Jean-François Guerry
I |
nitiation signifie commencement, ce statut ne peut jamais être vécu que seul, dans la mesure où on ne débute, comme d’ailleurs on ne termine que tout seul. Aussi bien nous naissons seul et nous mourront seul, la phase entre ces 2 extrémités conserve ce fil rouge, ce sentiment ontologique de l’unité, qu’on peut transcrire physiquement comme métaphysiquement comme la solitude. On peut aussi se dire que cette solitude qui accompagne souvent le futur initié viendra se résoudre, se formaliser lorsqu’il sera devenu maître, non pas parce que cette solitude cessera, mais parce qu’en la verbalisant, elle passera du domaine de l’affect à celui de la simple constatation, ce qui permettra de la vider de son poison
L’initiation au 3ème degré signe quelque part la solitude ontologique du candidat, elle l’épouse en lui conférant une légitimité à vivre des situations distinctes de la vie profane. On parlera alors d’une expérience symbolique, suivant les 2 acceptions qui recoupent ce terme : 1) symbolique, dans le langage courant, signifie modéré, subsidiaire, léger ; il permet ici de ne pas attenter violemment à un être plus habitué au doux écoulement de la vie profane, que des violences, fussent-elles cérémonielles 2) pris dans son sens initiatique, c’est un terme didactique, où la symbolique nous montre la voie d’exploitation possible d’un fait ou d’un objet, par le biais d’une méthode originale.
Dans cette situation, on comprend très bien en quoi la solitude est un sentiment dont la nature est profondément personnelle, mais dont l’intensité dépend de ce que donne à voir l’environnement extérieur. Mais la prise de conscience dudit centre permet aussi de s’y arrimer, d’y voir une sorte de fondement, de « prochain » qui modère cette déréliction Il est singulier , c’est le cas de le dire, pour le futur maître , de ne jamais quitter cet axe, et qu’autour de celui-ci s’organisent d’incessants remaniements: marcher à reculons, se voir arraché brutalement son tablier de compagnon, devoir enjamber un cadavre, être frappé de façon létale par le maillet, être fiché sur le sol , cerné de 7 maîtres cherchants , puis relevé par les 5 points parfaits de la maîtrise, sorte de chevilles ouvrières axant l’arrimage du nouveau maître au VM.
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La notion même de substitution conserve géométriquement l’unité axiale de l’exaltation, et obéit à celle de ce fil initiatique dont ne s’éloigne à aucun moment le récipiendaire : substitution du corps, substitutions des mots : ce mot a étymologiquement une double acception, celle issue du latin substituere « mettre à la place de » qui signifie qu’il n’y a , à aucun moment une dualité de personnages, mais une succession parfaite d’un seul intervenant ; c’est ce en quoi l’enjambement symbolique du cadavre est signifiant : il représente une ambivalence physique qui contribue à souligner un passage de flambeau et 2) ce verbe est composé aussi de sub, « en dessous » , et statuere, « établir, poser , placer », précisant finalement que cette substitution conserve une forme de subordination , qu’on retrouve dans la position spatiale de l’enjambement et dans le relèvement du nouveau maître. Ce principe de substitution est fondamental, car il va venir corroborer et appuyer un principe qui va ensuite guider le perfectionnement du nouveau maître, en le plaquant sur le principe d’analogie confrontant l’édification du maître accompli, à celle, narrative du Temple de Salomon.
Thierry Didier.