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la Franc Maçonnerie au Coeur

la Franc Maçonnerie au Coeur

Un blog d'information, de conversations sur le thème de la Franc Maçonnerie, des textes en rapport avec la Franc Maçonnerie, comptes rendus et conseils de lectures.

Publié le par Jean-François Guerry
LE MYSTÉRIEUX PLOTIN – PART- II.  Mieux comprendre…

 

« Ne cesse pas de sculpter ta propre statue jusqu’à ce que l’éclat divin de la vertu se manifeste. » (Plotin- Ennéades I. 6,9)

 

J’ai terminé la première partie de cette réflexion sur Plotin par l’évocation de son rêve d’une cité des philosophes. Après tout ce n’aurait été que la réalisation de la République de Platon son premier inspirateur et maître. Le rêve de cette cité idéale est un mythe, les Francs-maçons aussi s’efforcent depuis plus de 300 ans de construire une cité spirituelle en eux et dans le monde en prenant comme levier le symbolisme de la construction et le mythe de l’architecte Hiram. Dire que c’est une réussite totale serait prétentieux, pourtant les ouvriers se relaient chaque jour sur ce chantier en apportant leur pierre, c’est leur maison commune qu’ils construisent elle a plusieurs pièces mais chacun participe à son entretien du mieux qu’il peut.

Toutes les Sœurs et les Frères ont la chance de bénéficier d’une méthode : le symbolisme de la construction, d’un corpus pédagogique : leurs rituels, d’une Tradition ayant des racines profondes et diverses qui apportent le meilleur de leurs valeurs qui sont autant de lumières qui permettent de se diriger dans l’avenir. Ils font l’alliance de la raison et de la foi maçonnique dans leurs travaux. Ils croient que le perfectionnement de l’humanité passe par le perfectionnement de l’homme qui est infini. Enfin ils ont des lieux pour se réunir et travailler ce qui est exceptionnel dans ce monde trop matérialiste.

Les Sœurs et les Frères apprennent à se défier du monde des apparences, du sensible pour s’ouvrir au monde intelligible. Ils lèvent peu à peu les voiles qui dissimulent la vérité, pour entrer dans le monde réel celui ou l’esprit domine la matière en toute humilité avec leurs facultés humaines. Ces humbles chercheurs tentent de répondre à leurs questions existentielles éternelles en s’efforçant de pratiquer la vertu par préférence au vice.

 

Je suis pour ma part favorable à la construction d’une cité idéale, même si je sais que sa réalisation ne sera sans doute jamais possible dans ce monde. Il faut quand même l’espérer !

Je suis favorable à toutes les célébrations rendues au bien à travers ceux qui en furent les porteurs d’images.

Les Épicuriens font chaque année un banquet en l’honneur d’Épicure, de même les Platoniciens célèbre Platon dans un banquet où de nombreux orateurs font valoir leurs idées, le but étant non de convaincre l’auditoire mais de le mettre sur le chemin du monde des idées. Le faire penser par lui-même suivant la formule Kantienne du siècle des Lumières :Sapere aude.

Les Francs-maçons font leur banquet d’ordre dans certaines obédiences, d’autres fêtent la Lumière aux solstices. Je serais assez partisan d’une grande fête ou d’un grand banquet annuel regroupant toutes les Sœurs et les Frères de part le monde, une agape fraternelle universelle à la Gloire de la Franc-maçonnerie en général.

 

Revenons à nos philosophes en général et Plotin en particulier, Platon dans Timée parlait de l’âme du monde, ce que les stoïciens appelaient son unité, pour eux uniquement immanente, se suffisant à elle-même, sans le recours à une quelconque transcendance.

 

Plotin lui reconnaît l’unité du cosmos, il estime néanmoins que la vie tire son origine de quelque chose de plus haut qu’elle, elle « émane » d’une transcendance. Il y aurait un architecte suprême vers lequel seraient attirés, aimantés tous les êtres ayant une existence. C’est de là que provient l’âme du monde, un suprême niveau de l’être, qui sera bien plus tard au siècle des lumières qualifié d’Être Suprême ou encore de Grand Architecte, de Grand Horloger selon Voltaire, de Grand Géomètre.

Pour Plotin cette suprême unité se pense elle-même, elle est donc dualité, nous revenons ainsi à la distinction sujet objet ainsi est dégradée l’unité.

Comment Plotin va-t-il construire sa pensée ? Avec si j’ose dire la plus grande simplicité, en s’inspirant des lumières du passé. D’abord par la lecture de son maître Platon, en particulier le livre VI de La République, qui souligne que la source du monde des idées, c’est l’Un Bien, cet Un Bien est au-delà de l’essence. C’est Vérité et Mesure selon Platon. « La vérité est-elle amie de la mesure ou du contraire ? Elle est amie de la mesure. Ainsi cherchons dans le philosophe un esprit plein de mesure et de grâce que sa pente naturelle porte à la contemplation de l’essence des choses ». Pierre Hadot historien, philologue et philosophe de l’antiquité a mené une recherche sur Plotin qui nous est proposée entre autres dans son livre : « Plotin ou la simplicité du regard » (Éditions Folio Essais je vous le conseille vivement).

 

La contemplation de l’Un est à la portée de tous ceux qui ont le désir de s’élever spirituellement. Il suffit d’apprendre à regarder, de convertir son regard sur soi-même, sur les autres, sur le monde. N’est-ce pas un des buts de la Franc-maçonnerie ? Dit autrement la réponse est aussi dans le Livre VI de la République : « Revenir (sans cesse travailler à se perfectionner) sur certains traits (de l’homme) jusqu’à ce qu’ils aient rapprochés le plus qu’il est possible l’âme humaine de ce degré de perfection qui la rend plus agréable aux dieux. »

Question : Que vous reste-t-il encore à faire ma Sœur mon Frère ? Réponse : « J’ai à me perfectionner ! » (Extrait de rituel maçonnique).

 

L’on pourrait rajouter une demande ou une autre question : comment se perfectionner ? La réponse est donnée encore dans les rituels maçonniques quand il est dit : « Mes Sœurs, mes Frères que vos regards se tournent vers la Lumière. »

Les sens en effet, même celui de la vue ne permettent que de voir, pas de regarder, ils ne permettent que d’approcher les apparences. Il faut faire intervenir la Lumière pour approcher la Connaissance au-delà du savoir, cette Lumière qui après avoir été reçue, éclaire et illumine l’âme. Platon encore et toujours Livre VI La République :

« Comprends que la même chose se passe à l’égard de l’âme. Quand elle fixe ses regards sur ce qui est éclaire par la vérité et par l’être, elle comprend et connaît, elle montre qu’elle est douée d’intelligence. Mais lorsqu’elle tourne son regard sur ce qui est mêlé d’obscurité, sur ce qui naît et périt sa vue s’obscurcit elle n’a plus que des opinions et passe sans cesse de l’une à l’autre : on dirait qu’elle est sans intelligence. »

 

Il convient donc de faire correspondre son âme avec la Vérité et la Lumière du Bien, les analogies nous sont précieuses pour la compréhension, les Sœurs et les Frères le savent, ce n’est pas par hasard que dans la Loge tout est symbole !

Qu’avez-vous demandé quand vous êtes entré dans la loge ? La Lumière V M. Pourquoi ? Parce que j’étais dans les ténèbres.

 

Platon voit dans le soleil non pas seulement la Lumière mais aussi la vie car le soleil est chaleur et feu. Nous dirions en Franc-maçon : le feu Lumière qui régénère toutes choses.

 

Les êtres intelligibles ne le sont donc que par la grâce du seul bien, c’est leur être et leur essence qui les rends intelligibles. Quoique le bien, l’idée du bien provient sans doute de quelque chose de bien plus haut, de bien plus fort, de bien plus puissant, une force qui est en nous et nous permet de passer du visible à l’invisible. Le Franc-maçon passe, en Force, parce qu’il a purifié son âme grâce aux éléments. Il repassera sans cesse entre les colonnes pour augmenter et établir cette force.

Nous pouvons en conclure que l’Un Bien est « au-delà de l’essence ». Pour Plotin la source de l’Un Bien, la source de l’Être et même celle de l’Être suprême est au-delà. La recherche véritable est bien au-delà des apparences.

 

Plotin, ne fût pas inspiré que par la lecture de Platon, mais aussi par le Parménide ce texte compliqué presque abscond, qui essaye de démontrer les combinaisons multiples de l’Un et de l’Être.

 

Nous arrivons peu à peu au « système » à la philosophie de Plotin aux trois niveaux de royauté ou de divinité :

 

  • Le Premier Un est une suprématie au-delà de l’Être.
  • Le Second Un est première et plus haute forme de l’Être.
  • Le Troisième Un est l’âme du monde.

En dessous du Troisième Un, il n’y aurait que multiplicité et dégradation de moins en moins d’unité, jusqu’à une matière irrécupérable, incapable de se réunifier qui serait hors de l’être.

 

L’on peut voir peu à peu une sorte de hiérarchie spirituelle du monde se dessiner. S’arrêter là, ne serait qu’un constat, Plotin va proposer une dynamique spirituelle, un autre regard sur nous-mêmes et le monde. La note sous le texte démontre que rien n’arrive par hasard, la philosophie de Plotin voit le jour à un moment de décomposition de la société Romaine, peut -elle avoir une actualité ?

 

                  Valence Espagne le 04 février 2022.

 

                                            Jean-François Guerry.

 

 

Note complémentaire :

 

          Plotin la recherche de la lumière.

 

 Le IIIème siècle de notre ère.

 

Il est peu de périodes plus dramatiques que la fin du paganisme : l’Empire romain, menacé à l’extérieur par les Barbares au nord et par les Perses à l’est, est intérieurement déchiré par des crises intérieures de toute espèce : un ébranlement moral, social, intellectuel, met sens dessus dessous les valeurs sur lesquelles avait vécu le vieux monde (…) la pensée se laisse aisément séduire par la bigarrure des doctrines, et par les mélanges les plus bizarres et les plus inattendus des idées venues d’Orient et d’Asie Mineure avec la vieille philosophie grecque.

Dans cette période du IIIème siècle où vécut Plotin est certainement l’un des plus agités, et l’édification de sa philosophie, qui prétend maintenir dans toute son ampleur la pensée des vieux âges, coïncide précisément avec l’époque où, selon l’étude récente de M. Ferrero, s’est produite la ruine de la civilisation antique. « La révolte de Maximin », dit-il, marque le début d’une interminable série de guerres civiles, de guerres au-dehors, de fléaux, pestes, et famines qui durèrent sans interruption un demi-siècle et qui dépeuplèrent et appauvrirent l’Empire, détruisant les élites par lesquelles il avait été gouverné, pacifié et civilisé pendant le premier et le deuxième siècle, et, avec les élites, les arts de la paix et la meilleure partie de la culture grecque et latine…. Le niveau de culture s’abaisse partout ; en philosophie, en droit, en littérature, parce que les nouveaux dominateurs la méprisent et l’ignorent. La décadence s’étend à toutes les industries. Enfin, la religion, qui avait été la base de la vie politique, sociale et intellectuelle, le polythéisme païen, est en train de mourir. Les cultes d’Orient font irruption partout…Le cosmopolitisme de l’Empire, le mélange des races, des religions, des mœurs, des cultures, l’unification du gouvernement, les nouvelles doctrines religieuses et philosophiques avaient frappé à mort en même-temps, le polythéisme et l’esprit de tradition locale… La civilisation gréco-latine était aristocratique à un degré que nous avons peine à soupçonner ; sa force était dans des élites très restreintes.

 

De fait, cette époque a vu la ruine définitive et sans rémission des philosophies dogmatiques qui, depuis cinq siècles, étaient les guides moraux des gens cultivés : le stoïcisme et l’épicurisme. A la fin du IIème siècle, le scepticisme d’un Sextus Empiricus réunit contre elles tous les arguments possibles, et l’idéal sévère des stoïciens ne survit plus que chez des cyniques déguenillés pour qui la pensée philosophique ne compte plus.

C’est en revanche l’âge des commentateurs : on étudie Platon, Alexandre d’Aphrodite, peu avant Plotin, écrit des commentaires détaillés sur les ouvrages d’Aristote. Les philosophes ont le souci constant de se rattacher à une tradition et de ne pas présenter leurs pensées que comme l’exégèse des œuvres des vieux maîtres. Plotin lui-même ne fait pas exception : « nous devons croire que d’anciens et bienheureux philosophes, écrit-il d’un style dévot, ont découvert la vérité ; et il convient seulement de rechercher qui sont ceux qui l’ont trouvée, et comment nous en pouvons avoir l’intelligence ». « Nos théories proclame-t-il encore, n’ont rien de nouveau, et ne sont pas d’aujourd’hui ; elles ont été énoncées, il y a longtemps, mais sans être développées, et nous ne sommes que les exégètes de ces vieilles doctrines, dont l’antiquité nous est témoignée par les écrits de Platon.

(Émile Bréhier La Philosophie de Plotin, partie d’un cours donné en 1921-1922 à la Sorbonne. Le texte de ce livre caractérise un idéalisme élevé, une utopie.)

 

Ce morceau choisi du premier chapitre de la traduction et des commentaires des Ennéades de Plotin par Émile Bréhier donne une vision de l’époque où Plotin et le néoplatonisme font leur apparition. Cette époque présente quelques ressemblances avec les prémisses du siècle des Lumières. Toute la philosophie grecque et latine avait-elle atteint sa pleine lumière, son solstice et allait-elle amorcer sa descente dans la nuit ?

 

Alfred North Whitehead le philosophe des process, a écrit cette citation célèbre: « Toute la philosophie occidentale n’est rien d’autre qu’une série de notes au bas du texte Platon. »

 

(Jean-François Guerry – Extrait du livre Exercices Spirituels Antiques et Franc-Maçonnerie Éditions UBIK Académie Maçonnique de Provence septembre 2021)

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