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la Franc Maçonnerie au Coeur

la Franc Maçonnerie au Coeur

Un blog d'information, de conversations sur le thème de la Franc Maçonnerie, des textes en rapport avec la Franc Maçonnerie, comptes rendus et conseils de lectures.

Publié le par Jean-François GUERRY
Léo Ferré

Léo Ferré

LES POÈTES SONT DE DRÔL’S DE TYP’S

 

Il fallait un libertaire comme Léo Ferré pour chanter les Poètes. Ces drôles de types qui jouent avec les mots, les ensorcellent pour qu’ils nous séduisent, nous parlent d’amour à propos de tout et surtout de rien. Ils ont souvent rangé leurs pieds dans des placards, ils n’en n’ont pas besoin ils marchent dans leurs têtes bien plus loin, bien plus haut. Ils cultivent des fleurs seulement pour leur beauté, la rose est sans pourquoi. Ils parlent avec les oiseaux en secret, ils connaissent leurs mots de passe, leurs mots sacrés, ils volent avec dans la vallée de l’amour.

Arthur Rimbaud, le poète maudit dont les œuvres furent trop rares, du Dormeur du Val au Bateau ivre et ses Illuminations fût un infatigable voyageur de l’esprit. Inspirateur des surréalistes, il avait un penchant pour l’hermétisme et l’alchimie, il a établi une correspondance entre l’Art Royal et la poésie. Capable de consumer les mots dans l’athanor de son esprit pour enflammer son cœur, il fût sans cesse à la recherche de l’Or spirituel.

Le poète a cette faculté de transformer, de sculpter, de polir les mots. De faire que les plus lourds, les plus laids d’entre eux parfois deviennent les plus beaux, et mettent de la joie dans nos cœurs. Par exemple Charles Baudelaire avec son poème Une charogne a bien illustré l’œuvre au noir, la putréfaction, il savait qu’il faut passer par l’obscurité du mal pour atteindre la lumière du bien, il faut bien que la chair quitte les os. Le chemin est long qui permet de transformer le plomb en Or fin. André Breton a écrit : « Il n’est pas de lecture après laquelle on ne puisse continuer à chercher la pierre philosophale. » (A. Breton Les Pas perdus.) La recherche commence par la liberté d’esprit, la disponibilité d’esprit, l’alchimie du verbe est la mère. Le poème métamorphose les mots et le poète qui l’écrit. Il y a une forme d’initiation dans l’écriture des poèmes. Le poète réalise la correspondance entre ce qu’il y a en haut et ce qu’il y a en bas, le VITRIOL à la couleur de l’émeraude. Tout commence par la quête du verbe, la parole créatrice, de la genèse jusqu’au prologue de l’évangile de Saint-Jean, le verbe fait bouillir la matière dans l’athanor, alors naissent les volutes spiralées de l’esprit. C’est pourquoi, la vraie transmission de l’Art Royal est orale, seul le souffle transmis, est capable de faire naître et renaître l’homme nouveau, réel. Celui qui ne participe pas l’œuvre dans l’athanor de sa loge ne peut pas parvenir à la Connaissance, la Lumière apparaît à ceux qui regardent l’Orient. Il est nécessaire de recevoir les fragments mis en dépôts dans les cœurs des participants pour recomposer l’Un, l’androgyne originel. Sinon, impossible d’atteindre le Verbe être. L’alchimie, comme la poésie est une pratique spirituelle démiurgique, mettant en œuvre Theoria et Praxis.

Le Maître travaille à la forge, l’alchimiste au fourneau. La parole perdue, a été déposée dans le cœur de l’homme, c’est pourquoi Saint-Jean, nous intime dans son prologue de la reconnaître, de l’accueillir. D’ailleurs comment pourrions-nous être des hommes si nous étions privés de la parole, nous ne serions que des bêtes. L’alchimie, comme la poésie sont bien des tensions, des chemins vers la parole perdue, elles sont des clés d’Or, pour entendre, écouter et pratiquer la langue des oiseaux.

                                            Jean-François Guerry.  

Charles BAUDELAIRE
1821 - 1867
Une charogne
Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,
Ce beau matin d'été si doux :
Au détour d'un sentier une charogne infâme
Sur un lit semé de cailloux,

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,
Brûlante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons.

Le soleil rayonnait sur cette pourriture,
Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;

Et le ciel regardait la carcasse superbe
Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.

Tout cela descendait, montait comme une vague,
Ou s'élançait en pétillant ;
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.

Et ce monde rendait une étrange musique,
Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,
Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.

Derrière les rochers une chienne inquiète
Nous regardait d'un oeil fâché,
Epiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.

- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
A cette horrible infection,
Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous, mon ange et ma passion !

Oui ! telle vous serez, ô la reine des grâces,
Après les derniers sacrements,
Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,
Moisir parmi les ossements.

Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine
Qui vous mangera de baisers,
Que j'ai gardé la forme et l'essence divine
De mes amours décomposés !
LES POÈTES SONT DE DRÔLES DE TYPES...

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Commenter cet article
C
Cher JF, "la chair, les os, la moelle", ce n'est plus de la poésie mais de la ...charcuterie!<br /> Avouons que le sonnet "à Hélène" du chef de file de la Pléiade, le "Lac" et "la Mort du Loup" des romantiques, "les Conquérants" du mouvement parnassien, etc...sont d'une autre nature et nous enchantent , ce qui n'est pas forcément le cas de ce texte particulier de Baudelaire! Cet hymne à la déchéance qui est constant dans les "Fleurs du Mal" ne me plait guère mais si d'aucuns s'en délectent...tant mieux pour eux!
Répondre
C
Beurk, beurk, beurk, Mr Baudelaire, pas très gai votre poème, et l'inculte que je suis en matière de "belles lettres" préfère rêver avec Ronsard et Lamartine, même si j'ai parfois la larme à l'oeil, plutôt que cauchemarder avec vous!
Répondre
En effet il y a plus gai, mais c'est la poète des Fleurs du mal. Et puis derrière la charogne de la chair il y a les os. Alors quand la chair quitte les os, l'on peut accéder à la substantifique moelle pour évoquer un autre poète plus truculent ! <br /> Jean-François