ rendant à priori anticonstitutionnelle toute entrave à ce droit ».
Nous ne sommes pas en France dans ce système juridique.
« Notre liberté d’expression est d’emblée contenue dans des lois qui la restreignent, en interdisant, par exemple l’incitation à la haine raciale, l’appel au meurtre, l’encouragement à toutes les discriminations…. »
Cela doit nous éviter toute guerre civile larvée, manifestations violentes. Tout lynchage médiatique devrait être proscrit. En clair il y a des lois, et les citoyens individuellement ou en groupe ne peuvent se substituer aux juges, aux avocats, à la justice dans son ensemble. Nos institutions sont démocratiques, chez nous pas shérifs ni de coroners.
Les censeurs et les anti-censeurs s’auto autorisent eux-mêmes par leurs jugements médiatisés. Ils instituent une culture de la censure et de l’autocensure, par les ragots, les ont dits, les rumeurs.
La cancel culture balaye d’un même mouvement les juges, les avocats, toute la justice, elle prépare le retour de la barbarie et de l’arbitraire. C’est la justice médiatique des réseaux sociaux, rapide expéditive.
Comment en est-on arrivé là ?
Laure Murat professeure, historienne l’explique par un défaut, un manque de justice, trop lente, sans assez de moyens. Mais la justice n’aura jamais la rapidité des réseaux sociaux et c’est tant mieux !
Laure Murat va donc jusqu’à justifier cette cancel culture, en dénonçant simplement les excès, elle estime :
« Que la stigmatisation à laquelle se livrent en ligne certains militants de gauche radicale peut certes être excessive, mais elle est l’expression de la colère d’une population marginalisée et sans autre voix qu’internet. »
Son propos d’apparence modéré à mon sens, risque de faire basculer les esprits les plus radicaux de la colère à la violence sans redonner à la justice sa place.
La cancel culture échappe à tout contrôle démocratique, une fois ses messages lancés sur les médias ou les réseaux sociaux, les incriminés sont déjà condamnés de fait, sans défense, sans appel.
S’il y a lieu sans ‘mais’ de faire respecter la liberté d’expression, qui est un des fondements des droits de l’homme et ce que la loi permet dans notre pays où il n’y a pas à ma connaissance de prisonniers politiques.
Il y a lieu aussi comme le propose la sociologue Nathalie Heinich de réfléchir à cette affirmation de Lacordaire :
« Entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui affranchit. »
La justice que la franc-maçonnerie nous demande de défendre, c’est bien le contraire de la barbarie, de la loi de la meute sauvage, de l’arbitraire, de la désignation des boucs émissaires, il nous faut combattre toutes les dictatures politiques, religieuses et aussi celles plus modernes des réseaux sociaux incontrôlés qui condamnent sans jugement.
Vous avez surement un avis à ce propos ?
Jean-François Guerry.
Sources : Articles du journal Le Monde.